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NOCTURNAL ANIMALS de Tom Ford : critique et test Blu-ray

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note 4 -5
Carte d’identité :
Nom : Nocturnal Animals
Père : Tom Ford
Date de naissance : 2016
Majorité : 09 mai 2017
Type : Sortie Blu-ray/DVD
Nationalité : USA
Taille : 1h57 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Amy Adams, Jake Gyllenhaal, Michael Shannon, Armie Hammer…

Signes particuliers : Après A Single Man, Tom Ford transforme l’essai. Son second long-métrage s’est vu décerner le Lion d’Argent au festival de Venise.

L’ÉLÉGANCE ET LA VIOLENCE SELON TOM FORD

LA CRITIQUE DE NOCTURNAL ANIMALS

Résumé : Susan, galeriste à Los Angeles mène une vie bien rangée à la limite de la monotonie, délaissée par son époux Hutton Morrow. Jusqu’au jour où, seule à la maison, elle reçoit un livre : Nocturnal Animals, signé par son ex mari Edward Sheffield, dont elle est sans nouvelles depuis des années. Edwards s’y met en scène dans le rôle de Tony Hastings, un père de famille en proie à l’horreur sur les routes du Texas, face à Ray Marcus, un chef de gang ultraviolent et le lieutenant Bobby Andes. Ce roman, d’une violence rare, va bouleverser Susan et réveiller bien des sentiments, que la jeune femme croyait enfouis à jamais… fissurant dangereusement la surface vernie de l’existence qu’elle s’est choisie.

Academy Award nominee Amy Adams stars as Susan Morrow in writer/director Tom Ford’s romantic thriller NOCTURNAL ANIMALS, a Focus Features release. Credit: Merrick Morton/Focus Features

Qui aurait pu penser il y a de cela vingt ans, que le styliste Tom Ford, roi de la mode et empereur de la maison Gucci, deviendrait l’un des cinéastes les plus prometteurs d’Amérique ? Sans doute personne. Et pourtant. A croire que quand le talent est inné, il peut allégrement traverser les domaines. En 2009, Tom Ford décide de faire fructifier son amour du septième art en signant son premier long-métrage. Avec A Single Man, porté par un époustouflant Colin Firth, le néo-réalisateur texan avait frappé un grand coup, s’attirant instantanément les louanges de la critique, du public et de la profession en général. Un coup de maître resté sans suite, jusqu’à aujourd’hui. Sept ans plus tard, Tom Ford revient avec un second long-métrage, le drame Nocturnal Animals, réunissant une distribution prestigieuse composée d’Amy Adams, Jake Gyllenhaal ou Michael Shannon, entourés d’Armie Hammer, Laura Linney, Michael Sheen, Isla Fisher et Aaron Taylor-Johnson.nocturnal-animals-2

On ne va pas se mentir, le cinéma de Tom Ford est particulier. C’est probablement ce qui explique qu’il divise autant. Mais c’est aussi probablement, ce qui le rend si intéressant. Comme on a coutume de le dire, un cinéma qui divise est d’ores et déjà, un cinéma digne d’intérêt car il a le mérite de provoquer des réactions passionnées. Et Tom Ford sait provoquer des réactions avec son style ultra-esthétisé, élégant et artistique, sensuel et plein d’aspérités, démonstratif et obsessionnel, pénétrant en profondeur l’âme humaine pour la sonder et faire ressurgir des émotions brutes. Fidèle à ce qu’il avait pu démontrer avec A Single Man, Tom Ford récidive dans une veine assez similaire avec Nocturnal Animals. Son nouvel effort est une fois de plus fiévreux, inconfortable, pessimiste, troublant. Le glamour ambiant de l’image y côtoie la violence radicale des sentiments, le strass et les paillettes ne sont que des miroirs déformants cachant une sourde mélancolie derrière du factice, la beauté formelle habite chaque seconde de cet intense drame/thriller sombre et éprouvant. Mais surtout, comme avec A Single Man, Tom Ford continue de balader son esprit autour de thématiques récurrentes en rapport avec la vie. Comment nous la traversons, ce qu’elle nous apporte et ce qu’elle nous enlève, comment nos erreurs nous marquent, comment nous composons avec l’illusoire, comment le passé, le présent et l’avenir nous portent et nous écorchent, à plus forte raison quand nos sentiments refoulés jaillissent des interstices…nocturnal-animals-3

On a eu coutume de dire au lendemain d’A Single Man, qu’un auteur était né. Il manquait seulement la confirmation pour pouvoir imposer cette idée. Avec Nocturnal Animals, Tom Ford prouve qu’il mérite bien sa place parmi les grands artistes du cinéma post-moderne. Evoluant sur deux histoires mises en parallèle, la réalité vécue par Amy Adams, artiste contemporaine guettée par la dépression et lasse du cynisme de son monde à la terrible vacuité, et la fiction à travers le roman qu’elle lit, récemment écrit par son ex-époux, et racontant l’histoire horrifiante d’une famille attaquée dans le désert par de violents rednecks texans, Nocturnal Animals nous happe et nous prend au piège comme un lapin pris entre les phares d’une voiture. Fort de cette habile construction faite d’aller-retours entre la réalité et la mise en image du roman lu, construction que Tom Ford maîtrise avec une virtuosité fabuleuse, Nocturnal Animals nous balade entre le drame et le survival, entre l’étouffement et l’horreur viscérale, et conserve une seule et même constante, celle d’être soutenu par une tension tirée au cordeau. Dans Nocturnal Animals, tout n’est angoisse permanente, dans l’action comme dans les silences ou les respirations. D’un côté, il y a la tension intimiste qui habite la vie de Susan (Amy Adams), au bord du précipice moral et mental, alors qu’elle se rend compte à quel point sa vie a pu lui échapper. Que reste t-il de la jeune femme plein de rêves et de désirs, méprisant les conventions ? Seulement le contre-produit de ce qu’elle voulait être. Elle s’était jurée de ne jamais ressembler à sa mère, archétype de la bourgeoisie républicaine pleine de préjugés. Sans s’en rendre et par résignation, elle a fini par épouser cette route tracée faute de courage, jusqu’à s’enfermer dans une existence illusoire et malheureuse, tapie dans sa maison aux allures de château de verre. De l’autre, il y a la tension extrême qui anime le roman de cet ex-grand amour qu’elle n’a plus revu depuis longtemps. Le désert, une famille, des voyous et une nuit d’horreur, suivi de mois d’enfer pour un père traumatisé (Jake Gyllenhaal). Une partie du film au découpage lorgnant vers le cinéma de genre. Malmenée, comme le spectateur, par cette lecture épouvantable, Susan va comprendre ses échecs, alors que le roman la renvoie à son inextricable solitude et à la vacuité de sa vie. Et au final, Nocturnal Animals d’imposer sa loi. Celle relative à la fragilité et à la violence de l’existence, celle où le confort et l’inconfort s’entremêlent sur fond de frustration et de regrets.

4100_D014_02030_R_CROP (l-r.) Academy Award nominees Jake Gyllenhaal and Michael Shannon star as Tony Hastings and Bobby Andes and Karl Glusman stars as Lou in writer/director Tom Ford’s romantic thriller NOCTURNAL ANIMALS, a Focus Features release. Credit: Merrick Morton/Focus Features

Sublime de bout en bout sur le plan formel, avec une photographie, une mise en scène et une partition musicale où tout cohabite dans une homogénéité sidérante, Nocturnal Animals est un nouveau tour de force de Tom Ford. Un film qui pourra paraître vain lui-même sur une première approche limitante, avant que la réflexion ne nous amène à percevoir toute sa richesse inouïe. nocturnal-animals-Blu-ray

LE BLU-RAY DE NOCTURNAL ANIMALS

Techniquement, les Blu-ray en provenance de chez Universal ont rarement de défauts notables. Nocturnal Animals n’échappe pas à la règle avec une image d’une grande précision, tant dans les tons sombres que dans les passages plus contrastés. La palette artistique de Tom Ford et de son directeur photo Seamus McGarvey est respectée à travers un beau transfert. Idem du côté de l’audio où le DTS-HD Master Audio 5.1 fait efficacement le travail avec une puissance sonore qui vise l’immersion, et qui y parvient sans sourcilier. En revanche, du côté des suppléments, il y a un peu plus à redire. On commence à connaître par coeur Universal, capable d’un déluge de bonus dans ses éditions de super-blockbusters, mais plus avare dès qu’il s’agit d’une sortie plus modeste. L’édition Blu-ray ne propose donc qu’un making of d’à peine dix minutes compilant quelques extraits d’interviews de Tom Ford et de son casting (Jake Gyllenhaal etc…). L’ensemble n’est pas trop axé promo mais reste assez léger alors qu’il y avait tant à dire sur le film. Cela étant dit, à la décharge d’Universal, l’édition américaine ne faisait guère mieux.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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