
Nom : Deux Pianos
Père : Arnaud Desplechin
Date de naissance : 15 octobre 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h55 / Poids : NC
Genre : Drame, Romance
Livret de Famille : François Civil, Nadia Tereszkiewicz, Charlotte Rampling, Hippolyte Girardot…
Signes particuliers : Pas un grand Desplechin.
Synopsis : Mathias Vogler rentre en France après un long exil. Sa mentore, Elena, souhaite qu’il donne une série de concerts au piano à ses côtés à l’Auditorium de Lyon. Mais dès son retour, une rencontre avec un enfant qui lui ressemble comme deux gouttes d’eau, son double, plonge Mathias dans une frénésie qui menace de le faire sombrer, et le mènera à Claude : son amour de jeunesse.

DES DESTINÉES MAL ACCORDÉES
NOTRE AVIS SUR DEUX PIANOS
Après un petit détour par le documentaire sur le cinéma (le brillant Spectateurs !), Arnaud Desplechin revient à la fiction avec Deux Pianos, un drame romanesque porté par François Civil et Nadia Tereszkiewicz. L’histoire de deux anciens amants qui se retrouvent des années après alors que leurs vies ont pris des chemins très différents. De vieux secrets enfouis remontent à la surface et viennent souffler le chaud et le froid sur leurs troublantes retrouvailles.

Deux Pianos est un film de scénario et d’interprètes. De scénario d’abord, avec un drame profondément tragico-mélancolique que Desplechin s’applique à saisir à vif, comme le sont ses personnages tous endoloris par la vie pour différentes raisons. Que ce soit ce pianiste dont on comprend vite qu’il a fui très loin (de sa région lyonnaise au Japon) pour échapper à une douleur intérieure dont les cicatrices ne sont pas encore refermées. Que ce soit cette jeune femme qui s’est mariée, qui a eu un enfant, mais dont on ressent l’équilibre fragile et le désanchantement. Ou que ce soit cette vieille pianiste mondialement célèbre -la mentor du premier cité- pour qui faire ses adieux à la scène rime avec petite mort. Grâce à des dialogues ciselés et des moments d’émotion très forts, chacun existe passionnément dans un drame traversé par un désespoir voulu déchirant où il est question de pianos/vies mal accordées. Tous sont les garants d’une histoire parlant de traumatisme, de douleur, d’acceptation, de réconciliation puis de guérison. A travers ce riche matériau narratif, Deux Pianos véhicule des thématiques universelles renvoyant à nos vies communes où l’on a tous vécu à un moment ou à un autre, un amour brisé, un regret perdu à jamais, un bonheur que l’on a laissé échapper ou pas su saisir.
Film d’interprètes ensuite, avec un François Civil qui hérite de l’un de ses rôles les plus profonds. L’acteur dont on ne se lasse pas de découvrir l’impressionnante palette de jeu (de Mon Inconnue à Bac Nord en passant par Five, Le Chant du Loup ou Les Trois Mousquetaires, Civil peut décidément tout jouer) offre cette fois-ci une partition puissamment intérieure qui pourrait bien le conduire aux César. Et pas impossible de l’y voir accompagné de Charlotte Rampling côté « Meilleur Second Rôle », qui brille de mille feux dans une scène de monologue conférant à son rôle une soudaine force saisissante. Seule Nadia Tereszkiewicz paraît plus en retrait avec une interprétation souvent forcée. Mais à sa décharge, on sent bien que la direction que lui a demandé Desplechin.

Malheureusement, et bien ironiquement aussi, Deux Pianos va souffrir de ses propres qualités. Et le film de rappeler un autre Desplechin pas si vieux, son Frère et Sœur avec Melvil Poupaud et Marion Cotillard. A nouveau, le cinéaste signe un long métrage que l’on sent écrit pour exprimer des choses profondes, mais trop écrit pour qu’un quelconque naturel s’en dégage. Meilleur exemple, un rebondissement narratif bien arrangeant à mi-parcours. Alors que les fils de l’histoire s’emboîtent, on peine à croire à son histoire trop cousue, trop interprétée aussi. On en viendrait presque à voir Desplechin réaliser un drame plutôt que le drame lui-même. La puissance de l’œuvre se dilue, l’émotion avec elle, et le film finit par étreindre une pointe d’ennui poli.
Par Nicolas Rieux
Bof me suis ennuyée