Nom : Le Consentement
Mère : Vanessa Filho
Date de naissance : 11 octobre 2023
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h58 / Poids : NC
Genre : Drame, Biopic
Livret de Famille : Jean-Paul Rouve, Kim Higelin, Laetitia Casta…
Signes particuliers : Poignant, révoltant, glaçant.
Synopsis : Paris, 1985. Vanessa a treize ans lorsqu’elle rencontre Gabriel Matzneff, écrivain quinquagénaire de renom. La jeune adolescente devient l’amante et la muse de cet homme célébré par le monde culturel et politique. Se perdant dans la relation, elle subit de plus en plus violemment l’emprise destructrice que ce prédateur exerce sur elle.
L’ART… ET LA MANIERE
NOTRE AVIS SUR LE CONSENTEMENT
Point de littérature avant toute chose. Qui est Gabriel Matzneff ? Un auteur respecté -quoique finalement peu lu en réalité contrairement à ce que l’on croit- qui n’a eu de cesse de relater dans ses livres, ses « amours » passionnels avec de très jeunes filles. Pendant longtemps, ça n’a posé problème à personne. En 2013, il recevait même le prestigieux prix Renaudot. A personne sauf à Denise Bombardier, chroniqueuse-productrice-essayiste québécoise, d’ailleurs récemment disparue. Durant des décennies, l’écrivain Gabriel Matzneff a joui d’une affection complaisante des médias, d’une certaine intelligentsia, et d’un adoubement des cercles culturels, comme s’il était un intouchable que le patriarcat médiatique flattait et congratulait. Certains ont peut-être en tête cette archive télé sur le plateau de Bernard Pivot où Denise bombardier rentrait frontalement dans le lard de son interlocuteur pour dénoncer ce qui paraissait indéfendable du point de vue du bon sens. Résultat, elle sera moquée, honnie, insultée et traînée dans la boue durant le restant de sa vie. Son crime, avoir osée s’en prendre en direct à un homme érudit pour lui balancer des vérités pourtant si évidentes.
En 2020, Vanessa Springora sort un livre dans lequel elle livre sa version de sa romance avec Matzneff. Il avait 50 ans, elle en avait 14. Elle a été séduite par cette figure à l’aura charismatique, il en su en tirer avantage. Emprise toxique, manipulation et destruction psychologique, vampirisme affectif, perversion narcissique, Springora sera détruite par un homme ayant tiré avantage de son immaturité émotionnelle d’enfant passionnée et captivée. Aujourd’hui, la réalisatrice Vanessa Filho (
Gueule d’Ange) met en scène le livre et signe un film fort, dur, cruel, et profondément d’actualité. Car si les faits relatés ont eu lieu dans les années 80 et interrogent encore sur le « où commence l’amour consenti et où prend fin la pedophilie », il est aussi question d’emprise masculine, de domination psychologique, de vision patriarcale. Autant de sujets davantage poussés sur le devant de la scène depuis #
Metoo et l’élan de révolte féministe qui s’en est suivi. Au-delà de ça, d’autres questionnements viennent enrichir la narration. La fameuse différence entre l’homme et l’artiste (ici balayé par le fait que l’artiste raconte inlassablement qui est l’homme) et le débat quant à savoir si la littérature peut-elle tout se permettre. C’est ce que pensait Matzneff. La littérature aurait tous les droits selon lui, au nom de l’art.
A travers le regard d’une enfant piégée par son admiration devenu amour devant un mentor culturel et affectif, Le Consentement étale aux yeux de tous le sale type malsain qu’est Matzneff et que certains défendent encore car sa plume est magistrale (franchement ça se discute, elle est surtout poético-racoleuse). Porté par une formidable Kim Higelin toute en fragilité et un Jean-Paul Rouve glaçant d’horreur, Le Consentement est un film émotionnellement fort et douloureux, qui en dit plus que son seul sujet de départ. S’il peut manquer parfois d’un peu de recul car il est la vision d’une des deux parties (logiquement tout est appuyé pour opposer la fragilité innocente contre le Mal sur-orchestré), il n’en est pas moins une œuvre bouleversante et sociologiquement importante… car n’oublions pas que l’on ne parle pas d’évènements qui ont cent ans d’âge. Matzneff bénéficiait encore d’une tribune médiatique il y a seulement quelques années.
Par Nicolas Rieux