Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Frontière(s)
Père : Xavier Gens
Livret de famille : Karine Testa (Yasmine), Amélie Daure (Klaudia), Estelle Lefébure (Gilberte), Samuel Le Bihan (Goetz), Joël Lefrançois (Hans), Aurélien Wiik (Alex), Maud Forget (Eva), Jean-Pierre Jauris (Le Von Geisler), David Saracino (Tom), Adel Bencherif (Sami)…
Date de naissance : 2007
Nationalité : France
Taille/Poids : 1h48 – 2,2 millions €
Signes particuliers (+) : Un film extrême et inconfortable à déconseiller aux âmes sensibles. Craspec, ce survival hardcore fait effet.
Signes particuliers (-) : Souffre de toute seconde vision. Acteurs catastrophiques et clichés multiples le plombent.
AUX FRONTIÈRES DE L’IRRÉEL
Résumé : Dans un contexte social perturbé par l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, une bande de jeunes banlieusards commettent un braquage. Ils s’enfuient loin de la capitale et trouvent en chemin refuge dans une auberge glauque au fin fond de la campagne française. Ils sont loin de se douter que les tenanciers sont certainement bien plus tordus qu’eux…
Le cas Frontière(s) est un problème délicat. On a tout lu sur le film. Certains l’ont classé « pur navet », d’autres ont beaucoup aimé et félicité la tentative de ciné d’horreur craspec à la française avec redneck franchouillards à la clé… Deux visions ne sont pas de trop pour se faire une opinion plus arrêtée sur la question. Deux visions qui vont amenées la clarté…
A la première vision, Frontière(s) est tout sauf le film catastrophique que l’on veut bien entendre ça et là. Tentative d’un ciné différent, radical, dérangeant, bien dégueulasse et éprouvant dans un climat de cinéma lisse, formaté où l’on pond comédie sur comédie avec un polar intercalé de temps à autre, enfin un film qui débarque de nulle part, produit par un Besson décidément incroyable d’éclectisme (quoiqu’on pense du bonhomme). Enfin un film qui fait du rentre dedans à la censure, au spectateur et au cinéma français en général. Un film que l’on sent passer et qui tente de renouer avec la tradition ancienne des films trash américains, ses campagnes sordides et crasseuses, ses habitants différents, enfermés hors du temps, loin de la civilisation pour notre petit regard de citadin basique. Viscéral, le film de Xavier Gens prend aux tripes et se présente comme un survival brutal et hardcore avec une certaine cohérence thématique. Sur fond de discours social sur un contexte troublé par l’arrivée de l’extrémisme au pouvoir, nos jeunes héros vont franchir la frontière de l’horreur. mais le titre du film comporte un « s » induisant une pluralité. Au de-là de la simple frontière horrifique où ils vont basculer dans un cauchemar inimaginable, ils vont également passer au de-là des frontières de la moralité, de l’humanité alors que la société bascule elle aussi au de-là de la frontière politique séparant l’extrême du traditionnel.
Mais le problème qui se pose avec Frontière(s) est le même que pour nombre de productions françaises de genre. A la première vision, on est tellement soulagé de voir quelque chose qui change un peu du cinéma traditionnel français, que l’on applaudit chaleureusement la tentative de foutre un grand coup de pied dans la fourmilière. Doté de qualités incontestables dans sa façon de digérer les codes et de recracher un pur survival jusqu’au boutiste bien trash respectueux du genre, Frontière(s) recèle plusieurs scènes bien fichues et efficaces. Les ennuis surviennent à la seconde vision. Car passé la claque de la différence, de la surprise… restent les défauts. Et à la seconde vision, malheureusement, on ne voit plus qu’eux. Une multitude de défauts qui s’amoncèlent plaçant le film dans une position ambiguë de semi-réussite/semi-échec. Des scènes de violence dont on s’interroge sur leur sens et leur éventuelle gratuité à l’inverse d’un Martyrs (ce que n’arrange pas une affiche jouant ouvertement sur la surenchère gore), le film accumule quelques clichés et caricatures grotesques. Et bien évidemment, arrive la question fatale des comédiens, problème récurrent du cinoche horrifique français, qui ont cette fâcheuse tendance à jouer comme des culs, surjouant la moindre émotion.
Peut-être le film d’une seule fois, peut-être à ne voir qu’à l’époque de sa sortie, Frontière(s) révèle à sa seconde vision les quelques défauts qui le rendent bancal. Mais s’il est un semi-échec, il est important de ne pas lui retirer en revanche ses bonnes qualités, ses bonnes intentions et la folie dont il fait preuve. Difficile à revoir sans s’interroger sur beaucoup de choses, ce premier long de Xavier Gens a tout de mérite le mérite d’avoir bousculer le moribond cinéma français, ouvrant la voie à des choses prometteuses. Peut-être un peu confus dans sa volonté d’allier discours et genre, Frontière(s) propose quelque chose, ce dont peu de productions en rance peut se targuer et fait au moins preuve de respect dans sa tentative de retranscrire cet esprit « redneck » cher au cinéma du genre américain. Les campagnes françaises sont peut-être moins bandantes que le fin fond du Texas de Massacre à la Tronçonneuse mais la crédibilité de l’intrigue reste également l’un des points quelque peu brinquebalants.
Bande-annonce :