Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Dario Argento’s Dracula
Père : Dario Argento
Livret de famille : Rutger Hauer (Van Helsing), Marta Gastini (Mina), Asia Argento (Lucy), Miriam Giovanelli (Tania), Thomas Kretschmann (Dracula), Unax Ugalde (Jonathan Harker)…
Date de naissance : 2012
Nationalité : Italie, Espagne, France
Taille/Poids : 1h46 -10 millions €
Signes particuliers (+) : De quoi se rincer l’oeil gratuitement notamment pour les fans de la sulfureuse Asia Argento.
Signes particuliers (-) : Une purge nanardesque laide et insipide cumulant tous les défauts qu’il est possible de cumuler, des effets cheap au jeu chaotique des comédiens, de la mise en scène inexistante à l’ensemble manquant de crédibilité…
DRACULA A MAINTENANT UNE BONNE RAISON DE SE RETOURNER DANS SA TOMBE…
Résumé : Une nouvelle version de l’histoire du conte Dracula. Jonathan Harker décroche un poste de bibliothécaire dans un petit village des Carpathes auprès d’un mystérieux Conte Dracula. Il ne sait pas dans quoi il met le pieds, Dracula étant un vampire…
Il est des films où il n’est pas nécessaire de patienter bien longtemps pour se rendre compte que l’on est face à une purge. Dario Argento, qui fait son retour après le salement mauvais Giallo, n’aura eu besoin quant à lui que d’une poignée de secondes sur son nouveau film, une énième adaptation cinéma du Dracula de Bram Stocker. Mine de rien, ça fait quand même une paye que le cinéaste transalpin ne nous a pas offert quelque chose qui, sans être bon, serait au moins « visionnable ». Mais depuis son segment Jenifer pour l’anthologie des Masters of Horror en 2005 qui était plutôt correct, l’empereur du giallo italien enchaîne les sombres bouses inqualifiables et honteuses. Plus dramatique, on a vraiment l’impression qu’il le sait mais qu’il est impuissant face à cette descente aux enfers où l’inspiration l’a lâché depuis longtemps. Et malgré ses efforts, son combat contre la médiocrité, Argento ne s’en sort pas et coule à chaque film un peu plus dans les profondeurs de la nullité voire du risiblement pathétique. La baisse date de longtemps, au moins depuis Le Fantôme de l’Opéra en 1998. Mais tout a réellement commencé avec Card Player en 2004, à la limite du téléfilm allemand de dimanche après-midi. Puis La Terza Madre en 2007 où il s’efforçait de revenir à ses fondamentaux en bouclant sa trilogie des enfers. Un enfer justement. Et enfin Giallo en 2009, plus ambitieux et avec la star Adrian Brody associé à la française Emmanuelle Seigner. Tristement mauvais. L’annonce selon laquelle ce Dario Argento fatigué et à court de talent s’attaquait à Dracula avait de quoi faire trembler les fans sur place. Du moins ce qui croyaient encore à un possible retour du cinéaste, comme s’il restait dans ce tas de cendres, une braise encore chaude qui ne demandait qu’a être ravivée.
Allez savoir comment au vu de ces derniers tragiques exploits mais Argento réussit à convaincre pas mal d’investisseurs européens, chez lui en Italie mais aussi en France et en Espagne, et rassemble un assez colossal 10 millions d’euros pour matérialiser son projet en 3D. Bram Stocker va renaître et on espère de tout cœur pour le transalpin que le résultat sera plus proche du baroque film de Coppola que du comique nanardeux Dracula 2001 de Patrick Lussier. A 71 ans, Dario Argento se lance donc dans ce nouveau défi et se retrouve même à présenter son film en séance de minuit au prestigieux festival de Cannes. Étrange mais vrai. Sa fille, Asia, est également de la partie et joue dans le film tourné en langue anglaise. Premiers tremblements, les producteurs, qui ne sont autres que des mecs qui ont produit plusieurs films de Bruno Mattei, sacré roi des tâcherons en son pays. Les conditions ne sont vraiment pas bonnes…
Et donc voilà, une poignée de secondes aura suffi pour se faire une idée générale. Un générique d’ouverture d’une laideur sans nom qui pue le nanar de la fin des années 80 sous-produit et que l’on materait sur une poussiéreuse VHS. Il est soutenu par un score épouvantable à en faire saigner les oreilles signé Claudio Simonetti, un fidèle d’Argento depuis longtemps. Alors voilà, pour être clair, franc et direct : il n’y a rien à sauver de ce nouveau naufrage du maître italien. Dracula coule à pic à une vitesse éclair et il est impossible de le rattraper dans sa chute. De sa première à sa dernière minute, ce dernier exercice argentesque est l’illustration d’une tragédie cinéphilique. Ou comment un talentueux artistique a perdu l’inspiration magique à moins qu’il n’ait en réalité fait le tour de ce talent qu’il avait à disposition et dont il ne reste plus rien. Car ce n’est pas le Argento de Suspiria, de Inferno ou des Frissons de l’Angoisse qui œuvre devant nous, c’est pas possible. Dario Argento’s Dracula n’est qu’une succession de défauts plus ou moins graves, plus ou moins fatals, mais qui amènent à un triste constat que l’on imaginait pas vraiment il y a 10 ou 15 ans mais qui est bien réel aujourd’hui : ses films sont à ranger dans la catégorie « nanars infâmes » au même titre que ceux d’un si décrié Uwe Boll par exemple, voire pire. Sans doute pire, même.
