Citizen Kane est l’un des classiques hollywoodiens les plus célèbres de l’histoire du cinéma. Premier long-métrage d’Orson Welles, le film sorti en 1941 racontait l’histoire d’un journaliste qui enquêtait sur la vie de Charles Foster Kane, un milliardaire magnat de la presse, récemment trépassé. Il va découvrir au fil de ses investigations, le portrait d’un homme démesuré, égoïste, mégalomane. Pour écrire son scénario, Orson Welles s’était alors partiellement inspiré d’un de ses contemporains, William Randolph Hearst, alors nabab super-puissant à la tête d’un empire médiatique gigantesque comprenant près de 30 journaux influents couvrant tout le territoire (sans parler des magazines, stations de radio et studio de cinéma). Évidemment, Hearst ne va guère goûter à ce projet de film et va tout faire pour lui mettre des bâtons dans les roues. Pour commencer, il va se servir de ses nombreux médias pour pourrir la réputation de Welles, le dénonçant régulièrement comme un communiste de la pire espèce. A la sortie du film, il interdira toute critique et mention dans ses journaux, en plus de faire pression sur les exploitants pour qu’ils ne diffusent pas le film (une raison parfois invoquée pour expliquer son énorme échec financier).
Mais outre ces manœuvres d’envergure, William Randolph Hearst ira jusqu’à s’adonner aux vils stratagèmes les plus pervers, notamment un coup monté d’une bassesse particulièrement minable. Alors que le tournage du film venait de s’achever, Hearst va orchestrer un piège bien salaud, espérant ainsi ruiner définitivement la réputation d’Orson Welles. Ayant eu vent d’un voyage de l’artiste à New-York, Hearst va réussir à dégoter le nom de l’hôtel où le cinéaste va loger. Il fera engager une prostituée et un photographe qu’il fera pénétrer en douce dans la chambre prévue. L’idée était qu’ils s’y cachent. Quand Orson Welles serait dans ladite chambre, la jeune femme (nue) se jetterait dans ses bras pendant que le photographe capturerait la scène afin qu’elle soit relayée dans les médias pour provoquer un bon gros scandale aux mœurs. Heureusement, des langues un peu trop pendues parleront du « coup » en préparation. Orson Welles en aura vent par un ami policier et changera d’hôtel à la dernière minute, prenant soin tout de même de bien checker la chambre de son nouveau logement avant de s’y poser tranquillement. Le coup monté échouera au grand dam de William Randolph Hearst. Malheureusement pour Welles, toutes les autres ficelles tirées par le puissant patron feront des dégâts, couplées à la malchance d’un contexte peu idéal. Aux États-Unis, Citizen Kane ne marchera pas. En Europe, sa sortie fut empêchée par la Seconde Guerre Mondiale. La RKO, productrice, fut sauvée de la faillite par La Féline de Jacques Tourneur qui fut un immense succès.