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LUCKY de John Carroll Lynch : la critique du film

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Carte d’identité :
Nom : Lucky
Père : John Carroll Lynch
Date de naissance : 2017
Majorité : 13 décembre 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h28 / Poids : NC
Genre
: Drame

Livret de famille : Harry Dean Stanton, David Lynch, Tom Skerritt, Ed Begley Jr, Ron Livingston, Beth Grant, Barry Shabaka Henley…

Signes particuliers : Harry Dean Stanton nous a quittés sur une ultime performance digne d’un roi.

LE CHEF D’ŒUVRE DE L’ANNÉE

LA CRITIQUE DE LUCKY

Résumé : Lucky est un vieux cow-boy solitaire. Il fume, fait des mots croisés et déambule dans une petite ville perdue au milieu du désert. Il passe ses journées à refaire le monde avec les habitants du coin. Il se rebelle contre tout et surtout contre le temps qui passe. Ses 90 ans passés l’entrainent dans une véritable quête spirituelle et poétique. 

C’est l’histoire d’un homme seul qui vieillit. Tout simplement. Dans sa petite bourgade du fin fond du Nouveau Mexique, Lucky connaît tout le monde et tout le monde connaît Lucky. Il a ses habitudes, ses rituels quotidiens, il fait comme parti des vieux meubles de cette société qui a changé et archivé les vieux cow-boys comme lui, dans la case « souvenir d’un autre temps ». Trimballant sa carcasse décharnée, Lucky va et vient, entre sa maison, le diner où il prend son café du matin et le bar où il boit son bloody mary du soir, le tout au rythme de ses deux ou trois paquets de clopes par jour. Lucky se lève en musique, avale son grand verre de lait, fait son yoga, file prendre son café en faisant ses mots croisés, rentre voir ses jeux télévisés, repart tailler le bout de gras et refaire le monde avec ses camarades… Et ainsi va la vie, ou ce qu’il reste à tirer avant le tombé de rideau…

Premier long-métrage de l’acteur John Carroll Lynch, Lucky est la chronique simple d’un homme simple, un nonagénaire qui voit l’heure de la mort approcher, et qui affronte une sorte de crise existentielle tardive et haute en couleur. La caméra de Lynch suit les pas de cet authentique « personnage » drôle et bougon, que l’on prend vite en affection au gré de son immuable routine. Mieux, on s’y attache tellement, que l’on pourrait passer encore une heure ou deux en sa compagnie sans trouver à redire. Comme le définit son auteur, Lucky est comme une invitation à faire connaissance avec quelqu’un. L’espace d’une petite heure et demi, on va intimement entrer dans la vie de ce touchant personnage, qui nous promène dans son quotidien. C’est tout ? Pas d’aventures rocambolesques, pas de course-poursuite en bagnole, d’histoire d’amour ou de rencontre étonnante ? Non, c’est tout. Lucky n’est qu’une simple promenade aux côtés d’un être qui incarne à lui seul, une certaine Amérique en voie de disparition. Et malgré cette absence de péripéties dramatiques, Lucky est un bijou, un petit chef-d’œuvre poignant d’humanité, une œuvre délicate à la fois drôle, tendre, émouvante, et doucement mélancolique.

Véritable déclaration d’amour à l’acteur que fut Harry Dean Stanton, prodigieux comédien au charisme si singulier dont la vie a inspiré de nombreux éléments du scénario, Lucky est un film solaire, de ces grands « petits films » au charme fou, qui coulent comme des torrents d’émotions. À l’écran, Harry Dean Stanton s’offre un dernier baroud d’honneur et livre une prestation cinq étoiles qui pourrait laisser imaginer un Oscar du Meilleur Acteur à titre posthume. Ce serait si mérité tant feu l’acteur de Paris Texas magnétise l’écran avec une authenticité bouleversante et une drôlerie délicieuse. D’autant que le film résonne encore plus de véracité depuis la triste nouvelle de son récent décès. Dans Lucky, Stanton incarne un vieil homme aux portes de la mort, prêt à affronter le saut dans le néant qu’il sait imminent. Harry Dean Stanton nous a quittés le 15 septembre dernier. Autant dire que le récit de Lucky était hautement symbolique pour lui. Il n’est de fait, pas très étonnant de le voir livrer une telle composition puissante de force et de conviction, comme s’il venait de toucher du doigt l’absolue perfection de son art de comédien. La profondeur du film et l’intelligence de ce qu’il met habilement en scène (avec une grande inventivité visuelle qui désamorce le statisme de l’histoire en lui apportant une vivacité folle) achèvent de transcender ce Lucky, formidable épopée intimiste et crépusculaire et formidable portrait d’homme élaboré avec sincérité, chaleur et candeur. L’un des meilleurs films de l’année.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

 

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