Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : The Sea of Trees
Père : Gus van Sant
Date de naissance : 2014
Majorité : 27 avril 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h58 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Matthew McConaughey (Arthur Brenan), Ken Watanabe (Takumi), Naomi Watts (Joan Brenan)…
Signes particuliers : Il en faut toujours un. Le bouc émissaire cannois de cette année qui a permis aux festivaliers de passer leurs nerfs, c’était lui. Le dernier Gus san Vant, sifflé sur la croisette, sort tardivement en salles, au passage retitré Nos Souvenirs.
LE SONGE RATÉ DE GUS VAN SANT
LA CRITIQUE
Résumé : Dans la forêt d’Aokigahara, au pied du Mont Fuji, Arthur Brennan est venu mettre fin à ses jours, comme beaucoup avant lui en ces lieux. Alors qu’il a trouvé l’endroit qui lui semble idéal, il aperçoit soudain un homme blessé et perdu. Assailli par un sentiment d’humanité irrépressible, Arthur se porte à son secours. Alors qu’il s’était décidé à mourir, il va devoir aider un homme à survivre.
La Forêt des Songes était l’un des films les redoutés de la sélection cannoise. Malgré la présence du très apprécié Matthew McConaughey devant la caméra et le nom de Gus van Sant derrière l’objectif, le film aura été hué lors de sa projection au festival. Méritait-il un sort aussi terrible ? Il faut dire que la carrière du cinéaste aura toujours été en dents de scie, arborant plusieurs visages entre auteurisme radical et versant plus grand public, voire les deux conjointement. Et même s’il essaie toujours de défendre quelque-chose à travers un cinéma sans cesse engagé, Gus van Sant est capable du pire comme du meilleur, de Paranoid Park comme de Psycho, de Elephant comme de Restless. Drame fantastique au scénario rédigé par un expert du cinéma de genre (Chris Sparling, auteur de Buried ou Le Projet Atticus) The Sea of Trees prend place dans une mystérieuse forêt présentée comme le lieu idéal pour se suicider, forêt où vont se rencontrer ledit Matthew et l’acteur nippon Ken Watanabe, Naomi Watts complétant la distribution de ce film prometteur et riche en stars de qualité, au moins autant qu’il est tristement vide et désincarné au final.L’AVIS :
Avec La Forêt des Songes, Gus van Sant signe un film d’une rare faiblesse, à ranger dans la catégorie de ses œuvres les moins intéressantes et les plus superficielles. Livrant un drame consensuel cherchant à satisfaire toute la palette de son large public (le cinéaste a toujours été à cheval entre le mainstream et le cinéma d’auteur), il sombre cette fois-ci avec cette pseudo fable existentialo-poétique crépusculaire aussi facile que pataude, menant à une réflexion de comptoir spirituelle sur le « tout est lié », le monde, la vie, la mort, le processus de deuil. Un peu trop biberonné à Lost (la forêt qui retient ses pensionnaires en les empêchant de trouver la sortie), Chris Sparling livre un script aux ressorts aussi lourds qu’empotés, truffé de poncifs en tout genre associés à des coutures grossièrement apposées sur une intrigue à la peine dont on devine tout trop vite. Et Gus van Sant ne parvient jamais à transcender ce matériau de départ malgré ses idées, ses intentions, et une mise en scène aléatoirement travaillée. Si le film se suit sans trop de peine par la facilité de son déroulé et sa structure à la mode flirtant avec le « déjà trop vu » (le drame partant d’une situation présente et remontant progressivement le fil d’une vie par morceaux de flashback, à l’instar du très beau Wild de Jean-Marc Vallée par exemple), son manque d’originalité, d’une perspective forte et surtout d’une étincelle qui embraserait un peu cette métaphore tête à claque et mielleusement positiviste pour lui conférer un peu de corps et d’âme, condamnent cet effort pas loin de l’indigence. On supplierait presque nous aussi, pour trouver rapidement la sortie dans cette forêt touffue aux motifs répétitifs, offrant un cadre pourtant intéressant à un film inutilement verbeux au vu de sa portée sans véritable profondeur, sans substance derrière sa façade bien terne, et faussement intellectualisé, glissant dangereusement vers le prétentieusement vain. Représentant dans une démarche symbolique, le mental d’un homme où se joue un combat entre la vie et la résignation sur fond de purgatoire mystique (rebonjour Lost), La Forêt des Songes ne méritait peut-être pas le couperet honteux qu’il s’est vu imposer comme fin de non-recevoir du côté de la Croisette, mais clairement, il n’y méritait pas sa place non plus.
EXTRAIT :
Par Nicolas Rieux