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GLADIATOR II de Ridley Scott : la critique du film

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Spectateurs

Nom : Gladiator II
Père : Ridley Scott
Date de naissance : 13 novembre 2024
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 2h30 / Poids : 250 M$
Genre : Péplum, Action

Livret de Famille : Paul Mescal, Pedro Pascal, Connie Nielsen, Denzel Washington, Joseph Quinn, Derek Jacobi…

Signes particuliers : Une très bonne suite même si…

Synopsis : Des années après avoir assisté à la mort de Maximus tué par son oncle Commode, Lucius est forcé d’entrer dans le Colisée lorsque son pays est conquis par les empereurs tyranniques qui gouvernent désormais Rome. La rage au cœur et l’avenir de l’Empire en jeu, Lucius doit se tourner vers son passé pour trouver la force et l’honneur de rendre la gloire de Rome à son peuple.

 

AU NOM DU PÈRE

NOTRE AVIS SUR GLADIATOR II

C’était l’un des projets les plus improbables de ces dernières années. Depuis sa sortie il y a 24 ans, Ridley Scott rêvait d’offrir une suite à son film culte Gladiator. Déjà, pourquoi ? Et puis ensuite, comment ? Sachant que toute l’essence et la valeur du film reposaient sur la vengeance sacrificielle de son héros mythique… Pas de panique, Sir Ridley a bien des idées foireuses pour faire des suites en pagaille à ses Alien, pourquoi n’en trouverait-il pas une pour faire fructifier l’héritage de son gladiateur iconique ? Bonne (ou mauvaise) nouvelle, il l’a trouvée et comme prévu, elle est… foireuse. Gladiator, c’est comme les trains, « attention, un fils peut en cacher un autre ». On ne spoilera rien puisque c’est dans la bande-annonce ou dans les synopsis du film, mais l’idée « brillante » est donc de faire de Lucius, le jeune fils de Lucilla (Connie Nielsen) dans le premier film, son fiston caché avec Maximus (Russell Crowe). Heu… Sérieusement ? Si Ridley Scott avait voulu saloper toute la noblesse du héros emblématique qu’était Maximus, il ne s’y serait pas pris autrement. Dans Gladiator, Maximus Decimus Meridius était un homme droit, courageux et intègre, dont la trajectoire était nourrie uniquement par la vengeance après le lâche assassinat de tout ce qu’il avait de plus précieux au monde, sa femme et son fils. Et voilà qu’on nous sort 24 ans plus tard, qu’en fait le gars trompait sa femme et qu’il avait un second fils avec une autre… L’affront fait au personnage et à tout ce qu’il incarnait est aussi gonflé que des quenelles de brochet cuites au four. D’autant plus agaçant qu’en passant outre cette trahison incohérente, Gladiator 2 est un bon film.

Au lendemain de la mort de Maximus, Lucius, son fils illégitime (sic encore), a été éloigné de Rome en urgence par sa mère alors qu’il n’était qu’un enfant. Deux décennies plus tard, il a refait sa vie loin de l’empire et a oublié ce lointain passé. Malheureusement son destin va le ramener sur les traces de son paternel et entre désir de vengeance et intrigues politiques, Lucius va devoir à son tour fouler le sol ensanglanté du Colisée pour se battre.

C’est toujours rageant quand un détail laisse une trace très visible sur un bel objet, comme une rayure sur le capot d’une Porsche flambante neuve. C’est le cas avec ce valeureux Gladiator II contraint de courir avec une épine dans le pied. Le film requiert de digérer cette idée narrative profondément stupide laissant une cicatrice indélébile à la base d’un scénario pourtant passionnant. Et difficile de l’oublier car l’histoire n’a de cesse de la marteler en boucle avec une pénible insistance. Mais en s’y accommodant de gré ou de force, c’est une histoire fantastique que nous conte Ridley Scott derrière. Surprise (assez) inattendue, Gladiator II est le meilleur film du metteur en scène depuis Le Dernier Duel. Du haut de ses 86 ans, Scott rappelle qui il est et ce que son nom symbolise comme grands souvenirs de cinéma. Il livre un sacré spectacle sur la forme doublé d’une passionnante plongée dans les arcanes de la politique romaine. Deux films cohabitent -plutôt bien d’ailleurs- dans Gladiator II. D’un côté, une épopée épique riche en scènes d’action époustouflantes, de l’autre un thriller politique tortueux fait de manigances, de complots et de conspirations dans l’ombre. Le tout incarné dans des personnages fascinants. Ironiquement, c’est le héros Lucius (Paul Mescal) qui est le moins intéressant. Sa trajectoire semble n’être constamment qu’au service des meilleures sous-intrigues du film qui entourent la sienne, et surtout le personnage n’a au fond qu’une seule fonction, assurer la partie « Gladiator » du film. Dans son sillage, Ridley Scott reproduit son classique original en multipliant les plans similaires, les passages obligés, les références et les clins d’œil symboliques. Avec lui, Scott justifie surtout le titre de son nouveau film et le besoin de servir au spectateur ce qu’il pense venir voir : un nouveau Gladiator. Mais en revanche, à partir de ce personnage qui peine à vraiment déchaîner les passions à la hauteur de feu Maximus, Ridley Scott signe un deuxième film caché dans l’ombre du premier, un film qui aurait pu s’appeler « Rome » par exemple. Et ce film est exceptionnel.

Chose rare, ce sont finalement les personnages secondaires qui font le sel de ce Gladiator II, qui le rendent palpitant et passionnant. Du personnage profondément déchirant incarné par Pedro Pascal à celui profondément trouble sublimé par Denzel Washington, Gladiator II est un régal de thriller politique. Tandis que Lucius/Mescal se charge du côté spectaculaire, ces protagonistes de l’ombre s’occupent de densifier l’histoire, de la complexifier en profondeur pour permettre au film de dépasser sa fonction de « simple suite » et de devenir autre chose qu’une bête resucée de Gladiator premier du nom. Surtout Macrinus, négociant en gladiateurs, incarné par un Denzel Washington qui écrase littéralement la concurrence autour de lui en s’imposant comme la véritable attraction du film. L’acteur livre une performance mémorable, bien aidé par un personnage écrit aux petits oignons, à la fois captivant, attachant, fourbe, malin et terrifiant.

Pour une fois, Ridley Scott ne nous pond pas un demi-film boursouflé ou charcuté, qui aura besoin d’un Director’s Cut pour se rattraper. Bien bâti sur 2h30 idéalement calibrées, Gladiator II n’est ni trop long ni trop court, parfaitement équilibré dans son mariage des genres, et il fonctionne à plein régime, boosté par une mise en scène avec ses moments virtuose qui assurent avec souffle et panache. De quoi pardonner les menus détails qui font parfois hurler ou qui amusent. Comme des erreurs historiques aussi inutiles que grotesques (des gamins qui jouent au foot, un sénateur qui lit le journal en terrasse de café, des requins dans la Colisée façon Gladiator vs Sharknado) ou des effets spéciaux parfois a la limite du décent (c’est quoi ces singes mutants ridicules qu’affrontent Lucius et des compagnons d’infortune ?!). Mais en passant sur ça aussi, Gladiator II est un blockbuster plus que solide, un vrai spectacle intense et palpitant qui prolonge la mythologie de Gladiator en essayant de l’iconiser encore un peu plus à coup de références-hommages soutenues par le thème culte de Zimmer.

 

 

Par Nicolas Rieux

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