Sur OCS MAX du 11 avril au 20 juin en US+24. L’intégrale de la saison à la demande sur OCS Go dès diffusion du 1er épisode.
Synopsis : Christine Reade (Riley Keough) mène trois vies : celle d’une étudiante en seconde année de Droit, cheveux tirés, yeux cernés, vêtements simples. Celle d’une stagiaire chez Kirkland & Allen, un des plus gros cabinets d’avocats de Chicago, teint parfait, tailleurs stricts et visage fermé. Et celle d’une escort, une girlfriend à louer ; vêtements chics et sexy, regard séducteur et audace portée en bandoulière. Elle a été initiée à ce dernier mode de vie par son amie de l’université, Avery Suhr (Kate Lyn Sheil). Plus que des call-girls, ces jeunes filles sont, le temps d’un rendez-vous, les petites amies éphémères de riches clients. Cultivée, élégante et nourrissant un goût certain pour le risque, Christine devient rapidement accro à l’adrénaline et au pouvoir, aux rencontres et à l’argent devenu facile. Il lui sera de plus en plus difficile de concilier ces trois activités sans se brûler les ailes…
Si le procédé n’a rien de vraiment nouveau (souvenez-vous de MASH et autre Highlander), c’est néanmoins une véritable mode visiblement partie pour durer que celle de la déclinaison en séries télé, d’œuvres préalablement conçues pour le cinéma. Fargo, Evil Dead, Une Nuit en Enfer, Rosemary’s Baby, Scream, Le Transporteur… On ne les compte même plus, tous genres confondus, alors que sont également annoncés des L’Exorciste, Rambo, Liaison Fatale, Dirty Dancing ou Taken, pour ne citer qu’eux. En 2009, Steven Soderbergh signait Girlfriend Experience, drame sulfureux porté par l’ex porno-star Sasha Grey. Mais l’accueil critique et public fut malheureusement très timide. Sept ans plus tard, le cinéaste se replonge dans l’univers des escort girl avec une transposition de son film pour la télévision. Un peu comme Peter Berg et Friday Night Lights, Soderbergh semblait ne pas avoir pu tout dire, ne pas avoir pu faire le tour de son sujet, et voyait dans le médium télévisuel, un moyen de mieux le cerner sur la durée.
Développée pour la chaîne Starz par Amy Seimetz et Lodge Kerrigan, la série The Girlfriend Experience (13 épisodes de 22 minutes) s’abandonne donc dans les coulisses de la prostitution de luxe en suivant les pas de Christine Reade (Riley Keough qui reprend le rôle anciennement tenu par Sasha Grey), une jeune étudiante en droit qui jongle entre l’Université et son nouveau stage dans une grosse firme d’avocats spécialisée dans les brevets. Une double-vie à laquelle va venir s’en ajouter une troisième, lorsque Christine acceptera la proposition d’une amie, de la suivre dans son activité nocturne très lucrative. Devenant la sexy et sensuelle Chelsea, Christine va se frotter au monde de l’exploitation consciente de ses charmes sur de riches mâles fascinés par sa beauté.
Le sujet de The Girlfriend Experience pourrait rappeler quelques précédents comme les séries Secret Diary of a Call Girl ou Hung. Mais avec son ton sans humour et son univers à la fois classieux, froid et distancé, les premiers épisodes en appelleraient plutôt au Jeune et Jolie de François Ozon, et bien entendu au film éponyme de Soderbergh. Sur ses deux premiers épisodes, le show dramatique prend soin de nous accrocher à son univers sulfureux. Lancé sur un rythme assez lent et peu affable mais fascinant, The Girlfriend Experience prend son temps pour créer un lien assez étrange entre le spectateur et sa Christine, jeune, innocente, tour à tour effacée ou libérée, timide et pourtant capable d’être entreprenante. Christine semble avoir des tas de nuances, elle est une énigme mystérieuse dont on voudrait percer les secrets. D’autant que le spectateur, un peu comme ses premiers clients, n’a que peu de prises directes avec le personnage, comme s’il était volontairement tenu à distance de cet « objet de fantasme » intriguant, séduisant, presque hypnotisant. C’est en tout cas l’une des premières réussites de la série. Préserver l’ambiguïté et le caractère opaque de son héroïne pour mieux nous captiver et nous donner l’envie de l’approcher encore et toujours, tout en suivant intimement le début de son parcours dont on se demande où il va la conduire. Une ambivalence de ressenti et d’approche gérée avec une admirable subtilité. Certains éprouveront peut-être une forme de léger ennui, d’autres seront déconcertés par cette rhétorique inhabituelle et atypique par rapport aux codes classiques des TV show. Mais fort à parier que nombreux seront ceux qui seront conquis par cette immersion dans ce milieu obscur et sulfureux, que l’on approche et entrevoit pas à pas.
Dénué de toute forme de jugement ou de discours moralisateur, préférant dessiner une lointaine dialectique sociale à l’égard de son sujet ô combien tabou, The Girlfriend Experience est avant tout le portrait d’une jeune femme qui risque de perdre son identité au milieu de ses multiples vies aux visages très différents. Si Christine sait qui elle est, combien de temps cela va t-il vraiment durer ? C’est en somme l’une des questions fondamentales au centre de la série, et l’un des enjeux de fond que l’on suivra avec attention. Avec le troisième épisode, The Girlfriend Experience commence à doucement quitter la présentation de son univers dont on a saisi les entournures, et déploie ses premières tensions, ses premiers malaises, ses premières menaces. Un contact avec ce qui pourrait animer à l’avenir les enjeux d’ordre narratifs, après ceux plus psychologiques esquissés auparavant. Bref, on devient vite accroc à The Girlfriend Experience, à condition de lui laisser sa chance. Ce qui est sûr, c’est que ça en vaut vraiment la peine !