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MASSACRE À LA TRONÇONNEUSE (2022) de David Blue Garcia : la critique du film [Netflix]

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Spectateurs

 

Nom : The Texas Chainsaw Massacre
Père : David Blue Garcia
Date de naissance : 2021
Majorité : 18 février 2022
Type : Disponible sur Netflix
Nationalité : USA
Taille : 1h23 / Poids : NC
Genre : Horreur

Livret de Famille : Sarah YarkinElsie FisherMark Burnham

Signes particuliers : Efficace : oui. Sanglant : oui. Dans l’esprit de l’original : non.  

Synopsis : Melody, sa sœur adolescente Lila et leurs amis Dante et Ruth se rendent dans la petite ville de Harlow, au Texas, pour lancer une nouvelle entreprise. Mais leur rêve se transforme bientôt en cauchemar éveillé lorsqu’ils pénètrent sans le vouloir dans le monde de Leatherface, le dangereux tueur en série dont l’héritage sanglant continue de hanter les habitants de la région. Parmi eux, Sally Hardesty, unique survivante du tristement célèbre massacre de 1973, et bien décidée à se venger.

 

TOUT LE CONTRAIRE DE L’ORIGNAL

NOTRE AVIS SUR MASSACRE A LA TRONCONNEUSE

 

Depuis sa sortie il y a bientôt cinquante ans, le Massacre à la Tronçonneuse de Tobe Hooper aura connu bien des secousses. Suites, remakes, prequels, prequel du remake, rien ne lui aura été épargné et son immense notoriété aura été plus labourée que n’importe quel champ de Colza de la Lozère. 2022, c’est reparti pour un tour, Leatherface est de nouveau ressorti de son placard. Normal puisque les classiques essorés, ça marche (Scream, Halloween…). Sobrement baptisé comme son ancêtre, Massacre à la Tronçonneuse est présenté comme une suite directe au premier film de 1974, ignorant ainsi tout ce qui a été fait sur les sept longs-métrages produits depuis. L’idée était de concentrer ce nouveau récit autour d’un Leatherface soixantenaire forcé de sortir de sa retraite criminelle pour affronter de nouveaux protagonistes envahisseurs et, ô surprise, retrouver sa vieille ennemie Sally Hardesty, seule survivante du carnage original. Legendary Pictures a fait appel à Fede Alvarez (Evil Dead 2013) pour chapeauter l’entreprise côté production et au duo Andy et Ryan Tohill côté réalisation. Problème, après quelques semaines de tournage, le studio n’est pas satisfait des rushes. Le tandem est renvoyé et David Blue Garcia (le thriller Tejano) débarque à la rescousse. Le nouveau réalisateur jette tout à la poubelle et reprend le projet à zéro. Le Covid-19 ayant surgi depuis, sa sortie en salles est annulée et le film bascule sur Netflix, prêt à tronçonner la plateforme.

Oublier tout ce qui a été fait depuis pour revenir à l’original et convoquer tant son histoire que ses personnages et ses séquences les plus cultes, c’était osé. Ambitieux surtout, la démarche allait être logiquement attendue au tournant, plus précisément pour le respect dont elle ferait preuve envers son modèle culte. Et force est d’avouer que ce Massacre à la Tronçonneuse 2022 est à l’original ce que Marine Le Pen est à Jean Lassalle, un exact opposé. « Autres temps, autres mœurs », c’est en somme ce qui creuse le fossé entre les deux métrages. Le chef-d’œuvre de Tobe Hooper, c’était peu d’effusions de sang et une atmosphère éminemment poisseuse et dérangeante. Cette suite « netflixienne », c’est tout le contraire, un maximum de gore et aucune atmosphère particulière. Le chef-d’œuvre de Tobe Hooper, c’était aussi le terrifiant hypnotisme d’une terreur viscérale et un propos sourd qui s’orchestrait de lui-même par association entre son époque et ce qu’il racontait. Cette suite netflixienne, c’est la course effrénée à l’efficacité et un pseudo propos artificiel, installé uniquement pour tenter de faire « comme le modèle » sans qu’il ne résonne vraiment tant il s’élabore sur des clichés linéaires. En bref, on est en face de tout ce qui sépare la créativité et l’audace du cinéma américain libéré des années 70 et la soumission à des cahiers des charges du cinéma américain actuel.

Cette suite 2022 et les codes auxquels elle répond permet de réaliser une chose simple et lapidaire : il serait impossible de refaire le film de 1974 aujourd’hui. Du moins, pas du côté du cinéma traditionnel. Aucun studio n’accepterait une telle radicalité du traitement où la terreur s’incarnerait dans une hystérie monstrueuse couplée à un regard presque documentariste, voire expérimentaliste. Aujourd’hui, le Genre semble devoir répondre à des impératifs pour exciter le jeune public (cible), répondre à un rythme soutenu, à des passages obligés labellisés, à un besoin d’images très graphiques. Sur ce point, le film de Tobe Hooper était presque auteuriste, dans sa mise en scène comme dans sa volonté de refuser le gore sanglant (chose qu’Hooper a toujours détesté).

Maintenant, si l’on déplugge la prise censée brancher cette suite à son modèle et qu’on la regarde pour ce qu’elle est à titre personnel, on pourra lui reconnaître une indéniable efficacité payante. Brutal, sauvage et jouissivement gore, Massacre à la Tronçonneuse 2022 est un roller coaster sympathique qui empile les litres de sang et les kilos d’os et de chairs fracassés, sur un rythme effréné. En se rappelant que Fede Alvarez est à la production, on pense logiquement à sa revisite d’Evil Dead dont la philosophie semble avoir été reprise pour cette suite (a se demander s’il n’en est pas le réalisateur caché). De l’ultra-gore, de l’horreur craspec, une furie non-stop et une volonté d’hommage (certes loupé) à un film mentor, les mêmes ingrédients sont ressortis du garde-manger.

Globalement, on se marre bien devant ce « choc des cultures » entre le monolithique Leatherface et une cargaison de jeunes bobos de la ville venus jouer les idéalistes au fin fond du Texas redneck. Le massacre est savoureux quoique facile (contrairement à l’original, on n’a aucune empathie pour ces bouffeurs de quinoa connectés et moralisateurs), les pointes d’humour noir fonctionnent et rendons à César la salade qui lui appartient, David Blue Garcia balance une poignée de séquences qui ont sacrément de la gueule. De quoi passer au-dessus d’un scénario à la cohérence très discutable, notamment dans sa manière de gérer le retour complètement loupé (et 100% gratos) de Sally Hadesty qui n’est pas sans rappeler le combo nouveaux Halloween/Jamie Lee Curtis. En bref, sympatoche à regarder mais loin d’être la vraie bonne suite espérée.

 

Par Nicolas Rieux

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