Nom : Bugonia
Père : Yorgos Lanthimos
Date de naissance : 26 novembre 2025
Type : sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h59 / Poids : NC
Genre : Comédie, Thriller
Livret de Famille : Emma Stone, Jesse Plemons, Alicia Silverstone, Stavros Halkias…
Signes particuliers : Brillant et jubilatoire.
Synopsis : Deux hommes obsédés par la conspiration kidnappent une grande PDG, convaincus qu’elle est un extraterrestre qui a l’intention de détruire la Terre.

YORGOS LANTHIMOS EN MODE REMAKE
NOTRE AVIS SUR BUGONIA
Un an à peine après leur passage réussi au festival de Cannes avec Kinds of Kindness ( prix d’interprétation masculine), Yorgos Lanthimos retrouve ses muses, Emma Stone et Jesse Plemmons, pour Bugonia. La quatrième collaboration consécutive entre l’actrice et le cinéaste, la seconde avec l’acteur. Cette fois-ci, Lanthimos s’attaque à un remake, une première pour le grec. Bugonia est une revisite de la délirante comédie noire sud-coréenne Save the Green Planet ! sortie en 2003. Délocalisée dans l’Amérique profonde, l’histoire suit un apiculteur biberonné aux théories du complot traînant sur le net, qui organise avec l’aide de son cousin, le kidnapping de la riche PDG d’un puissant groupe pharmaceutique. L’objectif ? Lui faire avouer le secret qu’elle cacherait si bien. Selon eux, elle serait une extraterrestre infiltrée sur Terre avec pour but d’éradiquer la race humaine…

Comme son modèle coréen, Bugonia est un mélange assez surréaliste de comédie noire, de thriller haletant, de torture porn, de tragédie familiale, de parabole politique et de délire science-fictionnel. Un sacré cocktail qui exigeait une maîtrise d’exception pour être tenu de bout en bout sans que tout se casse la gueule. Jusqu’à présent, Yorgos Lanthimos ne nous avait jamais déçus. Bonne nouvelle, ce n’est pas aujourd’hui qu’il va commencer.
Tout en conservant ses thématiques fétiches et son style singulier, Lanthimos signe une œuvre dingue. Et accessoirement un remake nettement supérieur à son modèle. Probablement l’un de ses films les plus ludiques sur la forme, et dans le même temps l’un de ses plus riches sur le fond si l’on se donne la peine d’aller au-delà de sa facture de série B violente et ubuesque. Derrière cette histoire de séquestration saugrenue et de psychose criminelle, Bugonia est surtout une fable sur l’absurdité de notre monde contraint et forcé d’aller chercher de quoi expliquer sa profonde irrationalité dans des théories au-delà du non-sens. Comme ce jeune homme incapable d’accepter sa médiocre condition et ses malheurs personnels, et qui préfère imaginer un possible complot extraterrestre illusoire plutôt que de n’y voir que les ravages de la cruelle marche capitaliste du monde.

En creux d’une histoire qui ose aller jusqu’à convoquer des idées théologiques appliquées sur un constat terrible de notre humanité (auto) destructrice, Yorgos Lanthimos dresse un portrait de nos sociétés d’aujourd’hui où la lutte des classes est de plus en plus féroce, où l’injustice est reine, où les sans défenses sont désespérés et sans solutions face aux puissants qui dirigent et détruisent un monde courant frénétiquement à sa perte.
Yorgos Lanthimos est clivant, ce n’est pas nouveau. Pour certains, le cinéaste grec poursuit sa folle cavale dans un cinéma détestable qui a oublié le génie de ses débuts depuis plusieurs films. Pour d’autres, comme nous, Lanthimos n’a de cesse de film en film, de proposer un regard radical et contemporain sur le monde qui l’entoure, désormais habité par une terrifiante monstruosité humaine. Et Bugonia est un chef-d’œuvre. Mais fort à parier que certaines zones du scénario -notamment sa conclusion assez déstabilisante pour ceux qui ne connaissent pas l’original- risquent d’en braquer plus d’un. Dans le sillage d’un duo Emma Stone et Jesse Plemons une nouvelle fois énorme, Bugonia est un savoureux mariage de jubilatoire et d’intelligence.
Par Nicolas Rieux