[Note spectateurs]
Carte d’identité :
Nom : Marvin ou la belle éducation
Mère : Anne Fontaine
Date de naissance : 2016
Majorité : 15 novembre 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h53 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Finnegan Oldfield, Jules Porier, Grégory Gadebois, Charles Berling, Isabelle Huppert, Vincent Macaigne…
Signes particuliers : Peut-être le meilleur film d’Anne Fontaine.
L’HISTOIRE D’UN MAUVAIS DÉPART
LA CRITIQUE DE MARVIN
Résumé : Martin Clément, né Marvin Bijou, a fui. Il a fui son petit village des Vosges. Il a fui sa famille, la tyrannie de son père, la résignation de sa mère. Il a fui l’intolérance et le rejet, les brimades auxquelles l’exposait tout ce qui faisait de lui un garçon «différent». Envers et contre tout, il s’est quand même trouvé des alliés. D’abord, Madeleine Clément, la principale du collège qui lui a fait découvrir le théâtre, et dont il empruntera le nom pour symbole de son salut. Et puis Abel Pinto, le modèle bienveillant qui l’encouragera à raconter sur scène toute son histoire. Marvin devenu Martin va prendre tous les risques pour créer ce spectacle qui, au-delà du succès, achèvera de le transformer.
Anne Fontaine fait désormais partie des meubles du cinéma français, avec une présence constante mais une réussite qui l’est un peu moins. On l’a autant vu capable du meilleur avec Augustin Roi du Kung-Fu ou Entre ses Mains, que du plus moyen avec La Fille de Monaco ou Coco avant Chanel voire du pire avec Perfect Mothers ou Mon Pire Cauchemar. Un an à peine après le joli succès du très beau Les Innocentes, quatre fois nommés aux César, la réalisatrice est déjà de retour avec une très libre adaptation du roman En Finir avec Eddy Bellegueule d’Edouard Louis. Finnegan Oldfield et le jeune Jules Porier y incarnent ensemble Marvin, jeune héros de ce drame observé à deux périodes de sa vie.
Marvin ou la Belle Education, c’est le portrait d’un jeune garçon à cheval sur deux époques de sa vie, d’abord enfant brimé issu d’une famille semblable aux Tuche de Jean-Paul Rouve puis jeune adulte qui se cherche. Brillamment raconté et monté, le film d’Anne Fontaine entremêle ces deux tranches d’existence fondatrices dans une construction évoluant conjointement avec une grâce magnifique. Les affres de l’enfance explique les traumatismes de l’état adulte et la fragilité de l’état adulte explique le mal-être de l’enfance. L’agencement opérant des allers-retours incessants entre les deux temporalités, permet de lier passé et futur, présent et devenir, immédiateté et projection, mais surtout de poser des questions sur le déterminisme social, sur les conséquences d’enfance difficile dans notre construction personnelle, alors que le film réfléchit également par petites touches, sur l’amour filial, le pardon, la solitude, le harcèlement, les difficultés de la différence dans des milieux sociaux formatés…
Marvin est l’histoire d’un mauvais départ dans la vie, l’histoire d’un petit être sensible qui manque de repères, et dont la différence le pousse à se croire étranger partout, dans le monde comme chez lui. Mais entre coups et mains tendues, Marvin saura se réinventer, il saura pioché dans les bienveillantes mains tendues, de quoi affronter les coups de la vie. Dans un style proche d’André Téchiné, animé par une justesse et une sensibilité bouleversante, Anne Fontaine signe probablement l’un des meilleurs films de sa carrière, si ce n’est le meilleur, et ce malgré quelques passages cédant à quelques atermoiements sur-appuyés. Un récit initiatique profondément émouvant, qui se dessine sur de nombreuses années, tournant autour d’un garçon qui se cherche, qui ne sait pas comment appréhender, exprimer, vivre et assumer sa différence. La subtilité du regard, la force du sujet et les performances des comédiens font le reste.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux