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MISÉRICORDE d’Alain Guiraudie : la critique du film

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Nom : Miséricorde
Père : Alain Guiraudie
Date de naissance : 16 octobre 2024
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 1h43 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Félix Kysyl, Catherine Frot, Jean-Baptiste Durand, Jacques Develay…

Signes particuliers : Savoureux.

Synopsis : Jérémie revient à Saint-Martial pour l’enterrement de son ancien patron boulanger. Il s’installe quelques jours chez Martine, sa veuve. Mais entre une disparition mystérieuse, un voisin menaçant et un abbé aux intentions étranges, son court séjour au village prend une tournure inattendue…

 

CES OBSCURS OBJETS DU DÉSIR

NOTRE AVIS SUR MISÉRICORDE

Cette année à Cannes, les sensations ont été nombreuses en compétition, de l’officielle aux sélections parallèles, mais pas que. Côté Cannes Première, le nom d’Alain Guiraudie a lui-aussi été scandé. L’auteur de L’Inconnu du Lac et Rester Vertical présentait en avant-première son septième long-métrage, Miséricorde, basé sur une partie de son roman Rabalaïre. Dans son Aveyron bien-aimé, le cinéaste y raconte l’histoire de Jérémie, qui monte de Toulouse pour les obsèques de son ancien patron dont il était proche de la famille. Il s’installe quelques jours chez sa veuve, Martine. Mais sa présence n’est pas appréciée de tous et son séjour va prendre une tournure compliquée après une disparition inquiétante, le tout sous l’oeil d’un curé qui rôde.

Quel film étrange signé Alain Guiraudie. Ou plutôt disons « hybride » tant le nouveau long-métrage du cinéaste est une curiosité inclassable errant -comme son personnage- entre le drame, le polar et la comédie presque vaudevillesque. Il serait bien hasardeux de vouloir s’aventurer à coller une étiquette sur cette virée à la montagne dont les notes s’écrivent avec des mots allant de homosexualité à champignons, de amour à malaisant, de jalousie à enquête, en passant par curé, secrets, pastis, police et pardon.

Tout démarre pourtant très sérieusement avec des funérailles, une venue bienveillante et des retrouvailles. En quelques images, Guiraudie semble construire un drame lourd sur fond de secrets du passé qui hantent une poignée de personnages. Mais très vite, le cinéaste parasite une histoire que l’on pensait connaître d’avance. Et progressivement, Miséricorde bascule dans un étrange tourbillon. Il sera tour à tour dérangeant avec son personnage principal trouble et troublant, captivant avec son enquête policière aux allures de polar rural ou franchement comique quand la tournure des événements passent du rationnel au décalé pas loin de l’ubuesque.

Constamment sur un fil entre le sérieux et le grotesque, Miséricorde est un film facétieux qui semble prendre un malin plaisir à adresser des pieds de nez aux conventions, que ce soit dans la nature des personnages, le ton employé ou la manière de raconter son histoire. En découle une sensation de fol amusement devant une œuvre à la virtuosité discrète, qui parle essentiellement de la multiplicité du désir et son revers, mademoiselle frustration. L’arrivée d’un homme bouscule les sens d’un petit village, comme l’arrivée de Terrence Stamp bousculait les règles d’une famille dans le Théorème de Pasolini, l’un des maîtres de Guiraudie. Au carrefour de Pasolini justement et de Buñuel (qui étudiait les « obscurs objets du désir »), Miséricorde est un film hors normes et complexes, comme ses personnages, comme les sentiments qui les animent.

 

Par Nicolas Rieux

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