Rien n’est crédible dans cette pâle version de Dracula qui est une atrocité visuelle hideuse et indigente. Même les gousses d’ail accrochées aux murs font fausses ou du moins, achetée le matin même au carrefour du coin. Faudrait presque vérifier s’ils ont pensé à enlever l’étiquette du « top prix promo » ! Plus sérieusement, la liste des fléaux qui accablent ce dernier ouvrage pourrait être longue mais si l’on se concentre sur les points importants, on retiendra essentiellement une image extrêmement laide, proche d’un rendu vidéo qui n’a rien de cinégénique, ce qui a vite faite d’handicaper considérablement un film mais à plus forte raison un film en costumes. La mise en scène est, elle, inexistante, seulement visible à de rares moments pour gommer le manque de moyens assez étrange du film. Assez étrange car avec 10 millions, même si ce n’est pas un budget de blockbuster, il y a mieux à faire que cet immense moment tragi-comique qui ne manque pas de faire éclater de rire quand les effets spéciaux entrent dans la partie. Une séquence de transformation loup/humain à se faire littéralement dessus, au rendu visuel ressemblant à s’y méprendre à un segment d’animation 3D pour la présentation d’un jeu vidéo. Ridicule. Reste le scénario éventuellement, puisque le livre à la base de l’histoire est un classique connu et reconnu. Mais là aussi… Déjà que l’on connaît le récit sur le bout des doigts pour l’avoir vu être adapté un trop grand nombre de fois au cinéma, en plus Argento n’y met vraiment pas du sien de son côté. Ils s’y sont mis à quatre quand même pour nous pondre cette purge linéaire qui se limite bêtement à un empilage de séquences les unes à la suite des autres sans aucune fluidité ou grâce pour que l’ensemble soit cohérent dans le rythme et la narration. Dracula est indigeste, enchaîne mécaniquement ses scènes sans aucune âme ni aucun liant pour faire ce que l’on appelle communément « un scénario » puis « un film ». Voilà, ils étaient quatre… dont un Président de club de foot (??!- Enrique Cerezo est le patron de l’Atlético de Madrid pour les footeux) et un gars qui n’a jamais œuvré que dans l’écriture de nanars de seconde zone. Les quatre de l’apocalypse en somme, qui viennent définitivement emporter le maître au royaume des « défunts » d’un illustre cinéma d’antan.
Entre les effets spéciaux d’une cheaperie comique et les comédiens qui jouent tous à l’unisson comme des poireaux, on est pas prêt de s’en sortir. Car il faut savoir, et c’est d’ailleurs fort ennuyeux, que la médiocrité est contagieuse. Première visée : Asia Argento, la fille à son papa, qui semble venir se perdre là-dedans pour rendre service mais qui transpire le catastrophique. Déjà qu’avec son accent, l’anglais, langue du tournage pour pouvoir le vendre à l’international, passe très moyennement, mais en prime, la belle est malheureusement ridicule dans la plupart de ses scènes, surjouant la moindre émotion comme au temps du muet ! Elle n’est pas la seule de toute manière à plonger dans le bouillon puisque l’ensemble du casting sombre dans le risible.
Il ne nous reste qu’à souhaiter bon courage à ceux qui par passion pour l’auteur, seront tentés de se lancer dans ce cauchemar qui multiplie sans vergogne les raccords de montage douteux, les effets sanglants peu utiles et surtout la nudité gratuite à des fins commerciales et de remplissage (mais ça, à la limite, on lui pardonne à Dario car on a pu au moins se mettre sous la dent en patientant que ça finisse, les visions d’une Asia Argento à poil comme d’habitude et qui ne bouge pas, toujours aussi sexy malgré les années et qui rivalise sans problème avec la fraîche et juvénile Miriam Giovanelli, sacrément bien balancée elle aussi). Et comme dirait Jean-Claude Dusse, je crois que là, ce cher Dario, on peut le considérer « comme définitivement perdu ». Dario Argento’s Dracula est une bouse, peut-être pas autant que ces derniers (Card Player, Giallo ou La Terza Madre) car le film essaie au moins dans l’esprit de se rapprocher d’un Fantôme de l’Opéra. Il est juste mauvais, reflet de la perdition dans laquelle est engluée un cinéaste auquel on parlera désormais au passé. Ah s’il pouvait nous re-pondre au minimum un Sang des Innocents, son dernier film potable en date… C’était en 2001. Il y a douze ans.
Bande-annonce :