Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : The Fighter
Père : David O’Russell
Livret de famille : Mark Wahlberg (Micky Ward), Christian Bale (Dicky Eklund), Amy Adams (Charlene), Melissa Leo (Alice Ward), Jack McGee (George Ward), Mickey O’Keefe (lui-même), Miguel Espino (Sanchez), Peter Cunningham (Mike)…
Date de naissance : 2010
Nationalité : États-Unis
Taille/Poids : 1h53 – 25 millions $
Signes particuliers (+) : Un biopic renversant et puissant, à la fois drame fraternel bouleversant et extraordinaire film sportif aux scènes de boxe les plus belles et les plus percutantes vues depuis Raging Bull. Un monument de l’année, porté par deux comédiens époustouflants.
Signes particuliers (-) : x
MICKY BOXE, DICKY BOXE, DARTY BOXE (pardon…)
Résumé : Micky Ward est un boxeur dont la carrière n’a jamais vraiment pris une autre dimension que celle de petit combattant local. Son demi-frère, Dicky Eklund lui, a connu la gloire il y a longtemps de cela, avant de sombrer dans la drogue. Aujourd’hui, Micky a une chance, un second souffle. Malgré leur entente plus que moyenne, ils vont s’entraider sous le regard de leur mère ultra-possessive…
Une pincée d’Eastwood, une pincée de Scorsese, une pincée de James Gray, ajoutons à cela le style du brillant David O’Russell (Les Rois du Désert) et l’on obtient après cuisson ce Fighter, œuvre puissante redonnant ses lettres de noblesse au film de boxe. Producteurs, réalisateur, acteurs, personne n’aura lésiné sur les moyens et les sacrifices pour porter à l’écran l’histoire du boxeur Micky Ward. A commencer par Mark Wahlberg, son interprète, fan depuis toujours de ce sportif à la carrière et vie privée atypiques et dont le projet tenait à cœur depuis des années. Entraînement intensif durant des mois par souci de crédibilité, renoncement à son salaire, Wahlberg aura tout fait pour aider voire porter ce modeste projet indépendant à budget réduit où même son acolyte Christian Bale (interprétant son demi-frère) aura accepté un salaire quasi symbolique au vu de son statut d’acteur prisé avec seulement 250.000 dollars de rétribution. Pour tant d’efforts dépensés, il valait mieux que l’issue soit positive et que le film soit une réussite. Confirmation dès sa sortie avec une pluie de critiques élogieuses conduisant Fighter tout droit sur l’autoroute des Golden Globes et des Oscars où les nominations vont pleuvoir et d’où il repartira avec des prix pour Bale et Melissa Leo.
O’Russell navigue entre biopic punchy et drame social sur les bas-fonds d’une Amérique engluée dans la déchéance, écorchée vive, pour nous conter un récit véridique à fleur de peau et touchant de sincérité passionnée sur fond de rédemption, de pardon et de lutte pour et contre la vie dans toute son âpreté tragique et sa dure réalité. Il est d’une part un immense film de boxe où les combats, filmés de façon très télévisuelle, sonnent comme autant d’uppercuts pour un spectateur mis KO. A l’opposé d’un Raging Bull montrant le ring du point de vue de son personnage central pour une immersion totale dans sa peau, Fighter privilégie un rendu se plaçant d’un point de vue spectatoriel où l’on est pas Micky Ward mais où l’on regarde Micky Ward se débattre pour atteindre ses aspirations, pour lutter contre la défaite, pour se hisser hors de son rang, de son contexte et de sa catégorie d’inférieur peu pris au sérieux. A personnages exceptionnels, casting trois étoiles. Wahlberg donne de sa personne comme jamais pour être Micky, boxeur jusque là plus ou moins mineur, sans envergure mais décidant de tout faire, de tout donner pour être au rendez-vous de son destin. Il est pour cela entouré d’un demi-frère camé (Christian Bale), illustre boxeur à la gloire fanée et qui n’est désormais plus que l’ombre de lui-même, homme brisé par une vie peut-être trop dure, par un contexte. Mais Dicky va voir dans la nouvelle croisade de son frère le moyen de reprendre le fil d’une vie qu’il a lâché depuis longtemps, d’expier ses fautes et de délaisser ses démons pour redevenir un être vivant et non plus l’ombre d’un homme. Cette amitié fraternelle fragile, détruite dans le passé, et retrouvant des couleurs au contact d’une passion commune, d’un désir commun d’atteindre les sommets, pour l’un comme une réalité, pour l’autre par procuration désormais, va se faire sous le regard d’une mère (extraordinaire Melissa Leo), matriarche vacharde et folle, cherchant à régner sur son clan familial sans se rendre compte des dégâts qu’elle occasionne à trop vouloir contrôler, par amour au fond, mais par amour maladroit.
Chronique sensible et subtile, Fighter a l’intelligence des plus grandes œuvres, celle de ne jamais se focaliser sur la boxe comme une finalité de récit. Loin du mielleux De l’Ombre à la Lumière de Ron Howard, par exemple, O’Russell dépeint les affres d’une réalité sociale d’une petite ville américaine et de ses êtres simples par une magnifique histoire flirtant entre la tragédie de vie et la leçon d’espérance et de ténacité. Les personnages ont et auront toujours plus d’importance que le sport en lui-même et c’est l’imbrication parfaite des deux qui va conduire le film au rang de sublime œuvre profonde et forte. Tout en poésie, Fighter montre les joies, les doutes, la volonté de s’extraire d’un milieu social jamais délaissé de la toile de fond. Et tout participe d’une superbe écriture d’une aventure humaine au sein d’un monde cruel et parfois désespéré mais où la lumière est le bout du tunnel au terme d’une longue marche à la force de la volonté et de croyance en soi.
Si l’interprétation du trio Bale-Wahlberg et Leo y est pour beaucoup dans la puissance qui se dégage de cette merveille bouleversante et émouvante, O’Russell déploie un style résolument réaliste qui apporte force et richesse à un film qui inscrit une nouvelle page au genre et s’impose désormais comme un classique aux côtés des Sang et Or, Nous avons Gagné ce Soir et autres Raging Bull ou Rocky par sa différence avec chacun et sa qualité. Remarquable.
Bande-annonce :