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PINOCCHIO de Guillermo del Toro : la critique du film

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Nom : Guillermo Del Toro’s Pinocchio
Père : Guillermo del Toro
Majorité : 09 décembre 2022
Type : sortie sur Netflix
Nationalité : USA
Taille : 1h57 / Poids : NC
Genre : Fantastique, Aventure

Livret de Famille : Avec les voix de Gregory MannEwan McGregorRon Perlman…

Signes particuliers : La meilleure de toutes les adaptations récentes du conte de Collodi.

Synopsis : Le réalisateur Guillermo del Toro, primé aux Oscars, revisite le conte de Carlo Collodi sur une marionnette qui, comme par magie, prend vie pour apaiser le cœur d’un sculpteur sur bois du nom de Geppetto. Cette épopée musicale et fantastique en stop-motion réalisée par Guillermo del Toro et Mark Gustafson suit les aventures de l’espiègle et désobéissant Pinocchio qui cherche sa place dans le monde.

 

DEL TORO REDONNE VIE AU PANTIN DE BOIS

NOTRE AVIS SUR PINOCCHIO

Et de trois. Après le Pinocchio de Matteo Garrone en 2019 puis celui de Robert Zemeckis il y a quelques mois, c’est au tour de Guillermo del Toro de s’emparer du célèbre conte de Collodi pour donner sa vision de l’histoire du pantin de bois rêvant de devenir un vrai petit garçon. Et le cinéaste mexicain de réussir à livrer une version encore différente de celles de ses récents prédécesseurs, une version qui épouse totalement son univers et son imaginaire de toujours. Matteo Garrone avait opté pour une vision très sombre, très adulte, indéniablement trop violente pour un public enfantin. Sage comme une image, Zemeckis, lui, avait donné dans le pur conte filmé, sans grande réussite tant son film était d’une platitude effarante. Del Toro est allé chercher un entre-deux avec un film étrangement dur et enfantin à la fois, constamment balancé entre profonde mélancolie et humanisme lumineux. Autre divergence, Garrone et Zemeckis avaient choisi l’illustration en prise de vue réelle. Del Toro, lui, revient à l’animation avec un long-métrage en stop motion, mettant pour le coup vraiment à l’honneur le principe des « marionnettes ». Un choix esthétique d’une logique imparable.

C’est à quatre mains que ce nouveau Pinocchio s’est fait. Si l’on parle communément du « film de Guillermo Del Toro », c’est à en oublier que le cinéaste s’est allié à Mark Gustafson pour mettre le film en images. Un spécialiste de l’animation qui avait notamment travaillé sur le Fantastic Mr. Fox de Wes Anderson. Ensemble, le duo a créé un film qui tutoie souvent la beauté et le génie, seulement freiné dans son envolé par un côté un peu « gueulard » qui, dans un mauvais jour, pourra en épuiser quelques-uns. En effet, ce Pinocchio est souvent bruyant, avec des personnages qui crient plus qu’ils ne parlent, au point de fatiguer sur la longueur. D’autant que le morceau s’étire sur 2 heures bien sonnées. Néanmoins, le ravissement est quasi total.

Visuellement d’abord, Del Toro et Gustafson signent une petite merveille dont la finesse du formalisme traverse les évidences pour aller pénétrer en profondeur un souci du détail permanent. Esthétiquement, Pinocchio est très stimulant, très inventif, affichant cette boulimie cinématographique chère à un Del Toro qui n’a jamais manqué de courage pour essayer des choses. La matérialisation imagée de l’univers, la qualité du stop motion, le souci de l’image (la photo notamment, sublime), certaines audaces comme le parti pris de représenter le grillon Cricket tel un véritable insecte (loin de la vision Disney)… Pinocchio n’a de cesse d’enchanter, d’émouvoir, et parfois de terrifier un peu à l’aide d’un formalisme toujours en adéquation avec l’histoire. Une histoire qui, en effet, traverse de multiples visages et émotions.

On le disait, Del Toro s’est placé dans un entre-deux. Son Pinocchio s’adresse t-il aux enfants ? Tout dépend des enfants dira t-on. Clairement plus que le Matteo Garrone à la radicalité excluante. Mais moins que le Zemeckis avec Tom Hanks et bien sûr que le classique Disney. C’est l’une des étrangetés de l’œuvre de Del Toro et Gustafson. Leur Pinocchio épouse différents visages selon qu’il parle de la douleur du deuil, de la parentalité, de la violence du monde des adultes, de l’envie de vivre, d’acceptation de la différence, de la stupidité de la guerre, selon qu’il soit tragique, drôle, amer, féerique, effrayant ou aventureux. Oui, cette re-création est stimulante visuellement mais elle l’est aussi dans sa densité et son intensité narrative. Del Toro et Gustafson décortique le mythe de Pinocchio, le repose à plat, et tente d’en faire quelque chose qui va au-delà du simple conte où le merveilleux répondrait à la naïveté. Situant son histoire au beau milieu de la deuxième guerre mondiale, le tandem entremêle regard sur la différence et fascisme dans une Italie troublée. L’occasion de faire quelque chose de plus substantiel sur cette idée d’un Pinocchio en tant qu’enfant différent des autres et victime de sa différence. Mais ce discours teinté de cruauté ne se replie pas sur une noirceur terrifiante. Parce que le film est animé par des émotions allant de l’espoir à la joie indéfectible, en passant par une profonde humanité existentielle.

Pinocchio est un film complexe, une entreprise parfois difficile qui conjugue un peu toute l’œuvre de Del Toro (on pense souvent à Freaks Out, le petit bijou de Gabriele Mainetti que beaucoup avait comparé à du Del Toro) en cela que l’on y retrouve tout son sel agrémenté de sa néo-maturité. Il s’en dégage un jeu de contraste passionnant, une noirceur éclairée, une humanité torturée, une sagesse bouillonnante. Et au final, à tête reposée quand on prend le temps d’en digérer l’effet de trop-plein, reste une œuvre follement excitante.

Par Nicolas Rieux

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