A l’occasion de la présentation de Get On Up au Festival de Deauville, on a rencontré le réalisateur Tate Taylor (La Couleur des Sentiments) qui nous a parlé de son excellent biopic sur James Brown, porté par le fabuleux Chadwick Boseman. Le film sort en salles ce mercredi 17 septembre. Notre critique du film ici.
Comment avez-vous fait pour mettre autant d’énergie dans ce film ?
Je suis juste… heureux de la vie ! Si vous n’avez pas d’énergie, il ne faut pas faire de film sur James Brown. J’ai choisi des scènes spécifiques pour que le public soit accroché, pour qu’il n’ait pas envie d’aller aux toilettes par peur de rater un truc important ! J’ai essayé de raconter son histoire avec le plus de sincérité possible. Il y a des moments plus bas en énergie mais le niveau émotionnel est tellement élevé… Et puis en retranscrivant bien les performances de James Brown, vous ressentez forcément de l’énergie.
Il y a un point commun entre le cinéma et la musique, c’est que tout est une question de tempo. Comment vous y êtes-vous pris pour filmer les parties musicales ?
Ce que j’ai fait, c’est que j’ai sélectionné une liste de chansons et de concerts. Et j’ai décidé de tourner le film plus comme un musical. La narration s’arrête sur les plus grandes chansons de James Brown et ses grands show. Donc, une fois que j’avais sélectionné tout ça, on les a mise dans le film et on a complété l’histoire avec les scènes avant et après pour créer des ponts. Ca m’a permis de davantage m’impliquer sur le film, en fait. Au final, j’étais le chorégraphe, il dansait. C’était super. Après, on a rajouté les histoires parallèles avec les membres de sa troupe, l’impact sur ses fans, sa jeunesse…
C’est un biopic mais on ne le ressent pas comme tel, entre les chansons, le liant entre les différentes parties lorsqu’il s’adresse directement au public etc… Pouvez-nous parler de cette façon de rendre le film plus fluide et moins conventionnel ?
C’est parti d’une envie de rendre le film moins conventionnel mais pas pour les raisons que vous pensez. Sur un biopic, l’un des plus gros pièges qui peut rendre un film ennuyeux, c’est que vous avez à délivrer beaucoup d’informations sur quelqu’un, sur son succès, son accomplissement de soi. Et traditionnellement, vous utilisez une voix off, le montage, avec des titres de journaux etc… Et je me demandais comment faire différemment. Un matin, je me suis réveillé et je me suis dit « James Brown était quelqu’un qui contrôlait tout ». Et tout le monde pourrait l’imaginer en train de revenir aujourd’hui d’entre les morts pour s’assurer qu’un film sur sa vie se fait correctement ! Ce serait tellement James Brown… Et quand Chadwick Boseman a commencé à jouer le personnage, j’ai vu une opportunité parce qu’il avait une telle aisance pour parler aux gens. Et c’est là que j’ai décidé d’exploiter ça.
Pouvez-vous nous parler du processus pour choisir le bon « James Brown », en l’occurrence Chadwick Boseman, qui est vraiment impressionnant ?
Il est si bon que ça ? (rires)
En fait, quand il fallu caster notre James Brown, j’ai essayé de chercher plutôt le vieux James Brown. C’est celui que les gens ont en tête. Et je me suis dit qu’il fallait que le choix soit vraiment bon car il ne fallait pas qu’il soit ridicule et fasse rire les gens. Il me fallait le meilleur acteur possible et j’ai senti que ça serait Chad car il est de Caroline du Sud comme James Brown, moi du Mississipi. Je savais qu’il comprendrait le vieil homme qu’il était. Parce qu’il avait les références de ses grands-parents. Quand j’ai rencontré Chad, il est arrivé en parlant avec ce ton sexy, cool, swinguant… Je lui ai dit « Je veux que tu aies 63 ans ». Il a été très surpris. Et il l’a fait. Il était si convaincant dans sa façon de jouer ce vieil homme fatigué et cassé, que je me suis dit, maintenant, j’espère qu’il sera capable d’apprendre à danser. Je lui avais fait jouer cette scène vers la fin du film où il retrouve son ami pour lui donner des tickets pour son show.
Vous l’aviez vu dans le film 42 avant (un biopic sur le joueur de baseball Jackie Robinson – ndlr) ?
Je ne l’avais pas vu dans 42 avant de faire le film. Pareil, je n’avais rien regardé de Jessica Chastain sur la La Couleur des Sentiments… Je savais que j’avais engagé le meilleur acteur possible donc je n’avais pas besoin de voir ce qu’il avait fait avant.
Votre travail sur La Couleur des Sentiments vous a aidé pour faire ce film, notamment pour tout ce qui est de la maîtrise du contexte historique, des décors, des costumes etc. ?
C’est drôle parce que je n’aime pas particulièrement les films dits « historiques ». J’aime juste les films qui se passent à une époque différente. En fait, ça ne m’intimide pas du tout, ça ne me rend pas du tout nerveux. C’est juste que j’aime les vieilles histoires parce qu’aujourd’hui, faire un film contemporain avec tous ces trucs, les ordinateurs etc. n’engendre aucun conflit. Tout est tellement flexible. Et c’est limite ennuyeux. Probablement que La Couleur des Sentiments m’a donné de la confiance pour retenter l’expérience mais de toute manière, j’avais une excellente équipe, le même costumier, le même décorateur, le même designer que La Couleur des Sentiments. Et un réalisateur est toujours meilleur quand il est bien entouré, surtout si vous les laissez faire leur job et que vous n’essayez pas de vous en mêler. J’avais les meilleurs.(Tate Taylor, Chadwick Boseman et les producteurs du film, Mick Jagger et Brian Grazer)
Vous travaillez une fois de plus avec Viola Davis et Octavia Spencer, on peut dire que vous avez trouvé vos muses ?
Et avec Aunjanue Ellis. Vous ne le savez peut-être pas mais Aunjanue, qui joue ici Vicki, la femme de Bobby Byrd, était déjà dans La Couleur des Sentiments. Pareil, la reporter qu’on voit au début au Vietnam, elle aussi était déjà dans La Couleur des Sentiments. Ca fait beaucoup de monde. On est comme une famille, on s’aime tous, on a l’habitude de travailler ensemble et on se connaît par cœur.
Bande-annonce :