Carte d’identité :
Nom : Alien Covenant
Père : Ridley Scott
Date de naissance : 2016
Majorité : 10 mai 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h02 / Poids : NC
Genre : Horreur
Livret de famille : Michael Fassbender, Katherine Waterston, Billy Crudup, Danny McBride, Demian Bichir, Carmen Ejogo, Jussie Smollett, Guy Pearce, James Franco, Callie Hernandez…
Signes particuliers : Efficace à défaut d’être réussi.
RIDLEY SCOTT, ASSOIFFÉ DE SANG
LA CRITIQUE DE ALIEN COVENANT
Résumé : Les membres d’équipage du vaisseau Covenant, à destination d’une planète située au fin fond de notre galaxie, découvrent ce qu’ils pensent être un paradis encore intouché. Il s’agit en fait d’un monde sombre et dangereux, cachant une menace terrible. Ils vont tout tenter pour s’échapper. Avec Covenant, Ridley Scott promettait un film plus effrayant et plus sanglant que jamais, un film dans la veine mais différent de Prometheus, un film évolutif, qui allait expliquer beaucoup de choses fondamentales dans la saga. Des promesses, des promesses… Restait maintenant à les concrétiser. Et pour le coup, le bientôt octogénaire Ridley a su y répondre, en partie. Si les différents trailer et bandes annonces s’en sont déjà allègrement chargés, en plus d’un Scott qui ne maîtrise plus vraiment l’art de la promo avec une tendance frénétique au spoiler fâcheux, il serait coupable d’en rajouter une couche en déflorant les nombreuses surprises que réservent ce bien étrange Covenant. Par souci de respect des fans, on se limitera à dire que ce nouvel opus de la saga propose autant de bonnes choses que de moins réussies, pour un résultat en demi-teinte, parfois intéressant, parfois frustrant, tour à tour haletant, fascinant ou déceptif.
Cherchant à raccorder les wagons entre « ses deux sagas » sororales en répondant à quelques questions fondamentales encore en suspens, Ridley Scott inscrit son nouveau chapitre à mi-chemin entre Prometheus et Alien premier du nom, piochant un peu chez les deux, pour le meilleur et pour le pire. Dans les faits, Covenant est bel et bien la suite de Prometheus, mais le terme « Alien » est réintroduit dès le titre. Un choix qui veut tout dire après la déception du film de 2012, où les créatures les plus attendues étaient absentes (ce qui était logique soit dit en passant). De Prometheus, Ridley Scott reprend l’esthétique, la volonté de quitter partiellement les espaces confinés, et surtout l’objectif d’expliquer les origines des créatures qui ont traumatisé des générations entières. D’Alien, il revient à une volonté de faire ressurgir la terreur, de jouer avec la peur sourde cachée dans le noir, avec le bestiaire monstrueux que l’on adore (xénomorphe, facehugger…), et il cherche à se ré-ancrer au registre de l’horreur pure, tapie dans un univers SF séduisant. Malheureusement pour lui et malgré d’indéniables qualités, Covenant rate partiellement son mariage. Splendeur visuelle envoûtante soulevant mille questions, Prometheus était bourré de défauts. Triste de voir Covenant les reproduire les uns après les autres, tout en essayant de renouer avec l’esprit du 1er Alien, dont il n’égalera jamais l’intensité, la puissance terrifiante ou le génie de la mise en scène. En dépit de ses efforts et de sa sincérité, Covenant n’est pas Le Huitième Passager, et s’en approche même que de très loin. Côté Prometheus, il réussit à lui emprunter ce qu’il avait de meilleur, mais se trimballe également toutes ses tares, incohérences, trous narratifs, lourdeurs, idées qui laissent dubitatif sur la logique de l’entière saga par rapport a ce qui a été raconté auparavant… Bref, une partie de ce qui avait défiguré le script de son prédécesseur se retrouve encore ici, ce qui a pour but de mettre du plomb dans l’aile d’un Covenant, qui ne peut désormais compter que sur son efficacité pour sauver les meubles, dans l’immédiat. Sur son efficacité, mais aussi sur les suites à venir, que Scott ne devra clairement pas louper. Car au terme de Covenant, on se pose encore beaucoup de questions pour essayer d’expliquer ce qui ne s’explique pas encore, au point que le film pourra offrir de belles migraines à ceux qui chercheront à emboîter les éléments afin de dégoter une cohérence globale à une saga qui, pour l’instant et en l’état, ne fonctionne que sur la base des hypothèses que l’on peut émettre, en espérant qu’elles se vérifieront ultérieurement dans les suites à venir. En espérant aussi que le créateur Scott ne se ratera pas et qu’il ne sombrera pas avec son entreprise, que la logique de raccordement entre sa nouvelle franchise prequel et la saga Alien d’origine, fonctionnera. Impossible d’en dire plus sans spoiler mais pour l’heure, les premières réponses et les nouvelles questions que soulèvent Covenant (et Prometheus avant lui) peuvent encore trouver une cohérence impeccable dans la chronologie et l’évolution de la saga entière, à la condition que IRidley Scott fasse les bons choix et prenne les bonnes directions à l’avenir.
Sur la forme, les idées fusent et malgré ses 80 balais, Ridley Scott arrive encore à puiser dans son éternel génie, de quoi nourrir de vrais moments de cinéma inspirés, lesquels côtoient quelques séquences loupées que l’on a envie de pardonner dans cet effort juché entre l’aimable réussite et le bancal agaçant. A l’arrivée, Covenant est une très belle partition pendant une heure, suivie d’un curieux ventre mou, dont on ne sait jamais vraiment s’il est trop long ou au contraire, pas assez développé (tiens, comme Prometheus), avant de nous amener vers un final traversé de quelques scènes fortes, lesquelles ponctuent un dernier acte qui, cela dit, fait dans la redite. Un peu comme tout Covenant en réalité, sorte de boucle sur la saga, comme si Scott réchauffait du déjà-vu -mais qui étrangement, fonctionne encore un peu- pour continuer à faire vivre sa saga, et la faire progresser davantage sur le fond que sur la forme. En cela, cette sensation de voir un film miroir d’Alien – Le Huitième Passager aurait dû être excitante, mais elle ne fait que creuser le sentiment de déception devant un sequel trop poussif et inconsistant pour convaincre.Parfois schizophrène, Covenant excite autant qu’il déçoit, avec un chapitre où l’on trouvera à boire et à manger. Quelques scènes ou éléments bâclés (à commencer par les ignobles créatures non dessinées par feu Giger) répondent à des passages visuellement sidérants de maestria, quelques ressorts faciles côtoient des séquences surprenantes, l’intelligence générale du scénario compense ses trous béants et/ou coupes de montage frustrantes (on perçoit en filigrane qu’une version longue viendra étoffer beaucoup de choses ici faiblardes), la profondeur de l’androïde incarné par Michael Fassbender fait un peu oublier la fadeur et l’inintérêt de tous les autres personnages, certaines explications attisent la curiosité mais zappent ce qui a pu être dit dans les précédents Alien... Sur la forme, l’aspect sanglant prend le pas sur la terreur anxiogène, tout comme le démonstratif mange l’efficacité ancestrale du hors-champ, alors que beaucoup de choses prévisibles viennent désamorcer l’impact du récit et la tension qui aurait pu naître dans son sillage. Au final, avec ses défauts et ses qualités, Covenant est un Ridley Scott, à savoir un film à la valeur d’emblée rehaussée par le talent de son auteur, toujours capable de fasciner, même avec des ratés. Et si dans l’absolu, Covenant est loin d’être la claque attendue, il reste un divertissement efficace qui surclasse bien des blockbusters actuels. Seul problème majeur, le temps et la réflexion ont tendance à ramener sur le devant de la mémoire, les innombrables erreurs et aberrations de ce nouvel effort, au point qu’elles grignotent ce que l’on avait pu y trouver de plus séduisant. De quoi renforcer la déception de tous les fans qui espéraient le Alien 5 de Neill Blomkamp, pas près de voir le jour puisque Ridley Scott envisage désormais, encore une ou deux suites à Covenant.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux
La soupe, malgré son velouté apparent, est froide et sans goût. Je pense que Ridley Scott ne se pose pas les bonnes questions, s’intéresse aux origines de son monstre (sous la pression de la vox populi peut-être) alors que, depuis le premier film, c’est bien la nature même de l’homme qui est en question. Et qui sont ces gens qu’il transporte à bord du Covenant ? des embryons parmi d’autres, des couples représentatifs mais sans identité véritable, du gibier pour monstre assoiffé de sang. Tant qu’il continuera à nier la force évocatrice de la série B qu’il mit en scène sur les idées d’un autre (qu’aurait pensé de tout ce salmigondis pseudo-métaphysique le regretté Dan O’Bannon ?), il perdra l’âme du véritable Alien. L’Alien, ce n’est pas l’autre, c’est une créature viscérale, c’est celle qu’on a à l’intérieur.