Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : The Martian
Père : Ridley Scott
Date de naissance : 2014
Majorité : 21 octobre 2015
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h24 / Poids : 108 M$
Genre : SF
Livret de famille : Matt Damon (Mark Watney), Jessica Chastain (Lewis), Kate Mara (Beth Johanssen), Michael Peña (Martinez), Chiwetel Ejiofor (Venkat Kapoor), Jeff Daniels (Sanders), Sean Bean (Mitch), Kristen Wiig (Annie), Donald Glover (Rich), Sebastian Stan (Chris), Aksel Hennie (Vogel), Benedict Wong (Bruce), Mackenzie Davis (Mindy)…
Signes particuliers : Ridley Scott vous invite à attacher votre ceinture, le décollage vers la planète Mars est imminent. le temps de voyage sera d’environ 2h30 et les conditions s’annoncent idéales. Bon voyage.
MISSION TO MARS
LA CRITIQUE
Résumé : Lors d’une expédition sur Mars, l’astronaute Mark Watney (Matt Damon) est laissé pour mort par ses coéquipiers, une tempête les ayant obligés à décoller en urgence. Mais Mark a survécu et il est désormais seul, sans moyen de repartir, sur une planète hostile. Il va devoir faire appel à son intelligence et son ingéniosité pour tenter de survivre et trouver un moyen de contacter la Terre. A 225 millions de kilomètres, la NASA et des scientifiques du monde entier travaillent sans relâche pour le sauver, pendant que ses coéquipiers tentent d’organiser une mission pour le récupérer au péril de leurs vies.L’INTRO :
Et si l’espace était enfin redevenu un endroit à la mode ? Pendant des années, on a eu coutume de dire que le cinéma de science-fiction, et plus particulièrement les grandes fresques spatiales, était un genre maudit, impliquant des coûts pharamineux pour bien trop souvent des déconvenues au box office. Le jeu n’en valait pas assez la chandelle pour un Hollywood à la frilosité légendaire quand la rentabilité n’est pas un minimum « assurée », et qui avait préféré mettre un mouchoir blanc sur le genre, s’y offrant de très/trop rares incursions. Dommage, car on peut se l’avouer entre nous, s’il y a bien un cinéma qui fait rêver par sa propension à nous emporter dans un lointain que l’on ne peut que contempler fascinés d’ici-bas, c’est bien le cinéma s’invitant dans l’immensité de l’espace et des galaxies étoilées. Mais voilà, le succès de Gravity, suivi de près par celui d’Interstellar, semble avoir changé la donne. Donc, et si l’espace était enfin redevenu un endroit à la mode ? Tiraillé entre une pelletée de projets à ne plus savoir lesquels réaliser et lesquels produire, Ridley Scott a finalement tranché et choisi en priorité The Martian, écrit par un Drew Goddard (Cloverfield, World War Z) qui devait en assumer la mise en scène à la base après avoir fait ses preuves sur La Cabane dans les Bois. Mais l’intérêt de sieur Ridley a tout changé. Le cinéaste, visiblement peu motivé par Prometheus 2 et Blade Runner 2, y a vu l’occasion de s’offrir une porte de sortie provisoire à ses deux impératifs contractuels. C’est armé d’un budget confortable sans être gargantuesque (108 M$) et entouré d’un casting impressionnant, réunissant Matt Damon, Jessica Chastain, Kate Mara, Michael Peña, Chiwetel Ejiofor, Jeff Daniels, Sean Bean, Kristen Wiig ou Donald Glover, que le cinéaste a donc pris la direction de la si mystérieuse planète rouge. Bien lui en a pris.L’AVIS :
Il est taré Ridley Scott. Plus il vieillit, et plus il est taré. On aurait aimé être une petite souris pour être là le jour où il a présenté sa vision du projet à la Fox. « Donc en gros, je vais raconter l’histoire d’un mec abandonné tout seul sur Mars, qui cultive des patates en se servant de sa propre merde comme engrais, et je vais filmer ça sur du ABBA et tout plein d’autres chansons disco. » Couillu. Couillu mais tellement bon. Car oui, au-delà de ce résumé amusément expéditif, Seul sur Mars est une réussite qui ferait presque oublier à elle-seule, les déceptions conjuguées de Prometheus et Exodus. Et paradoxalement, c’est alors qu’il signe l’un de ses films les plus grand public, que Ridley Scott pond l’un de ses travaux les plus audacieux ! Audacieux dans son concept, même si l’on est loin du jusqu’au-boutisme d’un All is Lost où Robert Redford était réellement le seul acteur à bord. Audacieux dans le genre ensuite, Seul sur Mars se payant l’originalité d’être plus une comédie dramatique qu’un film catastrophe de SF se prenant très au sérieux. Audacieux également, car débarrassé des sempiternels ressorts narratifs usités, pas de gentils ou de méchants, pas de romance nunuche polluante et autres clichés faciles vus et revus. Enfin, Audacieux dans ses délires stylistiques, avec une bande originale 100% pur disco (justifiée par l’histoire) qui détonne complètement d’avec l’univers en présence. Les audaces, elles sont nombreuses dans Seul sur Mars, véritable bonheur à vous réconcilier avec les blockbusters hollywoodiens, en plus de proposer enfin un film original sur la conquête spatiale, grâce à un ton qui sait jouer la carte de la différence.Aussi malin qu’intelligent et aussi drôle que prenant, Seul sur Mars est une aventure épique ahurissante, qui remplit haut la main ce que l’on était en droit d’en attendre : transporter, divertir et régaler. Un trio d’atouts gagnants qui vient s’ajouter à une longue liste de qualités parlant pour un film tout en efficacité pure. A commencer par une mise en scène fabuleuse, alignant les moments de bravoure et les plans fantastiques soumettant le spectateur à leur beauté fascinante. La planète Mars n’avait sans doute jamais été aussi bien flattée au cinéma. Et alors que Ridley Scott pose ses caméras, Matt Damon entre en piste, l’acteur livrant une véritable performance digne des grands soirs, jonglant avec les nombreuses cordes à son arc pour faire rire, émouvoir, créer l’empathie, pour faire vibrer ou angoisser. Seul sur Mars a beau être assez prévisible dans son ensemble, le scénario conjugué à la conduite virtuose de son auteur, réussit le pari de nous immerger pleinement dans l’aventure, réussit à nous transporter de notre fauteuil de cinéma vers cette lointaine planète à des millions de kilomètres, pour nous faire partager le malheur de cet astronaute abandonné qui va lutter pour sa survie en se mettant en mode McGyver de l’espace. On pourrait ensuite évoquer un montage alterné pertinent, apportant sans cesse rythme, dynamisme et hardiesse au récit, on pourrait s’attarder sur sa précision scientifique offrant une belle vitrine à la NASA, ou encore s’émerveiller de la légèreté de l’ensemble qui ne cherche pas à sur-intellectualiser le moindre détail façon Nolan et Interstellar. Simple, efficace, sans fioritures et ficelé avec un talent de conteur hors pair, Seul sur Mars préfère rester terre-à-terre et ne cherche jamais à s’imposer comme un pensum métaphysique malvenu, se contentant d’être ce qu’il est, et s’appliquant à faire son travail le plus correctement possible, en proposant une grande aventure à hauteur d’homme, sur fond d’héroïsme galvanisant.En somme, Seul sur Mars ou l’apothéose du blockbuster parfait ? On n’ira pas jusque-là, car peut-être un peu trop exalté et emporté par sa volonté de régaler, Ridley Scott se trahit parfois et subit le revers de la médaille de certaines des qualités évoquées. La tension, par exemple, qui ne parvient pas toujours à se mettre au diapason des intentions affichées à l’écran, subissant le contrecoup de l’esprit décalé qui entoure l’entreprise et sa haute dose d’humour injecté, dont l’effet à rebours sera d’amenuiser la peur que l’on aurait pu éprouver pour ce héros en danger. Amuser ou tétaniser, il fallait choisir et Ridley Scott a fait un choix. Celui de se tourner davantage vers le divertissement ludique et familial. On ne le lui reprochera pas, à condition d’être prévenu. Dès lors, on se contentera seulement de profiter de la plongée spatiale, de s’amuser en compagnie d’un show fastueux tout en péripéties trépidantes et en éclats de rire jouissifs (clins d’œil et références geek à la pelle, personnages hauts en couleur, dialogues savoureux, second degré impayable). Quelque part entre Mission to Mars, Apollo 13 et Enemy Mine, Seul sur Mars gagne vite ses galons de grande œuvre rappelant au fond, pourquoi on aime tant le cinéma. Parce qu’il nous fait vivre ce genre de moments intenses et uniques où l’on passe par toutes les émotions, tout en vivant quelque-chose de fort. Sur l’écran, la magie opère, la 3D tente de la renforcer (en dépit d’un peu de profondeur sur les somptueux paysages martiens, son utilité est discutable) et l’on s’emballe pour ce spectacle solide et généreux, qui nous s’adresse à nous directement via le journal de bord tenu face caméra par son héros Mark Witney. Un moyen d’entretenir une complicité qui nous portera de bout en bout avec régal !
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux