Nom : The Power of the Dog
Mère : Jane Campion
Date de naissance : 2021
Majorité : 1er décembre 2021
Type : Disponible sur Netflix
Nationalité : Nouvelle-Zélande, Australie, USA, Angleterre
Taille : 2h08 / Poids : NC
Genre : Drame, Western
Livret de Famille : Benedict Cumberbatch, Kirsten Dunst, Jesse Plemons, Kodi Smit-McPhee…
Signes particuliers : Très beau… mais très décousu aussi.
TRAGEDIE DANS LE GRAND OUEST
NOTRE AVIS SUR THE POWER OF THE DOG
Synopsis : Originaires du Montana, les frères Phil et George Burbank sont diamétralement opposés. Autant Phil est raffiné, brillant et cruel – autant George est flegmatique, méticuleux et bienveillant. À eux deux, ils sont à la tête du plus gros ranch de la vallée du Montana. Une région, loin de la modernité galopante du XXème siècle, où les hommes assument toujours leur virilité et où l’on vénère la figure de Bronco Henry, le plus grand cow-boy que Phil ait jamais rencontré. Lorsque George épouse en secret Rose, une jeune veuve, Phil, ivre de colère, se met en tête d’anéantir celle-ci. Il cherche alors à atteindre Rose en se servant de son fils Peter, garçon sensible et efféminé, comme d’un pion dans sa stratégie sadique et sans merci…
12 ans déjà 12 ans que la cinéaste néo-zélandaise Jane Campion n’avait plus foulé un plateau de cinéma. La dernière fois, c’était avec Bright Star, mélo en costumes aussi esthétisant qu’ennuyeux. Depuis, Campion était accaparée par la série Top of The Lake. Jusqu’à l’appel du grand écran avec ce Power of The Dog, fresque westernienne louée à la Mostra de Venise et tombée dans l’escarcelle de Netflix alors que sa grandeur artistique aurait bien mérité les honneurs des salles obscures. On saura au moins se satisfaire de pouvoir le découvrir, c’est déjà pas mal à l’heure où tant de films demeurent inédits en raison de l’embouteillage des salles post-Covid.
Quand on pense au Grand Ouest dans le cinéma américain, on a souvent en tête le Far West, la ruée vers l’or, les cowboys et les indiens. The Power of The Dog nous plonge un peu plus tard, dans une époque moins traitée au cinéma, les années 1920. Le décorum et les codes emblématiques sont toujours là, mais il y a en sus les automobiles, une certaine industrialisation en marche… Dans ce décor bientôt en mutation, le ranch des Burbank est prospère, tenu de mains de maîtres par deux frères que tout oppose. Imagés en pièce de monnaie, Phil serait le côté pile et George le côté face. Le premier est le pur fermier par excellence, homme de la terre et cowboy rustre qui aime être au milieu de ses chevaux et de ses hommes. Le second est plus dans la gestion, plus maniéré, bien costumé et propre sur lui. D’emblée, en quelques scènes et quelques dialogues, Jane Campion pose les bases d’un antagonisme qui va accompagner toute l’histoire et ses à-côtés. Du moins c’est ce que l’on croit. Car si la réalisatrice semble dessiner une revisite du mythe d’Abel et Cain, elle va finir par perdre de vue ce fil narratif au fur et à mesure qu’elle en incorpore d’autres à son histoire. Une femme qui vient s’insérer entre le duo, son fils chétif qui va ébranler certaines destinées, le poids d’une ancienne amitié qui pèse… Et The Power of The Dog de se perdre dans son tourbillon en traitant de beaucoup de choses sans vraiment en creuser aucune jusqu’au bout.
Avec ce 8eme long-métrage, Jane Campion fait l’énième démonstration de tout son sens d’un superbe classicisme subjuguant. Difficile de résister à l’indéniable beauté qui habite les images de ce Power of The Dog, somptueuse fresque intimiste et psychologique dont chaque pas s’incarne dans les émotions qui tentent de dicter son parcours. Mais au fond, une petite ritournelle trotte dans la tête. Oui, le film est très beau. Belles images, belle photographie, belle musique, beaux décors… Mais est-ce vraiment suffisant pour en valider la qualité ? Une chose est sûre, sa prétendue densité repose sur des bases assez mouvantes et l’édifice paraît dès lors bien fragile, comme une luxueuse demeure construite sur un terrain meuble. On a la sensation qu’il s’en dégage puissance et pouvoir d’attraction mais finalement, à plat, le film semble bien plus creux et bancal qu’il n’y paraît. Car systématiquement, Jane Campion s’aventure sur des pistes intéressantes qu’elle finit par délaisser pour passer à une autre. On en vient à s’interroger sur ce que raconte vraiment The Power of The Dog et surtout sur la manière (ô combien maladroite) dont il le raconte. Il en subsiste des regrets, notamment de voir s’esquisser une tragédie intense mais qui trop souvent reste au stade de l’esquisse tant Campion gère mal les destinées et les embouts de ses multiples trames, si bien qu’elles ont du mal à s’emboîter correctement.
Par Nicolas Rieux