Mondomètre
Carte d’identité :
Nom : American Pastoral
Père : Ewan McGregor
Date de naissance : 2016
Majorité : 09 mai 2017
Type : Sortie Blu-ray et DVD
Nationalité : USA
Taille : 2h06 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Ewan McGregor, Jennifer Connelly, Dakota Fanning, Molly Parker, Uzo Aduba…
Signes particuliers : Pour son premier long-métrage en tant que réalisateur, Ewan McGregor s’attaque à l’un des monuments de la littéraire américaine.
PREMIER FILM, PREMIÈRE RÉUSSITE POUR EWAN MCGREGOR
LA CRITIQUE DE AMERICAN PASTORAL
Résumé : A la fin des années soixante, Seymour Levov, un riche homme d’affaires, est marié à une très belle femme et mène une existence paisible… jusqu’au jour où sa fille devient une militante pacifiste contre la guerre du Vietnam et fait exploser un bureau de poste. American Pastoral, ou l’histoire d’un immense défi que s’est lancé l’acteur Ewan McGregor. Et encore, le terme relèverait presque du doux euphémisme. Pour ses grands débuts en tant que metteur en scène, le comédien a repris en main un projet qui traîne dans les cartons hollywoodiens depuis plus de dix ans, tenter l’adaptation cinématographique de l’un des plus célèbres romans de la littérature américaine moderne : Pastorale Américaine de Philip Roth, paru en 1997 et récompensé du prix Pulitzer. Bien des cinéastes expérimentés s’y sont essayés sans succès. Autant dire que le néophyte McGregor s’aventurait d’emblée sur un terrain à risque, d’autant qu’il cumule les postes, endossant également le premier rôle devant sa propre caméra, aux côtés de Dakota Fanning et Jennifer Connelly. Présenté en grandes pompes à Toronto, American Pastoral n’y a pas trouvé le succès escompté, victime de l’ombre omniprésente de son matériau d’origine, un roman trop respecté pour qu’une quelconque tentative d’adaptation puisse exister sans souffrir de la comparaison. Et pourtant, pour un premier effort en tant que cinéaste, Ewan McGregor n’a pas démérité, loin de là.American Pastoral est un roman aussi riche que fascinant, portrait d’un homme à qui le rêve américain tendait les bras, portrait d’une famille archétypale plongée dans les ténèbres, portrait d’une ancienne Amérique traditionnelle dont les valeurs se délitent, et portrait de deux générations qui se suivent, s’opposent et incarnent à elles-seules, la mutation d’un pays changeant radicalement de visage, d’ère et d’âme. A travers la famille Levov, c’est avant tout le portrait d’un pan essentiel de l’histoire américaine que proposait le roman de Philip Roth, celui d’une nation voyant l’embellie post-deuxième Guerre Mondiale et toutes les promesses qui l’accompagnaient, s’effriter sous les coups de butoirs d’une néo-modernité brisant petit à petit, l’insouciance illusoire d’une société trop confiante en l’avenir et aveuglée par la force de valeurs porteuses, en réalité bien trop fragiles. Si Ewan McGregor aura forcément dû tailler, condenser et faire des choix malheureusement mal passés auprès de la critique et des amoureux du roman, il n’empêche que la substance est toujours bel et bien présente au cœur de sa splendide fresque familiale, qui se drape d’une noble résonnance sociétale qui lui offre une contemporanéité évidente.
Sur son premier niveau d’appréhension, American Pastoral se reçoit tout d’abord comme une œuvre bouleversante, douloureuse fresque familiale plantée au cœur d’une période charnière de l’histoire américaine du XXème siècle. Une œuvre émouvante, qui touche en plein cœur. Mélancolique et poignant, American Pastoral est en fond, une histoire universelle, celle d’une famille pleine de rêves, d’espoirs et d’utopies, qui va être rattrapée par la réalité. Seymour « Swede » Levov (Ewan McGregor) incarnait l’essence de la réussite. Jeune premier aussi séduisant que taillé pour faire de grandes choses, il s’est lancé dans sa vie d’adulte avec des idéaux de la taille de l’Everest. La reprise de la florissante entreprise familiale, une femme magnifique, ancienne reine de beauté (Jennifer Connelly), une petite fille craquante derrière ses longs cheveux blonds, une belle maison, une belle voiture… La famille Levov est à elle-seule, le reflet d’une certaine Amérique d’antan vivant dans un rêve. Mais un rêve qui va se transformer en cauchemar. De là à voir dans le bégaiement précoce de sa jolie progéniture, le présage d’un destin funeste, il n’est qu’un pas que l’on peut allégrement franchir. Ce petit désagrément n’est qu’une toute petite banderille plantée dans le bonheur idyllique de cette famille trop belle pour être vraie. Devenue adolescente, la jeune et jolie Merry (Dakota Fanning) embrasse alors les idéaux révolutionnaires d’une nouvelle génération qui cherche à tourner le dos à ses aînés. Merry entre en réaction contre tout, contre sa famille, contre ce contexte de bonheur illusoire, contre le système. Basculant dans l’activisme alors que les tensions raciales, la guerre du Vietnam ou la corruption gouvernementale défraient la chronique, Merry va détruire ce bonheur apparent. Tournant le dos à sa famille trop propre sur elle, elle va la plonger dans le chaos, à l’image d’un pays en train de basculer. Et ce portrait de famille de se muer en portrait d’une Amérique, le microcosme familial devenant le reflet d’une société toute entière. Le rêve américain comme on l’entendait dans les années 60 n’existe plus, l’avenir s’assombrit, et le drame de la famille Levov va devenir le reflet du drame d’une Amérique fracturée qui n’arrive pas à gérer sa mutation radicale, du temps des illusions vers celui des désillusions.Derrière ce voyage chargé en émotions au cœur d’une famille surmontant des épreuves poignantes, Ewan McGregor interpelle le spectateur, le passé devenant un miroir du présent. L’action d’American Pastoral a beau se dérouler il y a plus d’un demi-siècle, on ne peut s’empêcher de songer à ce qu’est l’Amérique d’aujourd’hui, finalement pas si éloignée de celle d’hier. A l’heure où le pays traverse une nouvelle crise sociale profonde, à l’heure où il est en train de vivre des chamboulements quasi similaires, American Pastoral se reçoit comme une œuvre bien plus complexe qu’il n’y paraît, dans tous les cas puissante, passionnante, et superbe. Malgré une mise en scène très académique et impersonnelle, Ewan McGregor se contentant d’illustrer sans jamais vraiment s’affirmer comme un auteur, cette première réalisation brille par tout ce qu’elle parvient à raconter en deux heures de temps. American Pastoral est au final, un drame dévastateur qui prend à la gorge, un magnifique tableau de l’histoire américaine, et un film d’actualité dont la portée sur l’Amérique divisée résonne en filigrane. Le tout, incarné par des comédiens au sommet de leur art, à commencer par une Dakota Fanning livrant la meilleure prestation de sa jeune carrière. Magnifique à vous en tirer des larmes.
LE BLU-RAY D’AMERICAN PASTORAL
Image magnifique et pistes audio bien modelées, le Blu-ray d’American Pastoral ne souffre d’aucun défaut technique notable. Côté suppléments, l’accent a été essentiellement mis sur des entretiens. Pour commencer en douceur, environ 8 minutes avec Ewan McGregor et Dakota Fanning. L’acteur-réalisateur et sa comédienne évoquent brièvement les principales grandes lignes du film. On regrettera seulement de ne pas entendre Jennifer Connelly dans ce court module réalisée lors de leur venue à Paris pour la promotion du film. Suivent deux autres suppléments finalement assez proches l’un de l’autre dans l’absolu, au point qu’ils auraient tout à fait pu être réunis. Dans les deux cas, il s’agira d’un mélange d’interviews et de nombreuses images du tournage du film. Le premier est davantage centré sur le travail d’adaptation et fait intervenir Ewan McGregor, ses producteurs ou son scénariste. Le second censé évoquer le regard proposé par l’œuvre sur le rêve américain, est en réalité davantage orienté sur le travail de mise en scène et fait intervenir Ewan McGregor à nouveau, mais aussi son chef opérateur avec qui il a travaillé en très étroite collaboration, ou son chef décorateur. Tous analysent notamment l’évolution artistique du film, qui épouse les différentes époques traitées et les ressorts dramatiques qui les animent. Au total, plus de 45 minutes globalement très intéressantes à suivre.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux