La Mondo-Note :
Carte d’identité :
Nom : Atlantique
Mère : Mati Diop
Date de naissance : 2018
Majorité : 2 octobre 2019
Type : Sortie en salles
Nationalité : Sénégal, France
Taille : 1h45 / Poids : NC
Genre : Drame
Livret de famille : Mama Sané, Amadou Mbow, Ibrahima Traore…
Signes particuliers : Un film confus qui se perd dans son univers.
UN GRAND PRIX CANNOIS VENU DE NULLE PART
NOTRE AVIS SUR ATLANTIQUE
Synopsis : Dans une banlieue populaire de Dakar, les ouvriers d’un chantier, sans salaire depuis des mois, décident de quitter le pays par l’océan pour un avenir meilleur. Parmi eux se trouve Souleiman, qui laisse derrière lui celle qu’il aime, Ada, promise à un autre homme. Quelques jours après le départ en mer des garçons, un incendie dévaste la fête de mariage d’Ada et de mystérieuses fièvres s’emparent des filles du quartier. Issa, jeune policier, débute une enquête, loin de se douter que les esprits des noyés sont revenus. Si certains viennent réclamer vengeance, Souleiman, lui, est revenu faire ses adieux à Ada.
Ce fut un Grand Prix pour le moins inattendu lors du dernier festival de Cannes, et qui a pris tout le monde un peu de court. Atlantique, de la franco-sénégalaise Mati Diop, s’est glissé au palmarès au nez et à la barbe des Tarantino, Ken Loach et autre Terrence Malick. Pour son premier long-métrage après plusieurs courts, la metteur en scène a frappé fort avec sa virée dans les quartiers populaires de Dakar, où il est question d’ouvriers non payés sur les chantiers, d’un jeune homme qui aime une jeune femme promise à un autre, d’émigration désespérée vers l’Europe mais aussi d’enquête policière sur un incendie criminel et même de femmes en transe zombifiées !
Si l’annonce surprise de sa présence au palmarès a autant provoqué l’étonnement, c’est parce que la sélection cannoise 2019 était globalement d’assez bonne tenue et qu’Atlantique faisait partie des plus faibles de la classe. Le voir ainsi récompensé du prestigieux Grand Prix avait de quoi rester en travers compte tenu des oubliés de cette édition, l’ami Tarantino en tête (qui devait bien ronger son frein). A moins que le jury n’ait voulu célébrer les bonnes intentions de Mati Diop. Car de bonnes intentions, il y a en plein dans Atlantique. Mais comme on le dit souvent, un long-métrage ne se réussit pas qu’avec de bonnes intentions. Si elle a grandi à Paris, Mati Diop n’a jamais perdu de vue ses origines sénégalaises et c’est à elles que la cinéaste a voulu rendre hommage avec ce premier long-métrage engagé, qui tente via le vecteur du drame social, de dresser le portrait d’une jeunesse sénégalaise désespérée, confrontée à une absence d’avenir et à un marasme végétatif cimenté par le traditionalisme d’une société qui n’avance pas. C’est le cas du malheureux Souleiman qui n’a pas été payé depuis 4 mois par son patron alors qu’il se crève quotidiennement sur les chantiers transformant le visage du pays. Des chantiers générant des logements qu’il aura construit mais auquel il n’aura jamais accès. C’est le cas aussi de la pauvre Ada, qui aime Souleiman mais qui doit être mariée prochainement au friqué Omar, pour lequel elle n’a aucun attachement. Mais elle doit obéir aux lois parentales et l’homme est un bon parti pour la famille. Derrière ce duo de Roméo et Juliette africains, c’est toute une jeunesse qui se débat au jour le jour, faisant illusion pour ne pas trop regarder le précipice de la misère. Et à côté d’eux, l’océan, cette immense étendue d’eau qui les sépare d’une Europe pleine de promesses, mais qu’ils observent de loin.
Oui, des intentions et des pistes de réflexion intéressantes, il y en a plein dans Atlantique, film qui a quelque chose à dire et qui tente de l’exprimer avec un regard différent. Sans doute ce que Cannes a voulu récompenser d’ailleurs. Mais malheureusement, Mati Diop se perd complètement dans son portrait hétéroclite qui avance avec une lourdeur pataude et assassine. Alors qu’une intrigue policière et des éléments de fantastique s’invitent au récit romanesque en cours de route, histoire de donner un peu d’allant aux enjeux et d’évoquer au passage le folklore local, Atlantique se délite sous le poids de sa dispersion, de son manque d’énergie bouillonnante, et de sa redondance (le coup du plan de la mer chargé en symbolisme, on a compris l’idée, inutile de le répéter 20 fois). Mais plus que tout, il se délite car plombé par une maîtrise très vacillante qui ne résiste pas au trop-plein qui surcharge l’effort. Si l’histoire de ces deux amoureux transit fait naître un certain charme touchant, tout ce qui l’entoure ne parvient jamais à créer une dynamique suffisamment entretenue pour tenir en haleine et faire jaillir l’émulsion. Résultat, les différentes pistes finissent par s’annuler dans un long-métrage (ou plutôt un métrage long) qui manque cruellement de tension et/ou d’émotion. A avoir voulu trop élaboré son scénario, Mati Diop a perdu le fil d’une simplicité qui aurait sans doute fait beaucoup de bien à son entreprise.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux