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LA BELLE ET LA BÊTE de Christophe Gans
En salles – critique (conte)

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110035.jpg-r_640_600-b_1_D6D6D6-f_jpg-q_x-xxyxxMondo-mètre :
note 5
Carte d’identité :
Nom : La Belle et la Bête
Père : Christophe Gans
Livret de famille : Léa Seydoux (Belle), Vincent Cassel (La Bête), André Dussolier (le père), Edouardo Noriega (Perducas), Audrey Lamy (Anne), Sara Giraudeau (Clotilde), Jonathan Demurger (Jean-Baptiste), Nicolas Cob (Maxime), Louka Meliava (Tristan), Yvonne Catterfeld (la princesse)…
Date de naissance : 2013
Majorité au : 12 février 2014 (en salles)
Nationalité : France
Taille : 1h57
Poids : 33 millions $

Signes particuliers (+) : Les intentions étaient bonnes, les ambitions étaient là, certaines séquences impressionnent de beauté, l’ensemble nous replonge en enfance et le casting est délicieux avec une véritable belle opposé à un acteur au charisme de bête…

Signes particuliers (-) : Pourtant cette nouvelle adaptation sonne comme une fausse note. D’une direction artistique hasardeuse faisant écho à celle des comédiens, en passant par un manque d’âme évident, probablement noyée dans le déluge de fausses promesses technologiques ôtant à l’oeuvre toute dimension émotionnelle, cette version modernisée du conte est un semi-échec frustrant. Gans, que l’on a connu meilleur plasticien, se révèle mauvais conteur et son récit parsemé de trous et vide de souffle épico-romantique est anéanti par son obnubilation d’une esthétique flamboyante et féérique qui évacue la dimension humaine dans un spectacle synthétique étrange, parfois somptueux, parfois bien laid.

 

UN CONTE VERSION NUMÉRIQUE

LA CRITIQUE

Résumé : 1810. Après le naufrage de ses navires, un marchand ruiné doit s’exiler à la campagne avec ses six enfants. Parmi eux se trouve Belle, la plus jeune et la plus belle de ses filles. Lors d’un éprouvant voyage, le Marchand découvre le domaine magique de la Bête qui le condamne à mort pour lui avoir volé une rose après l’offrande d’une grande fortune. Se sentant responsable du terrible sort qui s’abat sur sa famille, Belle décide de se sacrifier à la place de son père. Au château de la Bête, ce n’est pas la mort qui l’attend mais une vie étrange, où se mêlent les instants de féerie, d’allégresse et de mélancolie. Chaque soir, à l’heure du dîner, la Belle et la Bête se retrouvent. Ils apprennent à se découvrir, à se dompter comme deux étrangers que tout oppose…la-belle-et-la-bete-photo-52cc3885ca027
L’INTRO :

Discret depuis 2006 et sa superbe transposition du jeu Silent Hill, le cinéaste au talent plastique indéniable Christopher Gans, se remet enfin d’une série de projets inachevés avec une nouvelle adaptation passionnée du célèbre conte La Belle et La Bête, paru en 1740 sous la plume de Gabrielle-Suzanne de Villeneuve. On a tous en tête le chef d’œuvre animé des studios Disney daté de 1991 ou, pour les plus cinéphiles, la merveilleuse version de Jean Cocteau sortie en 1946. S’il confesse une certaine pression exaltante à passer derrière ce dernier, Christophe Gans annonce néanmoins un film incroyable, un véritable défi repoussant des limites visuelles pour donner vie à un univers nouvellement créé et inédit. Après plus de trois ans de travail acharné, un script écrit à quatre mains avec l’écrivaine Sandra Vo Anh, et le concours de près de 600 infographistes, le père du Pacte des Loups livre enfin sa copie alors que le projet évoqué du côté d’Hollywood semble tombé à l’eau… Pour sa « Belle », le réalisateur en aura choisi une authentique avec la radieuse Léa Seydoux, dont le délicat visage se prête à merveille à l’incarnation d’une princesse de conte. Et pour la « Bête », son choix sera tout aussi logique avec le visage au charisme animal de Vincent Cassel. André Dussolier en paternel tendre, Audrey Lamy en sœur énervante ou encore l’espagnol Eduardo Noriega en méchant de service, sont quelques autres noms complétant la distribution d’un film ambitieux pour le cinéma français, et pas que pour son pharaonique budget de 33 millions €.

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L’AVIS

Si l’on craignait le pire après la découverte d’une bande-annonce qui laissait songeur sur le plan esthétique, affirmer que La belle et la Bête est un raté absolu serait excessif. Au moins autant que clamer qu’il n’est une magnifique réussite. Film de paradoxes, cette adaptation live nous plonge dans une forme de confusion, à la fois excité par ses qualités et ses intentions et dérangé par ses innombrables défauts. Christophe Gans essaie fièrement de conserver le caractère intemporel d’un conte magistral façonné avec tous les ingrédients propres au genre. Amour, drame, aventure, suspens, le tout sur fond de merveilleux, de malédiction, de dangers et de déchéance… sont autant d’épices offrant sa saveur à cette belle romance maudite exaltant des valeurs humaines fortes. Avec une volonté affichée d’ancrer son travail dans le féérique enivrant pur et dur et revenant aux sources mêmes du conte originel, Gans a su créer une œuvre qui se démarque tant du Disney que du Cocteau.

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Malheureusement, c’est bien connu, les intentions n’ont jamais suffi à elles-seules à faire un bon film. Et peut-être trop préoccupé par la plastique d’un film qu’il voulait « nouveau » et « inédit », le cinéaste est passé à côté de ce qui aurait dû être sa priorité. La Belle et la Bête version 2014 manque d’émotion, probablement noyée dans un film ultra-technologique qui finit par ne plus avoir grand-chose de réellement cinématographique. La direction artistique alterne le meilleur et le pire dans ce déluge d’effets digitaux qui présente le film comme une œuvre numérique essentiellement tournée sur fond vert et oubliant de vivre par et pour elle-même. Il ne reste finalement plus grand-chose d’authentique dans une version live où l’histoire comme les personnages sont évincés par une technique artificielle qui tour à tour rebute ou séduit. Si la plastique globale sonne trop exagérément fausse et synthétique, quelques séquences ne manquent pourtant pas d’émerveiller, à l’image d’un dernier tiers au-dessus du reste, avec une action qui s’emballe en atteignant son pic dramatique, avec ses géants de pierre somptueux, et avec l’illustration des révélations sur le passé de la Bête. Mais la direction artistique n’est pas la seule chose d’hasardeuse, la direction d’acteur lui emboîte le pas. On sent que le jeu des comédiens est calqué sur une tonalité de « conte » avec des intonations et une diction volontairement appuyées et surjouées. Mais ce choix périlleux a vite fait de devenir gênant et n’a pour résultat que de participer au manque de naturel d’un film qui sent trop le préfabriqué.

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A l’inverse d’un Guillermo Del Toro ou d’un Hayao Miyazaki, deux références évidentes et citées par son auteur, l’un pour son sens aigu de la mise en image d’un imaginaire, l’autre pour sa poésie et les ressentis qui transpirent de ses images et du fond qui les nourrit, La Belle et la Bête ne parvient que trop rarement à conjuguer démonstration esthétique et supplément d’âme. Ressassant un conte que l’on ne connaît que trop bien et qui n’a, dès lors, pas grand-chose à nous proposer de plus au niveau narratif, Christophe Gans a tout misé sur les prouesses mais se révèle aussi mauvais conteur d’histoire qu’il peut-être brillant génie visuel. Son blockbuster échoue alors dans sa quête de souffle épico-romantique, amputé de son essence émotionnelle et d’une vision transcendant sa mince histoire rognée dans son étoffe et abandonnée à une surenchère digitale qui ne comble pas ses carences.

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La Belle et la Bête est à l’arrivée une semi-déception attendue, un film à mi-chemin entre l’enchantement et la laideur. Gans n’a pas su traduire les ambitions qui l’animait et pire, n’a pas su restitué la magie de son récit bien mal écrit et aux finitions grossières au point de rendre son évolution nonsensique. On est replongé en enfance par une histoire féerique et dans le temps, notre regard d’adulte rend les trop nombreuses fausses notes grinçantes. A qui est destiné le film du coup ? Aux adultes ? Pas sûr que le manque de puissance ne les transporte au-delà l’artificialité insipide de la chose. Aux plus jeunes ? Pas évident non plus, d’autant que le film marche en équilibre entre naïveté enfantine et dérives vers un ton plus sombrement adulte. Personne ne semble finalement trouver son compte dans cette affaire « royale » mais maladroite et définitivement creuse dans son écriture comme dans son fond.

Bande-annonce :

Par Nicolas Rieux

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