Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Screamers
Parents : Christian Duguay
Livret de famille : Peter Weller, Roy Dupuis, Jennifer Rubin, Andrew lauer, Charles Powell, Ron White…
Date de naissance : 2011
Nationalité : États-Unis, Canada, Japon
Taille/Poids : 1h48 – 11 millions $
Signes particuliers (+) : Les intentions étaient bonnes, l’angle d’attaque du roman aussi. Un bon univers. Beaucoup de débrouillardise.
Signes particuliers (-) : Manque d’ambitions et de moyens. Un scénario pas suffisamment travaillé. Une sensation de frustration et de gros gâchis.
ON ENTERRE PAS LE SCREAMERS SI VITE
Résumé : Depuis des années, l’opposition et la guerre fait rage entre l’Alliance, un regroupement de mineurs en révolte et un puissant consortium exploitant un minerai radioactif ayant sauvé la Terre de l’épuisement énergétique. En 2078, sur la planète Sirius 6B où le minerai est extrait, une colonie en état d’alerte, tient son poste avancé et guette l’ennemi. La guerre s’est enlisée, l’Alliance a développé les « hurleurs », sorte de robots autonomes enfouis dans le sol et tuant tout ce qui ne porte pas un bracelet de protection quand vient un message évoquant une éventuelle paix et règlement du conflit…
Classique de SF culte pour les uns, nanar ridiculement cheap pour les autres, Planète Hurlante divise encore aujourd’hui, 15 ans après sa sortie en salle. Adaptation d’une nouvelle du spécialiste de la littérature du genre qu’est Philip K. Dick et signée par le téléaste Christian Dugay, Screamers (en VO) incarne à merveille l’essence même du véritable concept cinématographique de « ratage ». Car il ne s’impose pas dogmatiquement comme une bouse infâme, un mauvais film sur lequel l’on ne peut que tirer à boulets rouges mais plus comme un ambitieux projet de classique, de film culte, reposant sur une matière à chef d’œuvre mais ayant échoué en empruntant le mauvais chemin en cours de développement et pâtissant d’erreurs de visualisation et planification commerciale.
Conçu minimaliste et produit pour un très faible budget de seulement 11 millions de dollars (quand le piteux Waterworld avoisinait les 175 millions) Planète Hurlante est tout sauf un blockbuster majeur déboulant sur les écrans afin de s’imposer comme un mastodonte de la SF des années 90. Au contraire, ses maigres moyens et son style épuré le place davantage au rang des « petites productions » jouant plus sur l’univers qu’elles proposent et sur l’ambiance et l’atmosphère qu’elles tentent de retranscrire. Mais si les petits budgets peuvent coller et convenir à certains projets, ils peuvent aussi vite devenir un handicap pour d’autres lorsque les intentions se révèlent plus ambitieuses… Incontestablement, le fond est ici passionnant et ouvre des possibilités brillantes comme Blade Runner en ouvrait, par exemple, en son temps. Mais le socle sur lequel est bâti le film de 1995 n’est pas cinématographique, il est littéraire. Et si chef d’œuvre il y a, alors il est préférable d’aller promener son esprit du côté du matériau d’origine, dans la nouvelle d’origine intitulée Nouveau Modèle.
La division provoquée auprès du public depuis toutes ces années, Planète Hurlante étant un objet de conflit acharné entre ses partisans et ses détracteurs, et à plus forte raison aujourd’hui, avec un recul conséquent, semble finalement logique dès lors que l’on observe l’objet avec recul analytique et objectivité. Pas déméritant dans le fond, plutôt fidèle à son matériau de base, le film de Christian Duguay basé sur un scénario de Dan O’Bannon, s’évertue à privilégier la construction d’un contexte, d’une histoire, le développement d’un univers plutôt que de se vautrer dans le « tout pour l’action » fatiguant en bonne série B qu’il prétend être. Et Screamers de montrer de belles choses, de bonnes idées, un style au charme touchant mais bien bancal. Et c’est là que la visualisation de production entre en jeu. Planète Hurlante est un film frustrant où le potentiel et l’ambition possibles n’est jamais exploitée pleinement, ni même frôlée. Duguay peine avec ses quelques millions à donner du souffle à un univers de SF qui multiplie les raccourcis, qui n’explore pas la richesse des thèmes et de l’histoire qu’il propose. Le mélange SF et post-apocalyptique pose un univers qui manque de détails, de richesse, l’intrigue se contente nonchalamment de survoler ses thématiques sans jamais entrer dans le vif du sujet, dans les thèmes intéressants qu’il aurait pu soulever comme la propension de l’homme à systématiquement s’auto-détruire par cupidité, par égoïsme, par envie et soif de pouvoir. Dommage. La matière pour pondre un immense film de SF était là mais la tentative reste bien trop superficielle, comme si les exécutifs derrière le projet n’y croyait pas réellement eux-mêmes.
Pourtant, Planète Hurlante connaîtra un succès presque inattendu malgré son statut et l’excellent Peter Robocop Weller pour seule vedette. Sorti des tiroirs après plus de dix ans où le projet était en sommeil, le film de Christian Duguay avait la capacité pour se hisser aux sommets de la SF futuriste, d’autant qu’il fait tout pour s’éloigner des canons hollywoodiens pour retrouver plutôt la saveur des grandes heures eighties. Mais le résultat manque d’à peu près tout et s’il prend un chemin intéressant avec son visuel, ses décors décrépis et sordide, son ambiance désolée et la mélancolie fataliste qui s’en dégage, son opposition politique façon Star Wars rencontrant l’Histoire de la guerre froide américano-russe sur fond de convoitise économique, l’absence d’intensité met du plomb dans l’aile à un film trop peu ambitieux dans sa traduction cinématographique trahissant ses bonnes intentions de départ. Mais une certaine tendresse s’en dégage associée à un grand sentiment de frustration devant un film qui « aurait pu »…
Bande-annonce :