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COUP DE CHAUD de Raphaël Jacoulot : la critique du film

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note 3.5 -5
Carte d’identité :
Nom : Coup de chaud
Père : Raphaël Jacoulot
Date de naissance : 2015
Majorité : 27 janvier 2016
Type : Sortie DVD
(Éditeur : TF1 Vidéo)
Nationalité : Angleterre
Taille : 1h42 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de famille : Jean-Pierre Darroussin (Daniel), Grégory Gadebois (Rodolphe), Karim Leklou (Josef), Carole Franck (Diane), Isabelle Sadoyan (Odette), Serra Yılmaz (Josiane)…

Signes particuliers : Un huis-clos à ciel ouvert dans un village où les petits drames vont tourner à la tragédie.

QUAND LA CHALEUR FAIT TOURNER LES TÊTES…

LA CRITIQUE

Résumé : Au cœur d’un été caniculaire, dans un petit village à la tranquillité apparente, le quotidien des habitants est perturbé par Josef Bousou. Fils de ferrailleurs, semeur de troubles, il est désigné par les villageois comme étant la source principale de tous leurs maux jusqu’au jour où il est retrouvé sans vie dans la cour de la maison familiale.8100522-12630117L’INTRO :

Un petit village replié sur lui-même, un marginal peu apprécié de tous les habitants et cristallisant tous leurs maux, une cabale qui se met en place… De prime abord, Coup de Chaud, nouveau long-métrage du réalisateur Raphaël Jacoulot, n’aura pas été sans nous rappeler un chef-d’œuvre méconnu du cinéma allemand, le tétanisant Scènes de Chasse en Bavière de Peter Fleischmann, drame horrifiant et d’une noirceur terrible, tourné en 1969. Empruntant la structure et les codes du polar, voire du polar social à la Chabrol, Jacoulot nous plonge dans une petite bourgade du sud, où la canicule va accompagner l’échauffement des esprits aiguisés par les tensions. Sorti en salles au cœur de l’été en plein mois d’août, Coup de Chaud n’a pas pu bénéficier d’une exposition optimale. Regrettable pour ce drame poignant, emmené par d’époustouflants Jean-Pierre Darroussin, Grégory Gadebois ou Carole Frank, tous derrière un Karim Leklou habité par son rôle.270885L’AVIS :

Dans un décor aux allures de huis clos à ciel ouvert avec ce petit village quasi-autarcique où tout le monde se connaît, Raphaël Jacoulot monte en épingle un fait divers tragique en jouant savamment à la fois avec son univers, ses protagonistes et un amoncellement de petites situations menant lentement vers une tragédie sociale illustrant les maux de notre société actuelle malade. L’idée dominante de Coup de Chaud pour le cinéaste, c’était d’étudier à quel point la société aime à se chercher des coupables désignés comme responsables de tous les travers, avec cette envie de les sacrifier pour le bien de la communauté en espérant trouver dans cet acte solidaire, les bases d’une paix « entre gens biens » débarrassés d’une gangrène néfaste autour de laquelle s’articulerait tous les problèmes. Ici, Josef Bousou (Karim Leklou) est le poison de ce village indéfini. Celui par qui le scandale arrive en permanence. Josef est légèrement retardé, totalement marginal, et ses frasques à répétition ne font qu’accroître des tensions sourdes déjà palpables dans un microcosme en apparence soudé mais aux nombreuses dissensions structurelles pour peu de lire entre les lignes. Rapidement, Josef devient un bouc-émissaire. Est-il réellement celui qui trouble la tranquillité générale ? Oui, non, peut-être. Car Jacoulot ne se fait jamais juge, jamais partisan, préférant rester en retrait, laisser son drame théâtral se dérouler de lui-même, le spectateur placé au centre du « bal » ayant les clés en main pour se faire son idée.coup de chaud filmCoup de Chaud, c’est l’histoire d’un drame évoluant sans cesse sur un équilibre précaire, toujours prêt à basculer, mais tenant fièrement sur son mince filin, grâce à la maîtrise d’écriture et de mise en scène de son auteur. Prenant son temps pour déployer son univers, pour lui apporter authenticité et crédibilité, Raphaël Jacoulot joue sans arrêt entre les lignes de sa partition, maniant avec intelligence les ressorts qui vont cimenter son drame tout entier. La chaleur se fait de plus en plus pesante, l’inquiétude monte, la menace plane sur ces agriculteurs en difficulté. Petit à petit, les esprits s’échauffent et il ne manque plus qu’un déclencheur pour que tout s’embrase. On aura vite compris la symbolique de cette canicule qui frappe cette contrée. Ce déclencheur, c’est cette exception à la norme, cet « idiot du village » comme on les appelle communément dans le sud (non sans méchanceté), dont la différence perturbe l’équilibre général. Pour autant, Jacoulot ne force pas le trait et n’en fait pas un ange sacrifié sur l’autel de la ligue d’une populace lamentablement véhémente. La particularité de Coup de Chaud, c’est sa façon bien particulière d’utiliser les mécanismes de l’empathie, lui faisant sans cesse changer de camp. Avec une sagacité extrême, le cinéaste nous attache autant à son antihéros qu’à ses opposants, il nous permet de pouvoir nous placer autant dans son optiques que dans celles des autres, refusant un regard unique, refusant un affrontement manichéen qui n’aurait sans doute pas conférer à son film, la même portée et dimension sociale. Pas le même discours non plus. Pour Jacoulot, il n’est pas question de mettre en scène la cruauté d’une communauté, mais plus de s’intéresser à la façon dont elle peut, ou ne peut pas, gérer l’altérité.coup_de_chaud_filmFable contemporaine inquiétante et humainement redoutable de pertinence, Coup de Chaud est un portrait à la fois glaçant et complexe, à la portée hautement symbolique sur la vie communautaire dans nos sociétés où les difficultés du quotidien mènent aux crispations diverses et aux affrontements témoignant d’un mal de vivre ensemble. Sur fond d’étude de la noirceur de la nature humaine sans jamais que des conclusions expéditives ne soient avancées, Coup de Chaud passe pas loin de l’exercice brillant grâce à son habile navigation entre le drame et le polar et à son refus des clichés faciles. Dommage que l’extrême exigence du récit ne soit pas maîtrisée jusqu’au bout, et que le film se prenne un peu les pieds dans le tapis au détour d’un épilogue décevant.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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