[Note des spectateurs]
Carte d’identité :
Nom : Aquaman
Père : James Wan
Date de naissance : 2018
Majorité : 19 avril 2019
Type : Sortie Blu-ray/DVD
Nationalité : USA
Taille : 2h24 / Poids : 160 M$
Genre : Super-héros
Livret de famille : Jason Momoa, Amber Heard, Nicolas Kidman, Patrick Wilson, Willem Dafoe, Dolph Lundgren, Yahya Abdul-Mateen…
Signes particuliers : Un film hors-normes, sorte de gros bordel halluciné capable de génie comme d’une nullité abyssale.
LE FILM LE PLUS DINGUE DE L’ANNÉE 2018
LA CRITIQUE DE AQUAMAN
Synopsis : Les origines d’un héros malgré lui, dont le destin est d’unir deux mondes opposés, la terre et la mer. Cette histoire épique est celle d’un homme ordinaire destiné à devenir le roi des Sept Mers.
Alors que le MCU de Marvel continue d’avancer en écrasant la concurrence tel un destroyer à la mécanique bien huilée, Warner Bros tâtonne toujours de son côté pour essayer de construire péniblement un DC Universe crédible et cohérent. Pour un Wonder Woman plutôt bien accueilli, le studio enchaîne les purges ou les semi-gadins à l’image de Suicide Squad, Batman V Superman ou Justice League, et l’on sent clairement que la confiance ne règne pas autour d’un vaisseau qui navigue à vue et peine à s’organiser autour de tentatives désunies. Et ce n’était pas Aquaman qui avait de quoi rassurer tout le monde. En plus d’être nettement moins populaire que les Batman, Superman et autre Wonder Woman ou Flash, Aquaman s’est vite savonné la planche en s’offrant à travers des bandes annonces qui transpiraient la laideur et le ridicule, et qui n’ont pas manqué de faire jaser du côté de fans en hyperventilation. Pourtant, Aquaman avait un argument qui plaidait originellement en sa faveur : James Wan. Le réalisateur de Saw ou Conjuring avait su prouver via son Fast & Furious 7, sa capacité à se fondre derrière une mythologie pour ensuite balancer des kilotonnes de fun. Restait à savoir s’il y parviendrait en appréhendant un univers en grande souffrance, avec la pression de producteurs flippés au-dessus de sa tête. La réponse ? Dire qu’Aquaman est trèèès loin de tout ce que l’on en attendait serait un euphémisme.
Là où Aquaman créé la surprise, c’est dans sa nature épidermique d’aberration gargantuesque, dans sa démarche déconnectée de toute rationalité cinématographique, qui repousse les limites du portnawak jusqu’à les envoyer valser dans l’espace en tutu et avec des maracas. On aurait pu craindre l’extrême intrusion des huiles de Warner tellement terrifiés à l’idée de se ramasser encore une fois, qu’elles n’auraient jamais lâché la grappe de James Wan pour essayer de le contrôler et de le pousser à accoucher d’un résultat lisse, le plus marvellien possible dans l’âme. Curieusement, c’est tout le contraire qui s’est produit. Aquaman est une œuvre unique en son genre, une sorte de potion chimique instable prête à exploser, un super-blockbuster complètement taré et débridé, proche de l’hallucination en roue libre, à l’image même d’un James Wan déchainé qui s’autorise tout et n’importe quoi, pour le meilleur et pour le pire. En fait, Aquaman a beau être une grosse production théoriquement calibrée, il transpire l’œuvre libre et hybride, affranchie de toute normalité et décomplexée à tous les niveaux (y compris côté mauvais goût). A chaque seconde, on en vient à se demander si quelqu’un a le contrôle sur la folie qui est en train de se dessiner à l’écran ou si tout le monde a lâché prise au point d’ouvrir les vannes du gigantesque nanar débilo-jouissif. Pas mieux côté spectateur, lequel n’a de cesse de se demander si Aquaman est un film de super-héros sérieux ou une vaste blague parodique qui se fout ouvertement de sa gueule, de se demander s’il est outrancièrement mauvais avec ses saillies de série B dégueulasse dignes de la grande époque du Bis italien ou s’il est au contraire sympathiquement génial avec sa folle quête d’un anticonformisme ingérable…
Car tout coexiste dans cet espèce de magma en fusion bordélique où le spectaculaire répond à un second degré quasi surréaliste. Furieusement détaché de tout et dans une optique aux antipodes de Zack Snyder avant lui (qui était obnubilé par l’envie de bien faire), James Wan semble avoir pris le parti de se dire qu’après tout, il est en train de faire un film de super héros waterproof qui respire sous l’eau et contrôle les baleines, donc inutile de se prendre vraiment au sérieux. De fait, le cinéaste a décidé de s’éclater comme un dingue et s’autorise toutes les folies comme s’il n’en avait strictement rien à foutre que « ça passe ou pas ». Semblable à un gamin dans un magasin de jouets, James Wan fonce tête baissée dans tous les murs et les explose avec l’enthousiasme d’un môme insouciant qui se fiche de la propreté, du sérieux, des bonnes manières et de la bonne tenue. Résultat, Aquaman part dans tous les sens, déborde de tous les côtés, ressemble à un monstre glouton multicolore, et mixe des séquences géniales à la virtuosité sidérante avec des passages dignes d’une furieuse purge risiblement nonsensique où le moindre trait est surligné au marqueur qui tâche, quitte à venir volontairement flirter avec le ridicule tape-à-l’œil façon cinoche bodybuildé des années 90. Dans cette logique de gros lardon calorique assumant son n’importe-quoi fumant, des scènes d’action impressionnantes (tout un passage visuellement dément dans un village sicilien) cohabitent avec une direction artistique à vomir de mocheté, un humour de gros beauf caractérisé par des punchlines à la ringardise hilarante côtoie des dialogues d’une bêtise à bouffer des algues, un Aquaman badass et méga-fendard régale pendant qu’un sous-méchant minable affublé d’un costume de fourmi acheté en solde chez JouéClub gesticule comme un neuneu pas content, des idées visuelles magnifiques éclaboussent l’écran pendant que des fonds verts ignobles irradient les yeux, l’intensité du spectacle embarque avec panache quand des chansons « what the fuck » comme tout droit sorties d’un autre film viennent couper l’élan et provoquer des éclats de rire gênés… Oui, il y a de tout dans Aquaman, sorte de méga-repas fastueux mais indigeste dans un resto à cheval entre le Fouquet’s et Flunch, où l’on se régale autant que l’on a envie de gerber, tout en souffrant d’un estomac au bord de l’implosion.
Et au sommet de toute cette tambouille frénétique tour à tour jubilatoire ou embarrassante qui tape partout sans vergogne (du Seigneur des Anneaux à Pacific Rim en passant par Avatar, Jupiter Ascending, Indiana Jones, Les Chevaliers du Zodiaque et la liste est longue), il y a la générosité du spectacle et la générosité de James Wan, et c’est elle qui fait la différence. Cette générosité est si excessive, si tape-à-l’œil, si lourdement grossière, qu’elle parvient à sortir cet Aquaman nanardeusement brouillon des ornières de la nullité transgénique, pour en faire une sorte de plaisir coupable hors normes défiant toutes les règles du bon goût, voire défiant même toutes les règles du cinéma tout court. On ne sait pas ce que deviendra Aquaman avec le temps, un film culte pour sa nullité criarde ou un coup d’éclat génial ayant insufflé un vrai ton original dans le monde balisé des films de super-héros, mais toujours est-il que dans l’immédiat, le film de James Wan est un gros machin bicéphale, avec un côté pile à la fois baroque, éclatant, drôle et souvent inventif, et un côté face difforme où règnent des pustules de connerie fascinante assénant un discours écolo dans un film où Jason Momoa nage comme un dauphin en jean, boit des litres de bière, chevauche des hippocampes géants en armure et affronte un homme-fourmi à rayon laser qui s’énerve sur du Depeche Mode, pendant qu’une Nicole Kidman ultra-photoshopée se prend pour un maître de kung-fu et qu’un Patrick Wilson blond veut dominer le monde avec sa fourchette en or et ses requins de guerre. On en oublierait presque Amber Heard et sa crinière de feu qui minaude en se prenant pour un pilote de Star Wars sous-marin et en balançant des punchlines d’un autre temps. Quel programme mes enfants !
LE BLU-RAY DE AQUAMAN
Techniquement, on ne peut rien reprocher à la galette éditée par Warner. En terme d’image, le film envoie une qualité visuelle assez impressionnante, d’une netteté, d’une fluidité et d’une précision sans faute. Le moindre détail jaillit à l’écran pour le meilleur et pour le pire. Car bien évidemment, les effets spéciaux ont eux aussi droit au bon côté de cette superbe définition et ceux qui piquaient un peu les yeux au cinéma, piquent logiquement les yeux sur cette édition HD. Reste que l’on tient là le genre de Blu-ray qui rappelle pourquoi le DVD, c’est quand même sacrément bof aujourd’hui. Mais comme tout évolue en permanence, notons que l’édition 4k Ultra-HD ringardise sur place le simple Blu-ray classique en terme de définition et le ferait presque passer pour un vieux DVD baveux quand on les compare. Bref, à cela s’ajoute un transfert et un étalonnage aux petits oignons et un son dantesque. Pour le son justement, Warner propose quatre possibilités d’écoute. Deux pistes anglaises et deux pistes françaises pour être précis. Dans les deux cas, il s’agit en gros d’une piste en Dolby Atmos et d’une piste DTS-HD Master Audio 5.1. Les mieux équipés se régaleront avec les pistes Atmos qui offrent une expérience sonore indéniablement magistrale. Mais pour les autres, elles risqueront de s’avérer moins précises et plus inabouties. Mieux vaudra donc basculer sur les pistes DTS-HD Master Audio 5.1 qui sont à la fois claires, bien spatialisées et armées d’un panache et d’une puissance nickel chrome.
Les suppléments maintenant. Plus d’une heure de bonus nous annonce la galette Blu-ray. C’est bien, ni trop ni pas assez. A condition que le contenu assure bien entendu. Outre deux babioles teasant Shazam! (mais vu qu’il est sorti en salles depuis, on s’en fout), le gros des suppléments tient en deux modules. D’abord, Devenir Aquaman (13 minutes) qui s’attarde sur la préparation physique et psychologique de Jason Momoa pour le rôle. Puis Une plongée dans le monde d’Aquaman qui fait office de making of (19 minutes). De la pré-production au tournage, le module est assez intéressant et instructif, évoquant notamment les challenges qui se présentaient comme la mise en image du monde aquatique. On regrette juste qu’il ne soit pas plus long. Cela étant dit, plusieurs modules suivent et le complètent. James Wan : fondateur d’un univers (7 minutes) donne la parole au réalisateur qui évoque ses inspirations pour recréer l’Atlantide. Encore une fois, intéressant mais court. Ce que l’on pourra finalement dire de tous les modules en fait. Seront également abordés ensuite dans des modules toujours plus courts, des sujets comme le personnage et ses origines dans les comics, les personnages féminins qui l’entourent (Amber Heard, Nicole Kidman), les entraînements de Patrick Wilson et Yahya Abdul-Mateen II, les designs des différents royaumes, la création des créatures sous-marines du film, l’aqua-technique… Et l’on aura droit à des études de trois scènes (la première apparition d’Aquaman, le passage en Sicile et la scène de la Fosse). Enfin, dans Les Royaumes des Sept Mers (7 minutes), Dolph Lundgren évoque l’histoire des sept royaumes. Globalement, des bonus efficaces mais qui frustrent parfois par leurs durées.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux