Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Kis Uykusu (Winter Sleep)
Père : Nuri Bilge Ceylan
Livret de famille : Haluk Bilginer (Aydin), Melisa Sözen (Niha), Demet Akbağ (Necla), Ayberk Pekcan (Hidayet), Serhat Mustafa Kılıç (Hamdi), Nejat İşler (Ismail)…
Date de naissance : 2014
Majorité : 6 août 2014 (en salles)
Nationalité : Turquie
Taille : 3h16
Poids : Budget 7 M$
Signes particuliers (+) : Une oeuvre lente mais fascinante, très long-métrage contemplatif d’une beauté formelle de l’épure renversante, à plus forte raison quand Ceylan se met à filmer sa magnifique Anatolie. Dense et passionnant à sa manière, Sommeil d’Hiver mêle drame introspectif, personnages forts et charismatiques disséqués dans leur plus total dénuement, et splendeur à couper le souffle.
Signes particuliers (-) : Le style de Nuri Bilge Ceylan a toujours été caractérisé par une extrême beauté de l’épure s’effaçant derrière des personnages magnifiquement abordés et filmés. Dommage alors de voir le cinéaste tomber dans la caricature de lui-même avec un film aussi extrême en terme de longueur et de lenteur pesante, étirant sans discernement chacune de ses scènes ou séquences au point de basculer dans le soporifique. Sans nul doute son moins abouti.
LA PALME D’OR DU DERNIER FESTI…zzzzzzzzzzzzzzzzz…
LA CRITIQUE
Résumé : Aydin, comédien à la retraite, tient un petit hôtel en Anatolie centrale avec sa jeune épouse Nihal, dont il s’est éloigné sentimentalement, et sa sœur Necla qui souffre encore de son récent divorce. En hiver, à mesure que la neige recouvre la steppe, l’hôtel devient leur refuge mais aussi le théâtre de leurs déchirements… L’INTRO :
Auteur fétiche de la Croisette appartenant à ses incontournables de la compétition que l’on retrouve en sélection à chaque nouvel effort, le turc Nuri Bilge Ceylan s’est vu décerné la Palme d’Or au dernier Festival de Cannes pour son septième long-métrage Sommeil d’Hiver, symbole au passage du centenaire du cinéma turc. Sa première en tout cas, après avoir écumé les autres distinctions de la prestigieuse manifestation azuréenne, du Prix de la Mise en Scène (Les Trois Singes) au Grand Prix (Uzak et Il Etait une Fois en Anatolie). Pour son nouveau très long-métrage (3h16 quand même), le réalisateur ne quitte pas l’Anatolie qu’il a magnifiquement filmée dans son précédent exercice et s’inspire d’un trio de nouvelles d’Anton Tchekhov dont il reprend le canevas pour les transposer dans la Turquie contemporaine. Un hôtel reculé en pleine steppe anatolienne et une poignée de personnages (un comédien fortuné à la retraite, sa sœur divorcée et sa jeune épouse) qui se déchirent au fur et à mesure que l’hiver recouvre ces paysages somptueux… Tel est l’argument de cette fresque dramatique incarnant dans toute sa splendeur le cinéma d’auteur total, pour ne pas dire enfermé dans un clivage d’avec le grand public.L’AVIS :
Beau et contemplatif, voilà comment résumer à froid Sommeil d’Hiver, le nouveau film d’un Nuri Bilge Ceylan qui lorgne amoureusement et « hommagément » vers le cinéma d’Ingmar Bergman. Des adjectifs applicables, il est vrai, à chacun de ses longs-métrages passés mais qui sont poussés à l’extrême cette fois-ci, dans une œuvre au croisement entre le drame introspectif et la quête rétro-existentialiste. D’une maîtrise et d’une beauté inouïe alors que le cinéaste témoigne une fois de plus de sa faculté à filmer les paysages turcs sans distorsion folklorique, Sommeil d’Hiver apparaît en revanche comme l’œuvre la plus exigeante de son auteur, la moins agréable et cinégénique, la plus bavarde et lancinante aussi. Assommoir verbeux pour les uns, fin parcours psychologique subtilement dense pour les autres, Sommeil d’Hiver nous met face à une pure Palme d’Or dans l’âme, œuvre qui divise entre partisans d’un cinéma d’auteur défiant les lois du simple plaisir fugace pour aller chercher quelque de plus mirifique, et détracteurs s’élevant contre cet auteurisme extrême frôlant l’auto-caricature du style, marqué par une lenteur paroxystique et des tunnels de dialogues à n’en plus finir.Dans tous les cas, difficile de se faire un avis précis et définitif face à Sommeil d’Hiver, film des sentiments contraires, à la fois fresque virtuose et déroutante, riche et pesante, belle comme un vaste paysage bouleversant et pourtant acétique à être souvent enfermée entre quatre murs… Mais surtout, tantôt séduisante et tantôt ennuyeuse à mourir. Si Nuri Bilge Ceylan nous emporte dans cette Anatolie qu’il sait filmer comme personne, si plastiquement son film est une merveille saisissante, aidée par une photo et une technique de l’épure sublime, si la richesse des échanges aiguisés dessine progressivement le portrait d’un homme qui découvre petit à petit comment ses proches le perçoivent, Sommeil d’Hiver ne peut s’éviter de pâtir de son absence de concision de montage, de son étirement souvent à outrance de ses scènes pourtant brillamment lancées mais qui finissement par s’abîmer dans une non-temporalité ternissant leur puissance et leur portée pour les rendre pénibles et épuisantes. Une fois n’est pas coutume, un auteur talentueux est récompensé de la prestigieuse Palme d’or pour son film le moins réussi. Car même si Sommeil d’Hiver est très abouti formellement, il n’apparaît pas un chef d’oeuvre à la hauteur des précédentes réalisations du cinéaste (on pense à Nuages de Mai, Uzak, Les Climats, Les Trois Singes ou encore Il était une Fois en Anatolie). Narrativement, Nuri Bilge Ceylan pèche et peine à nous embarquer comme il a su le faire par le passé avec cette œuvre naturaliste trop prosaïque pour parfaire la fascination qu’elle essaie de déployer. Cependant, impossible de détester Sommeil d’hiver, car une fois de plus, ressort cette aptitude de Ceylan à appréhender des personnages mis à nu, disséqués dans leurs plus profonds questionnements existentiels et filmés avec une justesse parfaite entre proximité et pudeur. Mais le cinéaste impose une barrière à son œuvre dense, celle d’une lenteur devenue presque un concept à elle-seule.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux
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