La Mondo-Note :
Carte d’identité :
Nom : Gangbyun Hotel
Père : Hong Sang-soo
Date de naissance : 2018
Majorité : 29 juillet 2020
Type : Sortie en salles
Nationalité : Corée du sud
Taille : 1h36 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Ki Joo-bong, Kim Min-Hee, Song Seon-mi…
Signes particuliers : Hong Sang-soo signe comme une sorte de poème cinématographique.
HONG SANG-SOO AU SOMMET DE SON ART
NOTRE AVIS SUR HOTEL BY THE RIVER
Synopsis : Un vieux poète, qui loge dans un hôtel au bord d’une rivière, fait venir ses deux fils, pensant que sa fin est proche. Lieu de retrouvailles familiales, l’hôtel est aussi celui d’un désespoir amoureux : une jeune femme trahie par l’homme avec qui elle vivait vient y trouver refuge et demande à une amie de la rejoindre…
Les amoureux du cinéma de Hong Sang-soo vont être ravis, en cette année 2020, ce n’est pas une mais deux nouvelles œuvres du maître coréen qu’il sera possible de découvrir sur grand écran. En attendant La Femme qui s’est enfuie prévu pour fin septembre, c’est Hotel by the River qui ouvre le bal en pointant enfin le bout de son nez dans l’Hexagone deux ans après sa présentation à Locarno puis à Toronto. Dans ce drame en huis-clos, Hong Sang-soo enferme le spectateur dans un hôtel en compagnie d’une toute petite poignée de personnages. Un vieux poète rejoint par ses deux fils, une jeune femme trahie en amour et son amie venue la soutenir, et l’hôtesse d’accueil de l’établissement. Ils sont six en tout et pour tout, et vont faire vivre ce drame crépusculaire aux images tournées dans un sublime noir et blanc.
Le temps qui passe et les malheurs de l’amour. Ce sont les deux thématiques les plus emblématiques de son cinéma qu’Hong Sang-soo fige dans Hotel by the River, ballade poétique douce-amère où le cinéaste a comme atteint la quintessence de son travail. De film en film (surtout ces dernières années), Hong Sang-soo n’a eu de cesse d’affiner son langage, son esthétique, son expression. Avec Hotel by the River, on a comme cette sensation qu’il a enfin gagné le bout du chemin, qu’il a terminé sa quête et trouvé son Graal. La beauté de son cinéma n’a jamais été aussi évidente, sa langueur n’a jamais été aussi enivrante, son sens de l’épure n’a jamais aussi finement saisi. Tout s’emboîte avec grâce dans cette œuvre à la virtuosité aussi indiscutable que d’une discrétion absolue. A la lisière du haïku cinématographique, Hong Sang-soo fait simple et court pour évoquer l’évanescence des choses, de l’amour comme de la vie. Il y a cette jeune femme, belle et désemparée, qui traîne son chagrin amoureux dans les couloirs et recoins vides de cet hôtel désert hors-saison. Elle pleure la fin d’un amour. Non loin, il y a ce vieux poète persuadé que la fin est proche et qui réunit ses deux fils comme pour parcourir avec mélancolie son passé et expier ses erreurs. Il pleure la fin d’une vie. Et pendant ce temps là, la neige recouvre tout.
Au centre de ce chassé-croisé dans cet établissement aux allures de mausolée funéraire symbolique où l’on enterre les choses, la vie comme l’amour, Hong Sang-soo est aérien. Il regarde, il esquisse, il caresse, avec un tact impressionnant qui ne se révèle pas forcément tout de suite mais qui, quand il jaillit, révèle la patte d’un maître qui a trouvé sa perfection à lui. Comme souvent chez Hong Sang-soo, la narration est dépouillée, le rythme est lent, la mise en scène flottante, le dénuement total, l’ennui tout proche. Mais il suffit de gratter, d’essayer de comprendre au-delà de la trame et des images, pour que le cœur de Hotel by the River se révèle. Derrière, se cache une œuvre désenchantée, voire une œuvre sur le désenchantement, une œuvre qui n’a pas besoin d’enjeux pour raconter quelque chose de fort. Hotel by the River a la sagesse d’une extrême maturité, à tel point que l’on en quitterait presque le terre-à-terre dramatique pour pénétrer dans un quelque chose de plus supérieur, là où les films sont comme des songes délicats (comme ceux d’un Nuri Bilge Ceylan par exemple). Épure radicale et formalisme somptueux, Hong Sang-soo réussit une oxymore cinématographique, qui berce et envoûte.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux