Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Django Unchained
Père : Quentin Tarantino
Livret de famille : Jamie Foxx (Django), Christoph Waltz (Dr Shultz), Leonardo DiCaprio (Candie), Kerry Washington (Broomhilda), Samuel L. Jackson (Stephen), Walton Goggins (Billy), Denis Christopher (Moguy), James Remar (Speck), Lara Cayouette (Laura), Zoe Bell (Peg), Don Johnson (Spencer), Franco Nero (Amerigo), Bruce Dern, T. Savini, M. Parks, Q. Tarantino, Jonah Hill, M.C. Gainey, N. Bellamy, J. Russo…
Date de naissance : 2012
Nationalité : USA
Taille/Poids : 2h35 – 100 millions $
Signes particuliers (+) : Un kiff monstrueux d’un Tarantino qui a atteint la maturité. Et quel Christoph Waltz !
Signes particuliers (-) : C’est bête mais le premier tiers est tellement énorme qu’il ferait presque passer la suite pour en-dessous.
DJAGANTINO ENCHAÎNE UNCHAINED !
Résumé : Quelques années avant la guerre de Sécession, le Dr King Shultz, un chasseur de prime venu d’Allemagne, vient à la rencontre de marchands d’esclaves pour acquérir auprès d’eux un certain Django. Shultz veut coincer un gang dont la tête est mise à prix, les frères Brittle, et a besoin pour cela des services de ce Django qui les connaît physiquement pour avoir été sous leurs ordres dans une plantation et pourrait ainsi l’aider à les identifier. L’un comme l’autre vont s’y retrouver dans cette association improbable puisqu’elle aboutirait à la liberté pour Django, lui qui donnerait n’importe quoi pour retrouver sa femme dont il a été séparé…
Quentin Tarantino, le génial (ou pas, c’est selon) pape de la contre-culture pop ciné tendance nostalgico-revival, reprend du service pour son huitième long-métrage personnel et poursuit dans l’exploration des genres bis qui l’ont fait saliver étant gamin. Après la bloixploitation avec Jackie Brown, le cinéma asiatique qu’il avait revisité avec Kill Bill, les films Grindhouse auxquels il a rendu un vibrant hommage par Boulevard de la Mort puis sa vision délirante de la secondaire guerre mondiale avec Inglorious Basterds, c’était presque logique que son périple cinéphilique le conduise sur les sentiers des westerns spaghettis, lui qui n’a caché dans ses entretiens, son affection pour ce genre et son amour pour les Sergio Leone ou Corbucci, pour les Ennio Morricone et autre Franco Nero, tous ces acteurs d’un cinéma italien à son âge d’or et qui aura livré chefs d’œuvres et séries B délicieusement funs et authentiques.
Et parce qu’il avait un besoin compulsif et boulimique de faire exploser sa rage créatrice, sa verve cinéphilique, Tarantino se lance comme un gosse surexcité par son nouveau jouet. Il imagine, il prépare, il construit, il se remémore, les idées fusent, petites comme grandes, et rapidement mais en dans un processus de perpétuelle évolution, son The Angel, The Bad and The Wise devient Django Unchained, clin d’œil et référence directe à l’un des classiques de Sergio Corbucci sorti en 1966 avec Franco Nero en justicier de fortune impitoyable : Django. Côté casting, c’est la même. Avec Tarantino, ça part dans tous les sens. Des noms évoqués, certains plus considérés que d’autres, certains à deux doigts même de faire partie de l’aventure (comme Kevin Costner, Kurt Russell, Will Smith, Joseph Gordon-Levitt…) et finalement, Jamie Foxx sera Django Freeman, héros de la nouvelle folie tarantinesque. Autour de lui, une pléiade de stars, de guests, dans de gros, moyens, petits rôles, qu’importe, ils sont là, pour le plaisir de figurer dans le nouveau délire d’un homme de génie, d’un artiste cool, fun, respecté. Christoph Waltz, tout d’abord, que Tarantino avait quasi-révélé en officier SS dans Inglorious Basterds. Comptant sur son talent extraordinaire pour faire le reste, le cinéaste lui taille un rôle magnifique, aux petits oignons, un chasseur de prime d’origine allemande et qui manie le verbe comme un pur artiste du discours, ce qui d’une, ouvre la possibilité au metteur en scène de joncher Django Unchained de dialogues incroyables dont seul lui a le secret et de deux, de laisser exploser le génie de son comédien qui franchement, vole la vedette à tous ses partenaires une fois de plus. Puis, Leonardo DiCaprio, un admirateur et qui avait déjà failli tourner en nazi dans le précédent méfait du réalisateur. Un DiCaprio flamboyant un prince héritier d’une plantation tout en classe, en raffinement, en mégalomanie et en cruauté cachée et qui pour une fois n’est pas la tête d’affiche d’un film puisqu’il n’apparaît que très tardivement, comme la cerise sur un gâteau déjà bien chargé. Un sacré trio qui ne cache pourtant l’étendue impressionnante des seconds rôles. Kerry Washington en belle dame à sauver, Samuel L. Jackson en domestique ignoble, Denis Christopher en avocat lèche-botte, Walton Goggins et James Remar en hommes de main, Lara Cayouette en beauté tapissée du sud américain, Don Johnson qui revit dans un rôle mémorable mais aussi Bruce Dern, Michael Parks, Tarantino lui-même et des guests à la pelle comme Franco Nero himself, pour l’hommage, Jonah Hill qui vient faire un coucou rapide et hilarant ou encore Lee Horsley (le fameux Matt Houston), Tom Savini, Zoe Bell (qui jouait déjà dans Death Proof)… Et la liste pourrait être encore plus longue !
BO explosive, violence graphique, échanges dialogués savoureux, personnages hauts en couleurs, ambiance cool, clins d’œil et références à la pelle, pas de doute, on est bien dans l’univers de Tarantino et pourtant, il y a quelque chose qui a changé cette fois-ci. Quoi donc ? Les afficionados du bonhomme ne seront pas déboussolés. Tout est comme ils aiment, tout est bien là dans un film hallucinant et franchement énorme et explosif. Mais pour une fois, les autres pourraient bien être surpris de se voir prendre au jeu… d’aimer aussi ! Car il semblerait bien que l’ami Tarantino ait atteint une forme de maturité qui tranche avec son caractère d’éternel adolescent. Une maturité cinématographique qui fait de Django Unchained, un film exceptionnel. On a connu le Tarantino jeune, qui a en voulait, qui nous avait pondu deux classiques, Reservoir Dogs et Pulp Fiction. Puis on a connu un Tarantino talentueux mixeur d’influences qu’il ingérait pour composer des films ultra-référencés. Mais cette fois, Tarantino ne compose pas à partir de ses références et influences, il créait. Le cinéaste ne réalise pas, il met en scène, il ne recrache pas, il assimile et fait son propre film, certes sous influences, certes sous références, mais celles-ci ne sont pas mis en avant, jamais appuyées comme argument essentiel, elles sont tapies dans l’ombre d’un film dirigé de main de maître par un véritable artiste qui brille de mille feux.
Tarantino rend une nouvelle fois un hommage amoureux à un cinéma mais également au cinéma. Le plaisir s’associe à une culture et le public profite de près de 2h45 qu’il ne voit pas passer même si le premier tiers (et quelle séquence d’intro !) est tellement bon qu’il ferait presque passer le reste pour en-dessous. Comme à son habitude, le cinéaste cinévore en fait des caisses, dans l’exaltation des sentiments, dans la violence, dans la caractérisation des personnages, dans le traitement de son récit et son évolution, dans ses tics habituels (la BO passe avec aisance de la musique latine au hip hop au son lourd, du presque rap à la pop), dans ses climax hallucinants mais cette fois-ci, il se dégage une sensation d’homogénéité cohérente qui devrait enfin faire taire les détracteurs qui pourraient bien être amenés à voir enfin le talent d’un homme qui fait revivre des pans du cinéma tout en les conjuguant avec son style. Rageur, dément, exaltant, Django Unchained passe de la violence extrême à la romance belle et se veut une transposition d’une légende féérique allemande narrée par le personnage de Christoph Waltz ou comment réunir les éléments fondamentaux du grand cinéma, drame, vengeance, romance, amitié…
Toujours dans le virtuose, toujours dans le spectacle, toujours dans la trouvaille stylistique, dans l’inspiration folle mais avec un petit plus qui fait qu’elle est canalisée, Tarantino signe une fois de plus un film dont on aurait envie de dire que c’est son meilleur à ce jour. Comme on l’a si souvent dit avant. Mais peut-être que cette fois-ci, c’est chose vraie. Avec en son sein, un féroce discours sur le passé esclavagiste des Etats-Unis (une première chez Tarantino qui veut dire des choses au-delà du spectacle fun), Django Unchained est de l’art, du grand art maîtrisé plein d’humour, de fantaisie, beau à en crever, débordant de sincérité, réjouissant. On s’éclate, on rit, on sursaute devant l’hyperviolence stylisée qui en appelle autant à Peckinpah qu’à Leone, on est secoué mais surtout, on est sous le charme qui opère rappelant la magie que tient en lui, l’immense cinéma qui nous emporte si loin e notre fauteuil. Histoire simple mais film que l’on pourra disséquer encore et encore à l’avenir, Django Unchained est un monument, un énième de Tarantino et même si certains irréductibles y verront peut-être encore un caprice de stars qui a trop bouffé de chips dans son vidéo-club en matant des VHS, qu’importe. L’héroïsme démesuré mystique tout en grandiloquence qui émane de ce western croisant la route du revenge movie, est un mistral gagnant qui jusque là, semble fédérer tout le monde derrière la bannière Tarantino style. Quelle baffe gigantesque implacable et paroxystique dopée par une énergie insatiable, de son introduction de génie à sa conclusion à la démesure d’un metteur en scène parti sur orbite. Tarantino est toujours aussi grand voire plus !
Bande-annonce :
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