La Mondo-Note :
Carte d’identité :
Nom : Ceux qui travaillent
Père : Antoine Russbach
Date de naissance : 2018
Majorité : 25 septembre 2019
Type : Sortie en salles
Nationalité : Suisse, Belgique
Taille : 1h42 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Olivier Gourmet, Adèle Bochatay, Louka Minnella…
Signes particuliers : Formidable Olivier Gourmet pour un film qui en dit long sur nos sociétés.
FACE AU CHÔMAGE
NOTRE AVIS SUR CEUX QUI TRAVAILLENT
Synopsis : Cadre supérieur dans une grande compagnie de fret maritime, Frank consacre sa vie au travail. Alors qu’il doit faire face à une situation de crise à bord d’un cargo, Frank, prend – seul et dans l’urgence – une décision qui lui coûte son poste. Profondément ébranlé, trahi par un système auquel il a tout donné, le voilà contraint de remettre toute sa vie en question.
Ceux qui travaillent s’inscrit dans un projet de trilogie imaginé par son auteur Antoine Russbach. Pourraient suivre Ceux qui combattent puis Ceux qui prient, et l’on obtiendrait alors une œuvre tripartite dessinant un état général de la société actuelle. Mais en attendant d’aller plus loin, le réalisateur suisse se concentre déjà sur cette première pierre, un drame sur le monde du travail moderne observé selon un prisme finalement assez rare dans le cinéma politisé, les cols blancs. Généralement, le cinéma social aime parler des travailleurs d’en bas, de ceux écrasés aux bases de la pyramide sociale. Avec Ceux qui travaillent, Russbach s’intéresse aux cadres. La démarche s’avère vite très intéressante et pertinente quand il se met à montrer que ceux qui croient avoir du pouvoir ne sont finalement pas mieux lotis que ceux sur lesquels ils l’exercent. Car leur pouvoir n’est qu’illusion et eux-mêmes sont à la merci du système qu’ils alimentent. Plus précisément, il est ici question de Frank, un cadre supérieur d’une société de fret maritime qui commet une erreur de jugement. Une décision qui va lui coûter son poste et ébranler ses certitudes les plus profondes.
Avec un vrai intérêt palpable pour la question, Antoine Russbach s’intéresse au monde du travail d’aujourd’hui et notamment à ce qu’a pu engendrer les valeurs fortes d’antan quand elles sont venues se fracasser contre les falaises du monde moderne. Il fut un temps pas si lointain (nos pères, nos grands-parents) où la culture du travail était généralement associée à la dignité, à la fierté, à un mode de pensée selon lequel « seul le travail paie » et qu’il « fallait travailler dur pour devenir quelqu’un ». Mais l’évolution du monde, le capitalisme, les mécanismes économiques et sociétaux, ont rendu le travail de plus en plus déshumanisé et déshumanisant, chronophage, aliénant et dévoreur. Pour Frank (Olivier Gourmet), outre le besoin de faire vivre sa famille, le travail est une question d’honneur, de respectabilité. Il est toujours le premier arrivé au bureau, le dernier à partir, il est corporate, sérieux, loyal, il prend les intérêts de sa boîte très à cœur comme si c’était la sienne. Par moment, il en viendrait presque à le croire, et nous avec. Mais son côté « employé modèle » ne l’empêchera pas d’être viré au premier faux pas. Une humiliation lourde de sens qui va l’amener à réaliser qu’à force d’avoir vécu pour son travail, qu’à force d’avoir cru en sa position sociale au point d’agir comme si la société qui l’emploie était sa vie, il s’est déconnecté de l’essentiel, des siens, de son existence, de lui-même.
A travers une chronique intimement liée à ce personnage-exemple érigé en symbole, Antoine Russbach ne dit jamais que le travail est mauvais, que le capitalisme est immonde, que le système fonce dans un mur et que les cols blancs sont l’ennemi de la justice sociale. Le cinéaste cherche juste à rappeler les limites qui devraient être entretenues pour éviter le déséquilibre, et surtout à souligner l’idée que l’on est tous plus ou moins responsable du système actuel, de son fonctionnement comme de ses dysfonctionnements. Antoine Russbach résume : « Les gens de droite qui disent que le monde va s’autoréguler me font tout aussi peur que les gens de gauche qui veulent sauver le monde en détruisant le système, mais qui ont un téléphone dans leur poche dont le contexte de fabrication est plus que contestable.”
Incarné par un excellent Olivier Gourmet, mâchoires serrées et comme toujours impeccable dans la peau de cet homme droit comme un i, sérieux, rigide, plus tourné vers les valeurs du travail que vers l’affect humain, Ceux qui Travaillent est une étude intéressante, quoique peut-être un peu trop didactique et théorique. Un film d’idées qui manque par moemnts d’un support narratif fort pour s’extraire de l’exposé. Car au final, d’un point de vue cinématographique, Ceux qui travaillent apparaît quelque peu évanescent, intéressant mais aussi riche dans le fond que peu consistant sur la forme. Reste un commentaire passionnant et non sans courage.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux
Film vraiment intéressant mais qui m a laissée perplexe quand le film s est fini, il manque quelque chose, j ai été très frustrée car il n y avait aucun fil conducteur pour cette fin
Un film analytique, synchrone à la confondante interprétation d’Olivier Gourmet, aussi magistral dans la force généreuse, la noyade du quotidien, que la pudeur et les façades du silence.
Toile sans voile ou se croisent la fumisterie et la droiture, ou se rejoignent les problèmes identitaires, sociétaux, la raison des choix et la chape de monstruosité des mécanismes ou nous sommes tenus prisonniers. C’est un zoom sur les rôles, joués et subis dans le sans pitié de l’entreprise et le mur qu’on dresse pour sa famille. Une réflexion sur les facettes de la course au destin, associée au prix vrai, sombre immoral et inhumain, du productivisme.