Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Lay the Favorite
Père : Stephen Frears
Livret de famille : Bruce Willis (Dink), Rebecca Hall (Beth), Catherine Zeta-Jones (Tulip), Vince Vaughn (Rosie), Joshua Jackson (Jeremy), Laura Prepon (Holly), Frank Grillo (Frankie)…
Date de naissance : 2012
Majorité au : 08 août 2012 (en salles) / 12 décembre 2012 (DVD)
Nationalité : USA, Angleterre
Taille : 1h33
Poids : 20 millions $
Signes particuliers (+) : Un beau casting (et une jolie Rebecca Hall) pour un film léger.
Signes particuliers (-) : On se demande encore ce qu’est allé faire le talentueux Stephen Frears dans cette comédie sans saveur et assez méprisante envers ses personnages, pour certains insupportables. Lady Vegas est une parenthèse inutile tournée avec un je-m’en-foutisme tellement affiché qu’il en devient gênant.
STEPHEN FREARS A FLAMBÉ SON TALENT
LA CRITIQUE
Résumé : Aussi ravissante que généreuse, Beth Raymer comprend qu’elle a tout intérêt à abandonner son métier de strip-teaseuse et quitte donc la Floride pour devenir barmaid à Las Vegas. Alors qu’elle ne trouve pas de travail, elle fait la connaissance de Dink, parieur sportif professionnel qui, croyant déceler un vrai potentiel chez la pétillante Beth, lui offre un boulot : elle est censée prendre des paris en son nom et démarcher des clients par téléphone. Dink a eu le nez creux : la jeune femme se révèle particulièrement douée et ne tarde pas à devenir sa mascotte jusqu’à ce que la roue tourne…
Stephen Frears aurait-il un homonyme ? Probablement quelque part dans le monde mais en tout cas pas dans le milieu du cinéma à notre connaissance. C’est donc bel et bien le Stephen Frears auquel on pensait qui est crédité derrière ce Lady Vegas, ce talentueux cinéaste britannique auteur des Liaisons Dangereuses, auteur de The Queen, Tamara Drewe ou The Hi-Lo Country, celui-là même qui vient de récemment signer le magnifique Philomena… On se demande bien ce qui a pu motiver l’anglais à aller s’éprendre de cette comédie dramatique inspiré des mémoires de Beth Raymer, aujourd’hui journaliste et romancière, mais auparavant jeune et jolie bout de femme ayant mis les pieds dans le milieu illégal (ou presque) des parieurs sportifs. Devant la caméra, c’est la belle (et sexy) Rebecca Hall qui incarne à l’écran Beth Raymer, entourée de Bruce Willis et Vince Vaughn respectivement parieur gentil et bookmaker égoïste, mais aussi Catherine Zeta-Jones en dépressive liftée ou bien Joshua Jackson qui s’échappe deux secondes de la série Fringe…
Même si parfois certaines séquences diluent un peu de nuance dans l’ensemble le mettant ainsi en marge des niaiseries classiques américaines, Lady Vegas ne transpire pas vraiment le style du cinéma britannique et encore moins celui de Stephen Frears, mais plutôt la bonne détente décérébrée made in Hollywood. Et c’est parce qu’on se demande quelle mouche l’a piqué pour aller se farcir cette idiotie quand même sacrément « légère », que l’on en vient à se demander s’il s’agit bien là du même Stephen Frears que celui que l’on connaît. Lady Vegas est l’archétype même du film inoffensif, de la gentille comédie dramatique agréable comme un tour de manège vain et sans saveur sur un vieux carrousel miteux repeint avec des couleurs flashy pour avoir l’air moins pourri. La mise en scène mollassonne d’un Frears visiblement en mode « vacancier dilettante » n’arrange rien à l’affaire. Lady Vegas n’est pas une purge mais un film d’une telle inutilité qu’il nous laisse effaré, limite décontenancé, devant la stupidité de son récit pédalant dans le vide absolu.
Récemment, Players avec Justin Timberlake et Ben Affleck s’emparait grosso modo de thématiques à peu près similaires et dans tous les cas, prenait place dans un univers identique. Si le film de Brad Furman tourné en mode thriller haletant ne brillait pas par son niveau hautement intelligent, il avait au moins le mérite de faire preuve d’un minimum de considération envers son sujet. Comme forcé avec un pistolet sur la tempe, Stephen Frears emballe lui son Lady Vegas avec davantage d’humour rose bonbon mais surtout sans le moindre gramme d’âme injecté. Le cynisme et le mépris qu’il affiche à l’égard de son héroïne écervelée et énervante au possible, seront les gouttes d’eau qui viendront enterrer compassion et l’œuvre toute entière par la même occasion.
L’histoire de ce joli brin de jeune femme désireuse de s’élever, de changer de vie pour embrasser un destin qui la mènerait loin (comprendre : devenir riche, le plus facilement possible) est d’un caricatural épouvantable. Si Frears souhaitait montrer une image cruellement cynique et grinçante de l’américain moyen, c’est chose faite et avec une noirceur étonnante. Sauf que ce n’est pas dans cette direction que semble tirer le reste du film. Agaçante et ingénue, sa Beth aspire à une vie meilleure lui permettant de croquer sa part du rêve américain et sait qu’elle en les moyens (inconsciemment, c’est sûr que quand on est une bombasse sexy et aguicheuse, ça comble pas mal de carences intellectuelles). Mais toute frivole et sotte qu’elle est, elle ne fera que prendre les mauvaises décisions qui la conduiront dans une impasse dont fort heureusement sa sympathie la sortira. De cette histoire somme toute assez clichée dans l’esprit mais qui avait mine de rien un certain potentiel, Stephen Frears ne tire rien de substantiel et déroule sa comédie en roue libre sans recul critique, sans consistance, sans dévier de son ode superficielle à la gagne made in USA. Une sorte de parenthèse inintéressante et insipide pour Frears, doublé d’une étrange maladresse narrative globale, comme si le métrage mélangeait pataudement deux films en un. D’un côté, la bonne grosse débilité tartignole et de l’autre, une comédie cachant derrière son accoutrement de façade, un drame plus subtil qu’il n’en a l’air. Malheureusement, le premier l’emporte sur le second.
Lady Vegas est une virée déjà oubliée de notre cher Stephen Frears. On fera comme si l’on n’avait rien vu et comme si cette sucrerie sur-glucosée n’avait jamais existé. Ca rendra service non seulement au metteur en scène, mais également aux comédiens impliqués qui ne brillent franchement pas par leur jeu. Absent de la mise en scène, Frears devait être également absent de la direction d’acteur.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux