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LEURS ENFANTS APRES EUX de Zoran et Ludovic Boukherma : la critique du film

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Nom : Leurs enfants après eux
Pères : Zoran et Ludovic Boukherma
Date de naissance : 04 décembre 2024
Type : sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 2h21 / Poids : NC
Genre : Drame

Livret de Famille : Paul KircherAngelina WorethSayyid El Alami, Gilles Lellouche, Ludivine Sagnier…

Signes particuliers : Une adaptation envoûtante.

Synopsis : Août 92. Une vallée perdue dans l’Est, des hauts fourneaux qui ne brûlent plus. Anthony, quatorze ans, s’ennuie ferme. Un après-midi de canicule au bord du lac, il rencontre Stéphanie. Le coup de foudre est tel que le soir même, il emprunte secrètement la moto de son père pour se rendre à une soirée où il espère la retrouver. Lorsque le lendemain matin, il s’aperçoit que la moto a disparu, sa vie bascule.

UNE ADAPTATION PUISSANTE

NOTRE AVIS SUR LEURS ENFANTS APRES EUX

Deux ans après la semi-déception que fut L’année du requin, leur comédie horrifique rejouant Jaws au Cap Ferret, les frères Boukherma s’attaquent à leur film le plus ambitieux à ce jour. Adaptation du roman homonyme de Nicolas Mathieu, prix Goncourt 2018, Leurs enfants après eux est une fresque dans la France des années 90 sur le parcours d’un jeune homme, de son adolescence aux prémisses de sa vie d’adulte.

Dans une ville industrielle de l’Est de la France où les usines ont fermé laissant place à une ambiance de désolation mortifère, Anthony s’ennuie. Quand il rencontre Stéphanie, il tombe amoureux. Son premier crush. Le soir même, il emprunte la moto de son alcoolique de père pour la rejoindre à une soirée. Mais la moto est volée. Son père est fou de rage, sa famille éclate et sa vie bascule. À l’écran, Paul Kirscher est Anthony, un rôle qui lui a valu le prix Mastroianni du meilleur espoir à la dernière Mostra de Venise.
Difficile de porter à l’écran un roman aussi salué par la critique et le public. Difficile surtout de trouver le bon dosage entre adaptation et transposition, s’en emparer mais sans le trahir, en respecter le sens et l’essence mais tout en en faisant une œuvre de cinéma indépendante, avec les contraintes et difficultés que comporte un travail de passage des mots aux images. Les frères Boukherma ont réussi ce challenge. Ils ont su faire d’un roman passionnant un film fulgurant. Sous l’œil de leur caméra, les subtilités sociologiques du livre de Nicolas Mathieu sont un poil atténuées mais ne disparaissent pas. En revanche, le duo exacerbe un parcours d’adolescent avec puissance, justesse et pouvoir d’incarnation. Balloté entre la comédie initiatique, la fresque romantique et le drame social, avec même des touches de western urbain, Leurs enfants après eux dégage une dimension dingue avec son scope étincelant dans lequel se meuvent des personnages qui souhaiteraient pourtant en écarter encore un peu plus les murs pour s’envoler.

Quand le film inspire, il aspire des personnages bruts, un cadre bouillant, les symboles d’une époque, un regard sur le passage de l’adolescence à l’âge adulte et des thématiques fortes… Quand il expire, il souffle avec une énergie dévastatrice un portrait générationnel incandescent qui questionne avec une vivacité bouillonnante, la rage des laissés-pour-compte, le déterminisme social, la paupérisation, le communautarisme, la lutte des classes, les élans romanesques d’une adolescence qui s’affirme, la masculinité… Un trop-plein d’idées qui se diluent parfois dans un léger manque de rythme. Leurs enfants après eux est un maelström qui se voudrait rageur mais qui aurait pu être encore plus réussi s’il parvenait à pleinement faire exploser à l’écran, l’émotion qu’il s’acharne à convoquer par son histoire, ses images foudroyantes et son côté juke-box des nineties.

Porté par un Paul Kirscher habité (mais dont le jeu très singulier continue de diviser à l’instar d’un Timothée Chalamet), Leurs enfants après eux est un film qui fascine sur la durée. Il lui faut un certain temps pour trouver son propre ton, son propre lyrisme, sa propre sensibilité quelque part entre La Haine, L’amour ouf ou La Vie de Jésus. Une chose est sûre, ce genre d’œuvre qui survole des cases en leur échappant à toutes est rarissime en France.

 

Par Nicolas Rieux

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