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NOUVELLE VAGUE de Richard Linklater : la critique du film

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Spectateurs

Nom : Nouvelle Vague
Père : Richard Linklater
Date de naissance : 08 octobre 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h46 / Poids : NC
Genre : Comédie, Biopic

Livret de Famille : Guillaume MarbeckZoey DeutchAubry Dullin

Signes particuliers : Savoureux.

Synopsis : Années 1970. Jeanne fugue de son foyer de haute montagne pour rejoindre la ville. Dans le studio où elle s’est réfugiée, la jeune fille tombe sous le charme de Cristina, l’énigmatique star du film La Reine des Neiges, son conte fétiche. Une troublante relation s’installe entre l’actrice et la jeune fille.

 

GODARD À PLEINS POUMONS

NOTRE AVIS SUR NOUVELLE VAGUE

Grand amoureux de la France, de sa culture et surtout de son cinéma, Richard Linklater s’est invité dans l’hexagone pour y réaliser un film français sur un sujet français, présenté en compétition officielle dans le plus grand festival de cinéma français. Comme son titre l’indique assez clairement, le père de Boyhood et de la trilogie des Before s’est intéressé à la « Nouvelle Vague », mouvement artistique qui a réinventé le cinéma dès la fin des années 50 et qui a toujours passionné le cinéaste. Plus précisément, c’est la réalisation d’A Bout de Souffle, le chef-d’œuvre de Jean-Luc Godard tourné en 1959, que raconte Linklater, compilant à l’écran les innombrables anecdotes qui ont fait la légende d’un tournage semblable à aucun autre. L’obsession de Godard pour casser les codes, les journées de tournage interrompues au bout de deux heures car « il n’avait plus d’inspiration », les conseils pris auprès de Melville, l’actrice Jean Seberg complètement perdue face aux méthodes lunaires du jeune metteur en scène, le débutant Belmondo qui en riait, les copains qui venaient jouer les comédiens de passage, les prises de vue à la sauvage avec le cadreur Raoul Coutard planqué dans une chariote, les comédiens sans scénario, l’improvisation au jour le jour… C’est tout ça que raconte Linklater dans un film ambitionnant de reconstituer le making of d’A Bout de Souffle à partir de photos iconiques et du journal de bord du tournage.

Entre la comédie, la chronique et le biopic partiel, Nouvelle Vague est une petite gourmandise qui nous invite à partager un petit moment d’histoire du cinéma, avec truculence et iconisme. Michel Hazanavicius s’était déjà penché sur la figure godardienne avec son excellent (et mésestimé) Le Redoutable, Richard Linklater lui emboîte le pas en signant un portrait complémentaire. Chez Hazanavicius, c’était le Godard des années 67-68, celui qui commençait à se radicaliser dans son art. Chez Linklater, c’est celui d’avant, celui de la fin des années 50 animé par ses rêves de bousculer le septième art dans le sillage de ses copains des Cahiers du Cinéma (Truffaut, Rohmer, Chabrol, Rivette) qui « ont déjà tous fait un film sauf lui ». Et le cinéma, il le bousculera bien avec ce chef-d’œuvre nommé À Bout de Souffle.

Nouvelle Vague égrène le quotidien des vingt jours rocambolesques du tournage du film avec un style espiègle, ludique et follement divertissant, chérissant l’excentricité d’un Godard génialement fou. Les rires et sourires sont aussi nombreux que les visages célèbres croisés tout au long de cette aventure (vedettes et personnalités connues que Linklater nomme à l’écran pour faciliter la compréhension du spectateur) et entre deux citations d’artistes lâchées par Godard, c’est toute une réflexion sur l’art du cinéma qui se dessine, comme si Nouvelle Vague était une analyse d’A Bout de Souffle en plus d’être le making of amusé d’une aventure artistique cocasse.

La promesse vantait « un film sur Godard tournant À Bout de Souffle raconté dans le style et l’esprit de Godard tournant À Bout de Souffle« . Pour le coup, ce sera le seul reproche que l’on fera à Linklater. Nouvelle Vague ne témoigne pas des témérités formelles de son personnage-sujet. Mis à part la reprise du format 4:3 Noir et Blanc et l’emprunt de la partition musicale culte de Martial Solal, le style du film demeure très classique et sage, loin des audaces d’A Bout de Souffle dont il ne reprend pas vraiment « ni le style ni l’esprit ». On sent que c’est une œuvre faite pour un grand public, surtout américain, une sorte « d’introduction à la Nouvelle Vague pour les débutants ». Néanmoins, le pari réussi de Linklater est d’arriver à régaler même les plus cinéphiles, qui pourtant connaissent la majorité des anecdotes racontées par cœur. Car les voir s’animer à l’écran reste délectable. Et une chose est sûre, tout cela donne follement envie de revoir À Bout de Souffle au plus vite !

Enfin, pour que l’on y croit à cette re-création, il fallait des acteurs auxquels on croit à l’écran. Un Godard qui fasse Godard, une Jean Seberg qui fasse Jean Seberg ou un Belmondo qui sonne Bébel. Sinon ça donne le prochain Moi qui t’aimais de Diane Kurys où, en dépit de leur talent respectif, l’on ne gobe jamais que Roschdy Zem est Yves Montand et que Marina Foïs est Simone Signoret. C’est l’autre très grande réussite du film. Grand dénicheur de talents et directeur d’acteurs qu’il est, Richard Linklater nous sort de son chapeau des comédiens inconnus ou presque (Zoey Deutch mise à part) qui incarnent à merveille tout son beau monde. Guillaume Marbeck est un Jean-Luc Godard formidable de mimétisme. Physiquement ressemblant, lunettes noires vissées sur le nez, cigarette au bec, avec sa diction si reconnaissable et sa personnalité sans concession, l’effet est saisissant et ne verse jamais dans la caricature ou la mauvaise imitation. Zoe Deutch (Juré n°2, The Boyfriend, Retour à Zombieland) est une formidable Jean Seberg, à tel point qu’on dirait la vraie ! Et le plus dur était pour Aubry Dullin qui incarne à merveille le pourtant inimitable Bébel, sans en faire trop ni pas assez.

 

Par Nicolas Rieux

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