Désormais retraité (on ne l’a plus vu au cinéma depuis 2010 et le film Comment Savoir de James L. Brooks), Jack Nicholson demeure l’un des comédiens les plus admirés de sa génération. En témoignent ses rôles cultes (Vol au-dessus d’un Nid de Coucou, Chinatown, The Shining), ses 12 nominations aux Oscars (un record) sur cinq décennies consécutives ou encore son aura de comédien d’exception encore très respecté du public et de ses pairs. Jack Nicholson est une légende que l’on adorerait revoir un jour dans un film, tout en sachant que cela n’arrivera probablement jamais, son entourage expliquant sa retraite par le fait qu’il ne parvenait plus à mémoriser ses textes (vrai ?). Il avait soi-disant failli ressortir de sa tanière pour le remake américain de Toni Erdmann, mais il a fini par démentir une « rumeur infondée ».
Parmi ses prestations mémorables -outre celles citées plus haut- on pourrait évoquer Les Infiltrés, alias The Departed en V.O., le remake américain du hongkongais Infernal Affairs par Martin Scorsese. Un film dans lequel Jack Nicholson ne devait pas jouer à la base, l’acteur trouvant le rôle trop petit pour valoir un retour alors qu’il avait déjà entamé un fort ralentissement de ses sorties cinématographiques (il s’agit de son antépénultième film) et qu’il n’avait plus joué depuis trois ans. Il changera d’avis quand Scorsese décidera d’étoffer davantage le rôle pour le convaincre. Nicholson y incarne Frank Costello, un parrain de la mafia irlandaise de Boston. Face à lui, Leonardo DiCaprio campe Billy Costigan, un flic infiltré dans son gang afin de le faire tomber.
L’une des scènes les plus cultes est un face à face final entre Jack Nicholson et Leonardo DiCaprio. Les deux acteurs conversent dans une ambiance sous très haute tension. Jusqu’au moment où Nicholson/Costello sort un flingue de dessous la table face à un DiCaprio/Costigan médusé. La scène est prodigieuse à bien des égards. Pour l’atmosphère que réussit à déployer Martin Scorsese à la force d’une mise en scène et d’un montage au cordeau, mais aussi pour la performance de haut vol des deux comédiens à l’écran. Jack Nicholson laisse poindre son visage le plus inquiétant tandis que Leo DiCaprio joue un mélange de conviction et de terreur sourde. Une terreur qui explose quand ledit flingue apparaît. Dans son regard, on voit la peur, on sent la peur. Et pour cause ! Ce flingue n’apparaissait nulle part dans le script de la scène. Personne n’était au courant, ni DiCaprio, ni l’équipe, ni même Martin Scorsese. Le visage de Leonardo DiCaprio que l’on voit se décomposer à l’écran, n’avait rien d’un formidable geste d’acting, c’était du « vrai » comme on dit. Il n’a pas joué la frayeur, il a été réellement effrayé. Le résultat fut si fort, qu’en accord avec ses comédiens, Scorsese décidera de conserver la séquence au montage. Encore aujourd’hui, Leonardo DiCaprio évoque ce moment comme l’un des souvenirs les plus marquants de sa carrière.