Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Fehér Isten
Pères : Kornél Mundruczo
Date de naissance : 2014
Majorité : 15 avril 2015
Type : Sortie DVD
(Éditeur : Pyramide Vidéo)
Nationalité : Hongrie, Allemagne
Taille : 1h59 / Poids : NC
Genre : Drame, Thriller
Livret de famille : Zsófia Psotta (Lili), Sándor Zsótér (le père), Lili Horváth (Elza), Lili Monori (Bev)…
Signes particuliers : Quand un trop méconnu réalisateur hongrois signe « un divertissement d’auteur » à la fois intelligent, stressant et haletant…
LA RÉVOLTE DES CHIENS
LA CRITIQUE
Résumé : Pour favoriser les chiens de race, le gouvernement inflige à la population une lourde taxe sur les bâtards. Leurs propriétaires s’en débarrassent, les refuges sont surpeuplés. Lili, 13 ans, adore son chien Hagen, mais son père l’abandonne dans la rue. Tandis que Lili le cherche dans toute la ville, Hagen, livré à lui-même, découvre la cruauté des hommes. Il rejoint une bande de chiens errants prêts à fomenter une révolte contre les hommes. Leur vengeance sera sans pitié. Lili est la seule à pouvoir arrêter cette guerre. L’INTRO :
On a déjà connu la révolte des primates avec La Planète des Singes, préparez-vous maintenant à la révolte des canidés avec White God (à ne pas confondre avec White Dog de Samuel Fuller, même si l’on devinera là un clin d’œil évident). Nouveau long-métrage du metteur en scène hongrois Kornél Mundruczo (A tender Son, Delta), White God n’a rien du blockbuster spectaculaire et truffé de SFX. Ce drame intimiste, quelque part entre l’ofni culotté et la fable mordante, a été réalisé en toute simplicité, sans effets, sans trucages, seulement avec de l’énergie, de l’imagination, de la patience et du talent. Logiquement, le film a été récompensé du Prix « Un Certain Regard » au dernier Festival de Cannes.L’AVIS :
Avec son histoire de chiens en révolte contre les méchants humains qui leur ont fait du mal, White God évoluait sur un filin suspendu au-dessus d’un profond ravin où résonnait le ridicule. Pourtant, ce ridicule n’atteindra jamais le film de Kornél Mundruczo, qui le regarde droit dans les yeux et le défie, perché sur sa corde raide avec aplomb, sérieux et sens de l’équilibre, avec comme objectif unique, sa destinée de film d’horreur social, d’allégorie féroce aux crocs acérés sur l’état de la Hongrie actuelle. Magistral de bout en bout, White God est un impressionnant moment de cinéma audacieux et courageux, implacable et bouleversant, où tour à tour l’on frissonne pour les humains ou pour les bêtes et leur « cause » vengeresse. Du grand art soufflant un vent d’air frais revigorant, confectionné pourtant à partir de références allant des Oiseaux à White Dog en passant par Orca.Écrit et monté au cordeau, réalisé avec une exigence et une pureté absolue, lardé de sentiments extrêmes et interprété avec force (exceptionnelle jeune actrice que cette Zsofia Psotta), White God entremêle à la fois drame poignant et thriller animal haletant, incisif et tendu, alors que le spectateur navigue avec une fluidité narrative parfaite, entre le récit intimiste de cette jeune fille désemparée et l’aventure horrifiante de ce chien à la trajectoire terrible. Mais là où Mundruczo aurait pu sombrer dans la fable tendrement gnangnan sur l’amitié enfant/animal, son White God se détourne des clichés les plus évidents pour prendre une direction radicale, carnassière et terrifiante, plantant ses crocs avec puissance pour ne jamais lâcher un spectateur tenu en haleine, le souffle court et glacé d’effroi, par l’agressivité d’un film sans cesse surprenant et assumant sans frémir son postulat pour le transcender.Malgré quelques petites longueurs dès lors que le film s’égare dans la marge du fil conducteur de son récit principal, White God brille par sa capacité à nous malmener entre ses deux histoires évoluant en parallèle (la jeune fille à la recherche de son chien et le chien cherchant à échapper aux autorités traquant les bâtards proliférant en ville), par son primitivisme ravageur et violent, par sa propension à délivrer des séquences irrémédiablement bouleversantes ou iconiques (quel intro et quel final !). Ce cauchemar saisissant a pour lui de pouvoir satisfaire tous les publics, des amateurs de films d’auteur aux adeptes de divertissements pop-corn. Car White God est un film total, une brillante parabole prophétique et dans le même temps, un film au suspens indéniable où l’on tremble. Et un grand coup de chapeau au travail de dressage du duo de chiens incarnant le majestueux Hangen. Rares ont été les fois au cinéma où un canidé aura autant dégagé d’émotion par le seul regard. L’expression « Il ne lui manque que la parole… » prend tout son sens dans un film qui abandonne l’humanisme pour faire place au « chienisme ». Grandiose, White God est l’un des grands temps forts ciné de cette année.
L’ÉDITION DVD ET LES SUPPLÉMENTS
A défaut de bénéficier d’une sortie Blu-ray, White God a au moins droit à un beau traitement dans son unique édition DVD. Une galette techniquement soignée, respectant l’esthétique froide du film et son format 1:85 (compatible 16/9 et 4/3), assortie de pistes son en stéréo ou 5.1. Mais surtout, une galette nous offrant un beau making of d’environ 17 minutes, revenant sur le point le plus énigmatique de l’audacieuse entreprise du réalisateur Kornél Mundruczo : les chiens. Le making of laisse en effet la part belle aux canidés au centre du film, détaillant le travail de dressage et le tournage ardu avec les 250 animaux présents sur le plateau ! En compagnie du cinéaste, de la jeune actrice Zsofia Psotta, de la coordinatrice Teresa Ann Miller et des dresseurs hongrois qui l’ont épaulé dans sa tâche, on plonge à même dans les coulisses du long-métrage, et l’on est invité à saisir les difficultés engendrées par un tel tournage impliquant autant de bêtes, auxquelles il a fallu apprendre « à jouer » devant une caméra, en ignorant l’environnement extérieur, de l’équipe aux caméras. Un voyage passionnant et complément idéal à l’impressionnante gageure qu’était White God, au détour duquel Kornél Mundruczo s’exprime également sur la portée sociale de son oeuvre.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux