Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : F (ou The Expelled)
Père : Johannes Roberts
Livret de famille : David Schofield (Robert), Eliza Bennett (Kate), Ruth Gemmell (Sarah), Juliette Aubrey (Helen), Emma Cleasby (Lucy), Finlay Robertson (James), Roxanne McKee (Nicky), Tom Mannion (Gary)…
Date de naissance : 2010
Majorité au : inconnue
Nationalité : Angleterre
Taille : 1h15
Poids : £ 150.000
Signes particuliers (+) : Un slasher d’un genre différent, à la croisée des chemins entre le drame social, le pamphlet sociétal, l’horreur et le thriller en huis clos angoissant. Soigné, bien interprété, moins basique que la moyenne en essayant de se sortir des conventions limitées, une petite réussite intéressante.
Signes particuliers (-) : Le discours est un peu poseur dans son approche et sa structure essaie de s’éloigner du genre tout en épousant une partie de sa mécanique. Prévoir du coup des maladresses.
ASSAUT SUR LE WITTERING COLLEGE
Résumé : Un professeur traumatisé par son agression par un élève, est pris au piège avec quelques collègues et sa fille, de son lycée attaqué par une mystérieuse bande de jeunes ultra-violents…
Johannes Roberts est un jeune cinéaste britannique qui restera (ou pas) dans les annales pour avoir été le premier à réaliser une mini-série pour téléphones mobiles. C’était When Evil Calls en 2006 et c’est surtout très anecdotique. Car en dehors de ça, il a surtout signé quelques longs-métrages essentiellement de genre dont un récent Storage 24 qui a fait parler de lui en festivals. En 2010, il avait accouché d’un film au titre plus que court, intitulé F, du nom de la note collée à un étudiant bas du front ayant rendu une copie infâme en cours. Tout petit budget d’environ £ 150.000 (soit environ 175.000 €), F est une sorte de huis clos dans un collège où une poignée de professeurs et d’élèves vont subir les attaques d’un mystérieux groupe de jeunes encapuchonnés qui ne visent que leur mort pure et simple. Il est aussi une énième preuve de la bonne vitalité du cinéma de genre au Royaume-Uni.
S’il a dans un premier temps un peu de mal à se situer, coincé dans un entredeux à mi-chemin du thriller et du slasher par son manque d’explicité (des meurtres souvent hors champ), F finit par choisir ouvertement son camp au fil des minutes pour intégrer clairement le cercle des longs-métrages horrifiques au détour de quelques plans bien graphiques voire gores. Il aura fallu patienter mais c’était pour mieux installer une ambiance oppressante et terrifiante dans un film qui, comme pas mal de ses confrères anglais, s’octroie au passage une composante socialisante. Un peu à la manière de séries B comme Harry Brown ou Piggy plus récemment, F est en effet un film de genre à tendance sociale peignant une société britannique où tout se délite, où les valeurs traditionnelles sont bafouées, où l’irrespect, l’anarchie et la violence la plus frontale et extrême qui soit, montent en puissance. Un monde de plus en plus nihiliste et proche du chaos où la noirceur des faits divers n’a d’égale que leur cruauté incompréhensible.
Court et efficace (1h15), presque trop même puisqu’une fois le film lancé, il demeure très mécanique dans son enchaînement structurel (ce qu’il doit à sa facture de slasher), F est néanmoins une petite pépite étonnante de cinégénie au vu de son statut de série B sans grands moyens. Avec ses belles images, sa surprenante maîtrise et ses personnages très élaborés pour un film de genre, renforçant la qualité de son atmosphère angoissante, le film de Johannes Roberts n’est peut-être pas très subtil dans son autre de son discours sur la société et comporte quelques incohérences (rien de méchant toutefois) mais autant dire qu’il est une agréable surprise essayant d’amener le slasher vers un terrain moins factice et plus intelligent que la moyenne de ses congénères. Il brille notamment par la construction crédible de son univers et par sa façon se s’éloigner un peu des codes ultra-conventionnels du registre en ne se bornant pas à opposer de façon manichéenne boogeyman et pauvres victimes. Johannes Roberts s’appuie pour cela sur un scénario bien écrit, ne visant pas le seul « fun » limité du massacre en règle de jeunes stupides et accouche d’un film très intéressant qui, sans être parfait, saura conduire les aficionados de tuerie irraisonnée vers quelque-chose d’un peu substantiel que les classiques (mais régalant) Vendredi 13 et consorts.
F est un slasher dramatico-psychologique d’un genre différent (chose rarissime) qui multiplie les points positifs parlant pour lui. Interprétation générale des acteurs plus que convaincante, mise en scène soignée, photo léchée, ancrage dans le réalisme, légère tentative d’aventure vers la lisière du fantastique et une ambiance extrêmement sombre marquée par des choix douloureux voire cruels (le final en est un exemple plutôt fin et dérangeants). S’il n’est pas forcément brillant, réduit à un sous-discours un peu populiste, réducteur voire moralisateur, il n’empêche que sa démonstration épousant les formes du genre est plutôt salvatrice, sortant un registre de son carcan aux conventions sur-définies en s’aventurant sur des sentiers moins balisés à la croisée des styles, même s’il est parfois un peu maladroit dans sa conjugaison et ses visées. Avare en explication, privilégiant le mystère au démonstratif en ayant un œil vissé vers le fondateur Assaut de John Carpenter, F n’a pas été globalement très bien reçu et c’est fort dommage. Il affiche certes ses maladresses de façon très évidente, mais l’ensemble est amplement plus positif et original que négatif et honteux. Une sorte de Class 84 à la sauce moderne et anglaise. On vous passera juste le « based on true events » qui sonne un peu comme une récupération chancelante de plusieurs faits divers mixés pour une histoire inventée.
Bande-annonce :