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THE NEON DEMON de Nicolas Winding Refn : la critique du film

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note 2 -5
Carte d’identité :
Nom : The Neon Demon
Père : Nicolas Winding Refn
Date de naissance : 2016
Majorité : 08 juin 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : Danemark
Taille : 1h57 / Poids : NC
Genre : Drame, Thriller, Horreur

Livret de famille : Elle Fanning, Jena Malone, Bella Heathcote, Abbey Lee, Christina Hendricks, Keanu Reeves, Karl Glusman, Desmond Harrington…

Signes particuliers : Nicolas Winding Refn tourne en rond, à tous les niveaux.

UN GÉNIE DÉVORÉ PAR SON… GÉNIE.

LA CRITIQUE

Résumé : Une jeune fille débarque à Los Angeles. Son rêve est de devenir mannequin. Son ascension fulgurante et sa pureté suscitent jalousies et convoitises. Certaines filles s’inclinent devant elle, d’autres sont prêtes à tout pour lui voler sa beauté.Neon_demon_6L’INTRO :

Il divise, il a ses fervents partisans et ses détracteurs acharnés, il déchaîne les passions et entraîne des réactions enflammées. Nicolas Winding Refn est l’un des grands auteurs européens actuels et tout son mérite, est déjà de provoquer une émulation forte autour de son cinéma. Brillant dès ses débuts avec la trilogie Pusher, pourfendeur d’un cinéma frontal avec Bronson, déroutant avec son Valhalla Rising, Refn aura acquis la notoriété internationale avec Drive avant de prendre un virage radical sur Only God Forgives, probablement son œuvre la plus discutée. Invité en compétition officielle pour The Neon Demon, le cinéaste danois n’aura pas fait insulte à sa réputation. Son nouveau bébé aura créé une fracture du côté de la Croisette, d’où il est reparti sans rien. Un scandale pour les uns, une absence logique pour les autres. Une chose est sûre, les amoureux de la radicalité de Only God Forgives ont été servis, The Neon Demon marche sur ses pas.Neon_demon_3L’AVIS :

Avec The Neon Demon, Nicolas Winding Refn plonge dans le monde pervers et malsain de la mode, qu’il illustre à travers une œuvre acide et provocatrice, mêlant sexe, violence, cynisme, jalousie et cruauté, avec même du cannibalisme et de la nécrophilie (un milieu où on s’entredévore et où les corps sont comme des cadavres) ! Le portrait est terriblement peu flatteur, et prend les oripeaux d’un thriller d’horreur lorgnant par moments, du côté de Brian De Palma, Argento ou Hitchcock, associé à l’héritage d’un Jodorowski dont Refn est un adepte. Œuvre aussi audacieuse et barrée, qu’énervante et boursouflée, il y a du génie dans The Neon Demon, de l’égocentrisme aussi. Les deux visages sont comme le pile et le face qui forment ensemble, le néo-cinéma d’un Refn plus fascinant mais aussi plus extrême et hermétique que jamais.Neon_demon_4Avec Only God Forgives, Nicolas Winding Refn était entré dans le cercle fermé des plus grands formalistes actuels avec sa sur-esthétisation post-moderne. Le danois confirme ce style qui semble le caractériser désormais, et confirme aussi la prédominance de son art visuel sur tout classicisme de la narration. Un état de fait qui affirme son créneau et mais qui en marque aussi les limites. Car finalement, avec The Neon Demon, Refn ne fait qu’habiller la maigreur rachitique de son script qui tourne autour de sa seule et unique idée du portrait d’une modèle débarquant dans un monde vil et sans pitié, où son apparente ingénuité va se frotter à l’horreur de tout ce qui le définit. Malheureusement, une fois débarrassé de tout ce qui est superflu, The Neon Demon ferait 30 minutes à peine. Ah c’est sûr, les 30 minutes en question sont fabuleuses, mais le reste n’est qu’un spectacle son et lumière, orchestré par un performer qui se repose avec beaucoup trop de facilité, sur son indéniable talent plastique. On sait Refn capable d’aligner les plans virtuoses mais par conséquent, on attend plus de lui que faire une énième démonstration de ce qu’il maîtrise fondamentalement. On voit le voire de transcender, utiliser sa sensibilité artistique dingue au service de ses histoires et non l’inverse.Neon_demonLe plus étonnant, c’est que malgré cela, The Neon Demon parvient à fasciner, par envoûter. Mais seulement par intermittence et davantage comme un geste artistique expérimental, plus que comme un pur film de cinéma passionnant. La lourdeur du symbolisme permanent est écrasante (mention toutefois au final théâtral qui bat des records de folie furieuse et de charge allégorique virulente) et à trop vouloir se faire l’illustrateur de pulsions refoulées plus que le conteur d’actes, Refn nous perd dans un ennui impoli, où il ne réussit jamais à asseoir sa plongée dans les limbes de la psyché humaine sur un récit vraiment prenant. Malgré une formidable Elle Fanning, fascinante biche apeurée dont le jeu nuancé incarne idéalement l’évolution sourde de son personnage, il serait grand temps que Nicolas Winding Refn songe à se renouveler, car réciter inlassablement la même partition est une voie sans issue pour un artiste. Et The Neon Demon a beau enivrer par à-coups, il n’en demeure pas moins comme une œuvre autistique, repliée sur elle-même, trop préoccupée à étaler son génie pour nous emporter dans les effluves de sa force, de son caractère, de son émotion et de ses milles idées allégoriques et figuratives. C’est finalement détaché de ce qu’elle raconte qu’on la traverse, dans un mélange d’ensorcellement hypnotique et de frustration agacée, alors qu’au bout d’une heure, son auteur n’a dressé que la présentation de son héroïne et de son univers. Une heure d’introduction ! Oui, The Neon Demon est somptueux mais ça ne fait pas un film, et son maniérisme outrancier et pesant pousse le film vers l’œuvre d’un auteur qui se regarde filmer, même si on ne doute pas de sa sincérité dans son envie de plaire. Oui, il essaie aussi d’aller plus loin que cela à travers un portrait psychologique chargé en symbolisme complexe, mais ce dernier est vite désamorcé par sa lourdeur pénible. Bref, le cinéma de Nicolas Winding Refn a vraiment besoin d’une déconstruction aussi radicale que son essence actuelle, pour trouver un nouveau souffle. The Neon Demon est une œuvre foncièrement superbe et fiévreuse, mais aussi intensément nombriliste et fastidieuse, qui fait dans la sur-démonstration permanente, quitte à parfois vriller vers le grotesque, comme quand il déploie une puissante musique effrayante pour filmer… un simple brossage de dents. Refn a bâti une ambitieuse cathédrale visuelle et narrative, mais il se perd dans ses nombreux corridors.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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