Carte d’identité :
Nom : Énorme
Mère : Sophie Letourneur
Date de naissance : 2019
Majorité : 02 septembre 2020
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h41 / Poids : NC
Genre : Comédie
Livret de famille : Marina Foïs, Jonathan Cohen, Jacqueline Kakou…
Signes particuliers : Une horreur.
UNE ÉNORME… SOUFFRANCE
NOTRE AVIS SUR ÉNORME
Synopsis : Ça lui prend d’un coup à 40 ans : Frédéric veut un bébé, Claire elle n’en a jamais voulu et ils étaient bien d’accord là-dessus. Il commet l’impardonnable et lui fait un enfant dans le dos. Claire se transforme en baleine et Frédéric devient gnangnan.
Pour qui s’y est déjà frotté, le cinéma de Sophie Letourneur n’est pas vraiment comme les autres, aussi singulier que déroutant. Avec Énorme, la réalisatrice le démontre une fois de plus en prenant à son compte le registre classique de la comédie mais pour en faire quelque chose de radicalement différent, très très loin des farces cabotines que le cinéma français a coutume de nous offrir à voir. Une bonne chose serait-on tenté de s’exclamer en se remémorant tous les navets qui inondent les salles chaque année ! Pas vraiment. S’inscrire en réaction contre quelque chose ne signifie pas forcément « faire bien », loin de là. Et autant dire que Énorme est aussi douloureux qu’un accouchement sans péridurale.
Porté par Marina Foïs et Jonathan Cohen, Énorme nous colle aux basques d’un couple… particulier. Elle est une pianiste de renom étrangement proche de l’autisme, lui est son manager/mari/régisseur de tout. Quand Frédéric se réveille à 40 balais avec l’envie d’avoir un enfant, il va en avoir un de Claire… en le lui faisant dans le dos. Car à l’image de son prénom, Claire a toujours été comme de l’eau de roche, elle n’en veut pas. Un petit traficotage de pilule plus tard et hop, le tour est joué. Le couple attend donc un bébé, au grand dam de la future maman qui se transforme en baleine, au grand bonheur en revanche du futur papa tellement sur-excité qu’il sombre dans un sur-excès de couvade.
On disait que le cinéma de Sophie Letourneur est déroutant, Énorme en fait un euphémisme. La cinéaste a toujours eu le goût des mises en scène brutes, au-delà du dépouillé, avec une approche viscéralement documentaire. Au point cette fois, de mettre ses comédiens face à des acteurs non-professionnels et de jouer vraiment les situations jusqu’au bout du bout. Au point de se passer aussi de lumière, d’évacuer les bases de la technique et du confort oculaire pour privilégier une esthétique faisant de l’authenticité, un crédo indiscutable harponné avec acharnement. L’ennui, c’est qu’il faut dès lors passer outre un premier écueil, une imagerie littéralement dégueulasse. Énorme est moche, presque vomitif. En soi, pourquoi pas (en faisant un gros effort), la différence n’ayant jamais tué personne, au contraire. Sauf que derrière, il faut se payer une seconde double-lame. La première, ce sont les personnages rebutants au possible. Si Sophie Letourneur avait voulu les rendre au-delà de l’antipathique, elle n’aurait pas pu s’y prendre autrement tant on ressent une irrésistible envie de les tarter de la première à la dernière minute. Encore un choix audacieux ? Peut-être, mais toujours est-il que le procédé étouffe tout attachement et tue le cordon qui nous relie à ces vecteurs de l’histoire. La dernière lame qui vient achever l’effort, c’est le rire. En prenant tout au second degré, de l’histoire aux protagonistes, Énorme espère être drôle. Erreur majeure d’appréciation, il ne l’est presque jamais. En dehors d’un petit bloc central où la couvade gagesque de Fred (Jonathan Cohen) atteint des sommets à la fois d’absurdité et d’hilarité, tout le reste du film est davantage abonné à la gêne plus qu’à la séduction.
Avec Énorme, Sophie Letourneur a multiplié les couches de paris osés comme pour faire dans la constante provocation jusqu’au-boutiste. Ambiance lunaire au lieu d’un esprit conventionnel, mauvais esprit impertinent au lieu d’une émotivité gnangnan, esthétique atroce au lieu de jolie façade léchée, personnages rebutants au lieu de fades véhicules pour l’empathie traditionnelle… Certes, on loue l’anticonformisme, quand il est sain et qu’il produit quelque chose d’intéressant. Mais dans cette satire périlleusement m’as-tu-vu, tout ne relève que d’une contre-productivité insupportable et d’une lourdeur assommante. Énorme est au final fort embarrassant pour tout le monde, maladroit dans ses intentions et complètement raté dans son exécution.
BANDE-ANNONCE :
Par Wilfried Rennahan
nul