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DRACULA de Luc Besson : la critique du film

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Spectateurs

Nom : Dracula : a love tale
Père : Luc Besson
Date de naissance : 30 juillet 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 2h08 / Poids : 45 M$
Genre : Epouvante, Fantastique, Romance

Livret de Famille : Caleb Landry JonesChristoph WaltzZoe Bleu, Matilda de Angelis, Guillaume de Tonquédec…

Signes particuliers : Pas la catastrophe redoutée.

Synopsis : Au XVe siècle, le Prince Vladimir renie Dieu après la perte brutale et cruelle de son épouse. Il hérite alors d’une malédiction : la vie éternelle. Il devient Dracula. Condamné à errer à travers les siècles, il n’aura plus qu’un seul espoir : celui de retrouver son amour perdu.

 

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NOTRE AVIS SUR DRACULA

22 revoilà Besson ! Et avec un projet ambitieux en plus ! Il y a deux ans, DogMan passait pour un petit galop d’essai destiné à remettre le cinéaste en selle après des années de galères entre échecs XXL (la catastrophe Valérian puis le nullissime Anna qui lui ont coûté sa société EuropaCorp) et affaires judiciaires. Beaucoup s’en étaient arrêtés là, sauf ceux qui ont l’occasion de se pencher sur son modeste June and John filmé à l’iPhone pendant la pandémie et visible sur Ciné+ OCS. Avec Dracula, Luc Besson semble vouloir aller de l’avant. En adaptant le légendaire roman vampirique de Bram Stoker, le cinéaste se repositionne comme le monsieur Blockbuster made in France. Caleb Landry-Jones (qu’il retrouve après DogMan) y incarne le prince Vlad traqué par un Christoph Waltz en prêtre chasseur de vampires. 45 millions de budget, un film d’époque, pléthore de costumes et de décors, une action sur plusieurs pays dont la France, des stars internationales et une mythologie à la notoriété planétaire, Besson s’attaquait à du lourd. Pour un résultat craint avant même d’être montré. Comme souvent (malheureusement) avec le cinéaste le plus critiqué de l’hexagone. Parfois à tort, parfois à raison.
Une chose est sûre, il n’était pas évident de sortir une nouvelle adaptation de Dracula alors que Robert Eggers vient de traumatiser tout son monde il y a quelques mois à peine avec son impressionnant Nosferatu encore frais dans les mémoires. Deux films sur la figure du roi des vampires en moins d’un an, ça ne ferait pas un peu beaucoup ? L’avenir nous le dira (enfin le box office surtout). Mais fort heureusement pour lui, Luc Besson ne vient pas jouer dans la même cour que son homologue américain. D’abord car son Dracula est visuellement bien plus classique, loin du formalisme radical d’Eggers. Ensuite et surtout, car cette revisite bessonienne est une adaptation très libre, s’éloignant volontairement des représentations de l’histoire originelle passées afin de varier avec une tragédie romanesque plus en prise avec le grand film d’amour qu’avec la sempiternelle histoire horrifique que l’on connaît tous. C’est la nouveauté de cette version made in Besson. Le cinéaste se veut un grand romantique et son film ne suit pas tant le calvaire des victimes du « comte Dracul » mais plutôt l’émouvante quête désespérée d’un homme à qui Dieu a ôté son grand amour et refusé la mort, le condamnant à errer à travers les âges dans l’espoir de retrouver un jour celle qui lui a été arrachée.
Les signaux clignotaient rouge couleur alarme sur les pas de l’entreprise bessonienne, dont on craignait tant la crétinerie que la mièvre stupidité ou la pauvreté horrifique. Et si certains prédisaient l’enfer, force est d’admettre que ce Dracula n’est pas la catastrophe annoncée. Luc Besson signe un film qui a le mérite d’entreprendre quelque-chose, de se démarquer des adaptations précédentes grâce à une vision différente se réappropriant la mythologie. Ici, le héros n’est pas le soumis Jonathan Harker, sa douce et convoitée Mina ou l’opiniâtre Van Helsing, ni même Dracula au fond, mais le malheureux Prince Vlad. C’est son regard que Besson adopte, c’est son histoire qu’il imagine, celle d’un homme en colère contre Dieu qu’il accuse d’avoir anéanti sa passion en lui arrachant sa dulcinée. Mué par la rage du désespoir et maudit, il n’aura de cesse de tout faire pour retrouver sa réincarnation à travers les époques et les continents. A l’inverse de ses prédécesseurs, Besson nous sort un Dracula presque touchant, empathique, anti-héros d’une bouleversante tragédie romanesque consumé par sa passion balayée et ne vivant plus qu’avec sa mélancolie.

L’ennui, c’est que si le film offre un point de vue différent au service d’une histoire réécrite par touches, Dracula peine quand même à apporter quelque chose de vraiment significatif à l’illustration du mythe. Formellement, il n’y a pas le baroque vu chez Coppola, il n’y a pas le jusqu’au-boutisme de Eggers, il n’y a pas le charme sérialisé des films de la Hammer ou l’angoisse du chef-d’oeuvre de Murnau. Si Besson convoque quelques petits élans par-ci par-là, sa proposition paraît un peu désuète, un peu pauvre. Jamais foncièrement mauvaise, juste un peu fade et en mal d’ambitions. On peine à ressentir la flamboyance que le cinéaste a voulu injecter dans sa fresque malgré sa débauche d’intentions, on peine à s’accrocher aux subtilités de son histoire somme toute assez mécanique, on peine à s’emballer pour une proposition artistiquement impersonnelle… Finalement, Dracula ne cherche pas à transcender ce qu’il est, à savoir une aventure conventionnelle déroulée selon une trajectoire plate. Aucune réinvention, aucune modernité, aucun dialogue avec l’époque (malgré le symbole du prédateur et des femmes soumises à son pouvoir), Besson ne prend pas de risques (en même temps pouvait-il se le permettre sans être accusé de tout un tas de choses ?) et signe un film qui se contente d’être une distraction linéaire. Planté ainsi, le tableau paraît dur mais il est à souligner que malgré sa petitesse générale et ses nombreuses maladresses, le film fonctionne à son modeste niveau. Dracula n’a rien ni d’un navet ni d’un nanar. Une fois acceptée sa dimension sans génie, il en est presque sympathique à suivre. Le spectacle n’est pas désagréable, la facture correcte (décors, costumes, bande-son signée Danny Elfman, effets spéciaux) et alors qu’un romantisme absolu balaye l’horreur, on finit par se laisser happer par ce conte déchirant porté par un formidable Caleb Landry-Jones. C’est pas très moderne (surtout dans le propos -très sexiste- et l’époque qui l’accueille) mais ça se regarde dira t-on trivialement.

 

Par Nicolas Rieux

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