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MA SEMAINE AVEC MARILYN (critique)

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Carte d’identité :
Nom : My Week with Marilyn
Parents : Simon Curtis
Livret de famille : Michelle Williams, Eddie Redmayne, Kenneth Branagh, Julia Ormond, Judi Dench, Dougray Scott, Dominic Cooper, Emma Watson, Derek Jacobi, Pip Torrens, Geraldine Sommerville, Toby Jones…
Date de naissance : 2011
Nationalité : États-Unis, Angleterre
Taille/Poids : 1h42 – 10 millions $.

Signes particuliers (+) : Le charme, l’élégance, l’embrasement, la sensibilité, la détresse… Marilyn. Sur une semaine, c’est une peinture entière de la vie de la star qui défile. Troublant. Michelle Williams est exceptionnelle.

Signes particuliers (-) : Parfois léger, parfois facile.

 

POUPOUPIDOU… POU !

Résumé : Colin Clark, 23 ans, est passionné de cinéma et rêve de faire partie de ce milieu. Venant d’une famille très aisée où ces ambitions sont sous-considérées, il décide partir tenter sa chance à Londres. Débarquant chez Laurence Olivier Productions, il va faire preuve d’une telle abnégation, qu’il va décrocher à l’usure un poste de troisième assistant sur le prochain et premier film réalisé par l’immense acteur, Le Prince et la Danseuse avec Marilyn Monroe, star interplanétaire et fantasmes de tous hommes de l’époque. Quand Marilyn débarque en Angleterre, c’est une belle femme un peu perdue qui fait son apparition, manquant de confiance et fragilisée. Colin va côtoyer le mythe l’espace de quelques semaines mémorables…

Le réalisateur Simon Curtis, qui vient du milieu de la télévision où il a réalisé quantité de téléfilms, est un homme qui aime les risques. Car s’attaquer au mythe Marilyn Monroe dans une sorte de biopic très partielle et détournée, vue à travers le regard d’un jeune homme décrochant son premier job sur un plateau de cinéma, est quelque chose de hautement casse-gueule. D’abord car traiter du cinéma au cinéma n’est jamais chose facile. Mais surtout, car Curtis prend en effet de risque de s’aliéner toute la communauté des fans de l’immense star et actrice et le moindre de ses choix va être scruté, critiqué, analysé à la loupe. A commencer par son casting général (il doit trouver les comédiens justes pour incarnés les Laurence Olivier, les Vivien Leigh etc.) et plus précisément par le choix de l’actrice qui aura la lourde tâche de jouer Marilyn Monroe, icône entre toutes les icônes, star entre toutes les stars et probablement l’une des plus exceptionnelles actrices que le cinéma nous ait offert d’admirer. Son choix le portera vers la comédienne Michelle Williams, découvert il y a fort longtemps avec la série Dawson mais qui depuis a démontré de belles aptitudes dans la comédie, forte d’une carrière riche et hétéroclite. Mais tout aussi brillante actrice qu’elle soit, Michelle Williams n’est pas Marilyn Monroe et l’exploit de s’effacer derrière le mythe pour trouver le jeu juste lui rendant hommage est quasi-mission impossible. Mais la question est finalement autre. Quelle actrice aurait pu incarner une telle au mieux ? Et la réponse est aussi simple que cinglante. Personne. Personne ne peut être Marilyn au cinéma, personne ne pourra jamais rendre totalement justice à Marilyn au cinéma. Scarlett Johansson entend t-on ça et là ? La question est close, l’actrice  a refusé le rôle. Et quand bien même elle aurait accepté… cela n’aurait finalement pas changé grand chose. Dès lors, Michelle Williams ou une autre. Mieux vaut attendre le résultat. Ce qui est sûr, c’est que la pression sur les épaules de la jeune comédienne est forte, très forte.

Avec My Week with Marilyn, Simon Curtis a eu au moins la bonne idée de ne pas chercher à brosser un portrait complet du mythe, pas plus qu’il ne prétend retranscrire à l’écran l’entièreté de la star aux nombreuses facettes. En se basant sur le livre-mémoire et éponyme de Colin Clark, le cinéaste s’attarde sur un minuscule pan de la vie de la comédienne mais en ne se plaçant pas de son point de vue mais de celui de quelqu’un l’ayant côtoyé l’espace de quelques semaines de grâce hors du temps, l’espace du tournage d’un film. Le film n’est pas, par conséquent, un biopic au sens premier du terme en cela qu’il ne prétend pas raconter la vie de Marilyn. Il se veut, à l’instar du livre de Clark, un voile soulevé sur quelques semaines passées dans l’intimité de la star planétaire. Et curieusement, c’est ainsi que l’on va en apprendre bien plus sur la complexe Marilyn que toutes les biographies réunies. La sincérité de l’entreprise en est en effet décuplée. My Week With Marilyn n’exprime pas d’un point de vue omniscient le quotidien de la légende mais l’effleure plutôt, par le prisme d’un jeune homme de 23 ans, qui s’en est approché et rapprochée le temps de quelques semaines qui à elles seules, éclairent et montrent bien qui elle était, comment elle était, comment elle fonctionnait. Quelques semaines qui tendent à caresser l’intimité d’une Marilyn à fleur de peau, terrifiée, manquant cruellement de confiance en soi, en son talent, en sa gentillesse. Une Marilyn qui donnait le change par sa sensualité et sa beauté, comblant ainsi par le charme la crainte de ce que l »on pouvait réellement penser d’elle. Car ce que l’on pensait d’elle, Marilyn en avait peur tant ça lui tenait à cœur. Colin Clark par son livre a su dévoiler toute la tragédie humaine que fut la vie de Marilyn Monroe. Un être chétif, fragile, apeurée par le monde et la célébrité, apeurée par le regard des autres, elle qui pourtant paradoxalement était scrutée sans cesse par les caméras, les gens, les objectifs. Dans tous les cas, un être sensible, une star touchée en profondeur par tout un tas de démons intérieurs, par un passé et un présent trop lourd à porter, par une pression insupportable. Une star qui va trouver dans ce modeste troisième assistant, un jeune homme au regard fasciné et compatissant, ayant su voir au de-là de la star, la femme encore enfant car n’ayant pas eu le temps de grandir normalement, la femme blessée, meurtrie par la vie. Et Colin Clark de devenir un confident, un ami, un proche, une épaule, l’espace de seulement quelques semaines.

