Nom : Manos Sucias
Père : Josef Wladyka
Date de naissance : 2015
Majorité : 03 octobre 2015
Type : Sortie DVD
(Éditeur : M6 Vidéo)
Nationalité : Colombie, USA
Taille : 1h24 / Poids : NC
Genre : Drame, Thriller
Livret de famille : Christian James Advincula (Delio), Jarlin Martinez (Jacobo), Hadder Blandon, Manuel David Riascos…
Signes particuliers : Primé au festival de Tribeca, Manos Sucias est une énième preuve de la vitalité du cinéma sud-américain quand il décide d’embrasser des sujets de société.
L’ESPOIR D’UNE AUTRE VIE
LA CRITIQUE
Résumé : Depuis le port de Buenaventura, ville la plus dangereuse de Colombie, trois hommes embarquent pour un voyage sur les eaux sombres du Pacifique. Ils transportent une torpille contenant 100 kilos de cocaïne. Avec un filet de pêche pour seule couverture…L’INTRO :
A en croire son affiche ou les intentions déployées en filigrane par ses arguments de vente et son pitch, Manos Sucios ressemblerait à s’y méprendre à un énième La Citée de Dieu, version colombienne cette fois-ci. Il faut bien dire que les thématiques de la violence galopante, des gangs et du trafic de drogue sont une manne nourricière pour le cinéma sud-américains cherchant à exister à l’international en jouant sur la corde reliant le thriller âpre et la peinture du désespoir social régnant dans ces contrées prises en tenaille entre le besoin de survivre et l’attrait de la criminalité comme échappatoire. Réalisé par le jeune metteur en scène américain Josef Wladyka et coproduit par Spike Lee d’un côté, et des fonds privés émanant d’un appel sur Kickstarter de l’autre, Manos Sucios (littéralement Les Mains Sales) s’inscrit à la fois dans la mouvance de ce cinéma latino prenant les oripeaux du thriller social, tout en prenant ses distances d’avec ses œuvres les plus emblématiques telles que La Citée de Dieu, Sin Nombre et autres. Avec ses jeunes comédiens issus du théâtre et découvrant leur première expérience devant une caméra, Josef Wladyka tente de signer un film-choc levant le voile sur des dessous qu’il juge trop méconnus, ceux d’une réalité sociale où la jeunesse colombienne est contraint à embrasser des destinées tragiques pour s’en sortir.L’AVIS :
Récompensé à Tribeca (lauréat du prix du Meilleur Réalisateur), prestigieux festival sacrant généralement le meilleur du cinéma indépendant, Manos Sucias nous entraîne dans une aventure voulue haletante, sur les traces de deux jeunes frères convoyant une torpille chargée de cocaïne pour le compte d’un chef de cartel. Habile et fin dans son écriture comme dans sa mise en scène, Wladyka ne recherche pas l’action incessante d’une série B quelconque, mais s’efforce avec application et sincérité, de s’approcher au plus près de ses personnages authentiques et du cœur de son propos, celui de mettre en exergue, non sans une teinte de mélancolie, le triste constat d’une Colombie rurale empêtrée dans la pauvreté et la détresse, forçant les âmes malmenées à prendre part à un univers qu’elles aimeraient esquiver mais qui s’impose à eux, trop souvent comme la seule voie possible pour entrevoir une alternative à une vie de misère. En suivant le fil de sa course contre la montre et en fondant sa petite histoire dans un tout au regard plus général, Wladyka brosse surtout un portrait témoignant de l’emprise de la criminalité sur l’économie de tout un pays, témoignant du sort de ces désespérés à la recherche d’une vie meilleure, témoignant aussi de ces gens vivant tout proche d’un milieu horrifiant au point de ne plus être en mesure de l’occulter. Comme ces familles d’honnêtes pêcheurs accablées essayant de survivre, mais tentées de s’embarquer dans cette spirale offrant un sombre espoir. Leur rencontre avec nos deux jeunes anti-héros donnant lieu, au passage, à l’une des scènes les plus cruelle et déchirante du film.Interprété avec un naturel criant de vérité et mis en scène avec une maîtrise fascinante alliant rugosité dépourvue d’artifices et beauté esthétique folle, Manos Sucias est une œuvre modeste à la noblesse louable, sorte de néo-polar dramatique aiguisé et perdu entre deux rythmes, ses accès d’énergie conquérante nourrissant sa part de thriller tendu, ses ralentissements mettant l’action en pause se chargeant, quant à eux, de déployer son caractère social plein d’acuité. Et finalement, c’est davantage cette peinture sociale qui séduit dans un film manquant peut-être seulement, d’un peu plus de conviction dans la cristallisation de ladite tension recherchée. Le portrait accablant dressé par Wladyka de ces deux protagonistes touchants s’ancre fermement à sa toile de fond contemplée avec un mélange antinomique de noirceur et de poésie lumineuse. Et le spectateur d’observer le cheminement de ces deux âmes pleine de tendresse et d’humanité, que les fêlures personnelles et la dureté d’un quotidien, ont volontiers poussé vers une pente qui va égratigner leur candeur. Avec des enjeux plus forts, ou du moins narrativement plus nerveux, Manos Sucias aurait pu être un grand film, une œuvre forte et bouillonnante à la complétude formidable. En l’état, il demeure comme un bel effort chargé en amertume, sorte de balade triste conjuguant (pas toujours adroitement) les codes du genre dans lequel il se range, et l’ouverture d’un soupirail proposant un zoom social sur la plus pure banalité d’un quotidien tragique.
LE DVD
Pour soutenir un film déjà couverts de louanges, M6 Vidéo a eu la bonne idée de compléter cette édition DVD avec en suppléments, des interviews du cinéaste Josef Wladyka, réalisées aux festivals de Tribeca et de Zurich. L’occasion d’en apprendre un peu plus sur l’oeuvre qu’est Manos Sucias. Deux courts entretiens (7 et 8 minutes) qui ont l’avantage de ne pas se répéter et de fournir un lot intéressant d’informations sur le sujet de fond du film et les motivations du cinéaste, sur le choix d’avoir tourné en Colombie, sur les comédiens, les décors, ou encore le financement du métrage, entre levée de fonds sur Kickstarter et soutien bienfaiteur de Spike Lee. Un mot de la qualité technique de cette édition, qui affiche une image très propre (pour un DVD) rendant fièrement la beauté des paysages filmés. Côté « son », deux options s’offrent à vous, un 2.0 simple mais correct, et un Dolby 5.1 qui toutefois, manque un poil de finesse et d’égalisation de ses pistes.
LA BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux