Nom : Irrational Man
Père : Woody Allen
Date de naissance : 2015
Majorité : 14 octobre 2015
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h36 / Poids : NC
Genre : Drame, Romance
Livret de famille : Joaquin Phoenix (Abe Lucas), Emma Stone (Jill), Parker Posey (Rita), Jamie Blackley (Roy)…
Signes particuliers : Le cru Woody Allen 2015 est arrivé. Il a du corps ? De la robe ? Un goût de tanin ou plutôt fruité ?
L’HOMME (ET SES PETITS TRACAS)
LA CRITIQUE
Résumé : Professeur de philosophie, Abe Lucas est un homme dévasté sur le plan affectif, qui a perdu toute joie de vivre. Il a le sentiment que quoi qu’il ait entrepris – militantisme politique ou enseignement – n’a servi à rien.Peu de temps après son arrivée dans l’université d’une petite ville, Abe entame deux liaisons. D’abord, avec Rita Richards, collègue en manque de compagnie qui compte sur lui pour lui faire oublier son mariage désastreux. Ensuite, avec Jill Pollard, sa meilleure étudiante, qui devient aussi sa meilleure amie. Si Jill est amoureuse de son petit copain Roy, elle trouve irrésistibles le tempérament torturé et fantasque d’Abe, comme son passé exotique. Et tandis que les troubles psychologiques de ce dernier s’intensifient, Jill est de plus en plus fascinée par lui. Mais quand elle commence à lui témoigner ses sentiments, il la rejette. C’est alors que le hasard le plus total bouscule le destin de nos personnages dès lors qu’Abe et Jill surprennent la conversation d’un étranger et s’y intéressent tout particulièrement. Après avoir pris une décision cruciale, Abe est de nouveau à même de jouir pleinement de la vie. Mais ce choix déclenche une série d’événements qui le marqueront, lui, Jill et Rita à tout jamais.L’INTRO :
Woody Allen, c’est comme le vin à Châteauneuf du Pape. Chaque année livre son cru, chaque année il est attendu, certains sont bons, d’autres moins, d’autres encore tutoient l’excellence ou sombrent dans l’échec. Des décennies que ça dure, alors pourquoi changer quoique ce soit à une institution qui marche comme sur des roulettes depuis si longtemps ? Depuis 5-6 ans, le cinéma de Woody Allen était un peu plus marqué par l’inconstance. Pour un très bon Whatever Works, un soporifique Vous Allez Rencontrer un Sombre Inconnu, pour de réussis Minuit à Paris et To Rome with Love, un Blue Jasmine qui a divisé et un Magic in the Moonlight plus paresseux que jamais. On espérait beaucoup de L’homme Irrationnel, le nouveau bébé du metteur en scène presque octogénaire, qui avait été présenté à Cannes en mai dernier. Sous l’œil de sa caméra, Woody Allen accueille pour la première fois le comédien Joaquin Phoenix, qu’il associe à une Emma Stone qui joue pour la deuxième fois consécutive sous la direction du réalisateur new-yorkais, après Magic in the Moonlight.L’AVIS :
Reconverti globe-trotteur depuis quelques années avec des films en Italie, à Paris, à Londres, dans le sud de la France, Woody Allen revient sur le sol natal, comme avec Blue Jasmine, et pose ses valises à Newport, dans le Rhode Island, pas bien de son New-York chéri. Il y suit un professeur de philosophie (sa grande passion), dépressif de son état, et incarné par Joaquin Phoenix. Face à lui, une jeune et belle étudiante (Emma Stone) qui tombe comme une mouche, de fascination face à ce personnage charismatique, cultivé, en souffrance. Concrètement, où se situe L’Homme Irrationnel dans le woody-mètre ? On dira quelque part au milieu. Si l’on a connu le réalisateur nettement plus inspiré par le passé, on l’aura aussi découvert capable de bien pire. Globalement correct et sympathique, L’Homme Irrationnel est un nouvel effort mineur, anecdotique diront certains, mais plaisant ou presque.Première information d’importance, L’Homme Irrationnel n’est pas une comédie. Si la verve habituelle typique de l’écriture d’Allen est bel et bien présente, elle n’est pas au service d’un humour jubilatoire dans l’art du maniement du dialogue étincelant. Plus proche du drame, lorgnant au passage vers la romance voire même plus subrepticement vers le thriller, L’Homme Irrationnel est un film plus sérieux. Comme Blue Jasmine il y a deux ans. Le réalisateur y parle de dépression sur un ton plus grave qu’à l’accoutumée, il y parle également de morale, il philosophe sur l’homme, l’existence, le monde, le Bien et le Mal, la philosophie elle-même (en s’amusant du jeu dangereux des idées faciles qui peuvent mener à des raccourcis périlleux) mais tout ça sans chercher à faire rire à tout prix, même si certains motifs ou la trame générale narrée pourront prêter à sourire, par leur incongruité. En revanche, « pas drôle » ne veut pas forcément dire « pas bon ». L’Homme Irrationnel est une balade amusée suivant un sentier bordé de noirceur, sur lequel se promènent deux personnages attachants. La légèreté y est incarnée par une délicieuse Emma Stone aux tenues affriolantes et aux grands yeux verts filmés avec un amour évident, le côté sombre par la carcasse abîmée de Joaquin Phoenix. Le choc de cette rencontre provoque un enchaînement de réflexions, parfois pertinentes, parfois masturbatoires, dont le but est de nous pousser à l’auto-réflexion, selon le principe même de la discussion philosophique où la confrontation des opinons et des idéaux pousse le débat à avancer.Quelque part entre la comédie romantique et le drame existentialiste sans jamais que l’un ou l’autre n’arrive à prendre le dessus sur l’autre, L’Homme Irrationnel est un film le séant posé entre deux chaises. Et c’est miraculeusement, que Woody Allen arrive à maintenir un certain équilibre dans sa tentative, tant est si bien que même si l’on ne s’emballe que bien rarement pour ce nouvel exercice jamais brillant, on en suit le récit avec quand même beaucoup plus de plaisir que Magic in the Moonlight et sa fainéantise patentée. Entre légèreté et ivresse, cynisme et esprit sarcastique, L’Homme Irrationnel ne marquera probablement pas mais son capital sympathie et la maîtrise de sa conduite en font un cru tout à fait acceptable.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux