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LA FRACTURE de Catherine Corsini : la critique du film [Cannes 2021]

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Spectateurs

Carte d’identité :

Nom : La Fracture
Père : Catherine Corsini
Date de naissance : 2020
Majorité : 27 octobre 2021
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h38 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Valeria Bruni Tedeschi, Marina Foïs, Pio Marmai, Aïssatou Diallo Sagna…

Signes particuliers : Un film choc passionnant qui pèche juste par excès de démagogie.

 

 

QUAND LE DIALOGUE EST ROMPU…

NOTRE AVIS SUR LA FRACTURE

Synopsis : Raf et Julie, un couple au bord de la rupture, se retrouvent dans un service d’Urgences proche de l’asphyxie le soir d’une manifestation parisienne des Gilets Jaunes. Leur rencontre avec Yann, un manifestant blessé et en colère, va faire voler en éclats les certitudes et les préjugés de chacun. À l’extérieur, la tension monte. L’hôpital, sous pression, doit fermer ses portes. Le personnel est débordé. La nuit va être longue…

S’il n’a rien glané de son passage en compétition officielle au dernier festival de Cannes, La Fracture, nouveau long-métrage de Catherine Corsini trois ans après le magnifique Un Amour Impossible, a au moins su faire parler de lui. En cause, une conférence de presse dans laquelle Pio Marmaï s’est laissé aller à une phrase à l’encontre du Président de la République qui a beaucoup fait parler. A tort car les propos du comédien avait été passablement détournés de leur contexte par l’assoiffée « presse à buzz » jamais en reste pour déclencher une polémique. Et La Fracture était parfait pour cela tant son sujet était sensible. Catherine Corsini y signe une comédie dramatique sociale tournée en huis-clos dans un hôpital un soir d’émeutes féroces dans Paris alors que la gronde des Gilets-Jaunes est à son paroxysme. Dans cet étroit microcosme replié sur lui-même, différentes personnes se retrouvent côte à côte, quidams, manifestants blessés ou bobos parisiens. La proximité et l’attente interminable vont provoquer des échanges.

Avec La Fracture, Corsini délivre un témoignage efficace et percutant sur la gronde sociale qui a animé le pays pendant de longs mois. Le choix d’un hôpital comme cadre de l’action était idéal pour la metteur en scène. Tout le monde y est logé à la même enseigne, prisonnier du temps, de l’attente, du manque de moyens qui la génère. La promiscuité des êtres devient une promiscuité sociale et c’est sur elle que la cinéaste s’appuie pour dérouler un récit où il est question d’écoute, de choc des opinions, d’une France divisée qui ne se comprend et ne s’entend plus. Dans ce chaos angoissant, c’est bien d’écoute dont il va être question. Des horizons différents (un routier et une dessinatrice parisienne) forcés de cohabiter vont devoir apprendre à le faire. Et de là émerge tout le propos de La Fracture. Si la France est ainsi divisée, à fleur de peau, c’est parce que les opinions différentes ne s’écoutent plus, l’agressivité est un réflexe premier qui condamne le dialogue. Et sans dialogue, la confrontation, puis le chaos.

La métaphore imposée par le film est passionnante, d’autant que Catherine Corsini parvient à la densifier en abordant d’autres thématiques parallèles comme l’état de délabrement absolu de l’hôpital public français. Manque de moyens, personnel dévoué mais à bout et parfois impuissant devant la tâche trop considérable. Que vient faire cette seconde thématique au milieu du propos principal ? Elle l’accentue tout simplement, non sans intelligence. Elle vient souligner le fait que ce n’est pas juste une poignée de gens vêtus de gilets fluo qui crient leur détresse, c’est tout un système qui est au bord de la rupture, du prolétariat aux médecins. Un corps médical ici spectateurs de cette « fracture » physique et sociale puisque les jambes cassées résonnent avec une France cassée. Et pour composer ce paysage, Corsini de s’appuyer sur des comédiens qui incarnent avec passion et conviction leurs personnages. Comme Pio Marmaï habité par ce rôle de routier grande gueule et manifestant convaincu dont la guibole a été lacérée par une grenade de CRS. Comme une Marina Foïs formidable en témoin distancée accompagnant son ex petite-amie. Comme Valéria Bruni-Tedeschi absolument énorme dans la peau de cette dessinatrice autocentrée, littéralement insupportable d’égocentrisme autant que touchante de fragilité désespérée. On ne sait jamais si la comédienne est d’une authenticité saisissante ou au-delà du cabotinage, mais elle offre à voir une prestation aussi folle que son personnage.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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