Si le bouquin évoque avec finesse et sensibilité la double Marilyn, celle des plateaux de cinéma où elle connaissait bien des difficultés à se libérer de ses angoisses et celle loin des caméras à la vie personnelle trouble, sans arrêt dans le doute et la peur de l’abandon, il n’était pas forcément gagné d’avance que Simon Curtis (dont c’est le premier film au cinéma) parvienne à en restituer toute la force et la puissance émotionnelle. Le cinéaste va pourtant tout faire pour s’immerger dans l’histoire. Il va s’entourer des meilleurs pour commencer (Kenneth Branagh en Laurence Olivier, Julia Ormond en Vivien Leigh, maîtresse de l’acteur anglais et le jeune Eddie Redmayne -vu dans le Black Death de Christopher Smith- pour interpréter Colin Clark, Judi Dench en Sybil Thorndike). Puis le réalisateur va partir pour Pinewood, les studios où fut tourné Le prince et la Danseuse, et où il tournera à son tour, au plus près de la légende. Et toujours dans un souci de proximité et d’immersion, le tournage investira même la demeure de Parkside House où Marilyn avait ses quartiers en 1957. De son coté, en immense fan de l’actrice/chanteuse, la comédienne Michelle Williams va passer de longues semaines à s’entraîner, à répéter, à travailler gestuelle et voix, façon de se mouvoir, de danser et de chanter avec pour objectif de ne faire qu’un, de faire corps avec son illustre personnage.

Et le miracle de se produire. Si l’on ne pouvait que craindre cette tentative avec méfiance et prudence, My Week With Marilyn réussit à être touché par la grâce. Tout d’abord, par la finesse de son traitement ne cherchant pas à sensationnaliser son sujet mais s’approchant avec pudeur de la star par l’entremise de cette relation atypique et incroyable. Colin Clark est le véritable héro du film. Ce n’est pas Marilyn. Et c’est le regard de Colin Clark qui va nous permettre prudemment et patiemment de nous rapprocher lentement et progressivement du mythe, de la légende, de Marilyn pour la découvrir sous son jour le plus intime qui soit. L’approche intimiste de Simon Curtis est la véritable force de son My Week With Marilyn. Le portrait qu’il en donne est d’une sensibilité si touchante que son film à cette faculté rare de nous tirer à chaque scène deux émotions contradictoires en même temps : un sourire ému de fascination devant le mythe restitué avec délicatesse et une larme mélancolique devant la nostalgie de ce même mythe et le drame d’une tragédie humaine inconsolée. Colin Clark nous permet d’effleurer la Marilyn sans défense, de s’approcher au plus près d’elle et de ce qu’elle était en profondeur, loin des objectifs et des caméras. Plus fort que toute biopic possiblement imaginable, My Week With Marilyn est un petit bijou de tendresse nous rappelant à quel point le cinéma tenait et a perdu sa plus grande artiste et à quel point le star system en était en partie responsable.

Bien évidemment, la performance de Michelle Williams était attendue au tournant. Et la comédienne relève le défi avec une élégance dépassant toutes les plus folles attentes. Jamais en avant, jamais dans l’exercice superflu de comédienne, l’actrice parvient à réussir l’exploit de bel et bien s’effacer derrière la légende, de se glisser dans sa peau discrètement et sans faire trop de bruit, de se faire oublier au profit de son personnage pour simplement lui prêter corps. Le travail aura porté ses fruits car Michelle Williams parvient à être une splendide Marilyn décontenançant les sceptiques (dont je faisais partie). Tout son jeu participe de la reconstitution visuelle d’une star perdue à jamais et qui revit sous nos yeux le temps d’une heure tente presque trop courtes. On retrouve la grâce, la légèreté, la tristesse et la mélancolie de Marilyn. On retrouve sa beauté, son sourire sublime, sa façon angélique de se mouvoir dans l’espace, de parler avec une discrétion et une douceur comme gênée. On retrouve cette Marilyn qui avançait à pas feutrée, non pas par ruse, mais par souci de délicatesse et par manque de confiance en soi. Mais on retrouve aussi cette sensualité exacerbée et presque indépendante de sa volonté. C’était la nature de Marilyn, c’était ce qu’elle dégageait, qu’elle le veuille ou pas. Et c’était aussi ce que beaucoup attendaient d’elle et elle jouait ce rôle, elle le remplissait plutôt, par peur de décevoir.


My Week With Marilyn est une réussite totale et absolue. Simon Curtis a réussi l’exploit. Michelle Williams a réussi l’exploit. On pourra donc presque être frustré à l’idée qu’elle n’ait pas remporté la petite statuette dorée qui aurait été amplement mérité et qui aurait du lui revenir de droit. Car loin d’une Meryl Streep qui faisait dans l’exercice de comédienne presque facile en regard de son talent, Michelle Williams fait bien plus car rien ne lui était acquis, du crédit à l’idée qu’elle puise faire aussi fort qu’elle n’a fait. De là où elle est, on espère que Marilyn aura pu apprécier et on la quitte une fois de plus avec une larme émue en pensant fort qu’elle nous manque encore aujourd’hui, cinquante après sa mort.

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