Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : L’Odyssée
Père : Jérôme Salle
Date de naissance : 2015
Majorité : 12 octobre 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : France
Taille : 2h00 / Poids : 30 M€
Genre : Biopic, Drame, Aventure
Livret de famille : Lambert Wilson, Pierre Niney, Audrey Tautou, Benjamin Lavernhe, Vincent Heneine…
Signes particuliers : Biopic du Commandant Cousteau, grand film d’aventure, magnifique drame familial, L’Odyssée est tout ça à la fois, et un petit chef d’œuvre au passage.
LE GRAND VOYAGE DU COMMANDANT
LA CRITIQUE DE L’ODYSSÉE
Résumé : 1948. Jacques-Yves Cousteau, sa femme et ses deux fils, vivent au paradis, dans une jolie maison surplombant la mer Méditerranée. Mais Cousteau ne rêve que d’aventure. Grâce à son invention, un scaphandre autonome qui permet de respirer sous l’eau, il a découvert un nouveau monde. Désormais, ce monde, il veut l’explorer. Et pour ça, il est prêt à tout sacrifier. Dans le paysage du cinéma français actuel souvent à la recherche de talents capables de le réveiller de sa léthargie ambiante, Jérôme Salle fait office de cinéaste discret mais redoutablement intéressant. Malgré des résultats parfois en demi-teinte (on pense aux Largo Winch), on ne pourra lui enlever la noblesse de tenter des choses, en plus d’afficher un savoir-faire indéniable. Le metteur en scène, qui reste sur son meilleur film à ce jour avec le fascinant Zulu emmené par Forest Whitaker et Orlando Bloom, fait son grand retour cet automne avec l’un des projets les plus alléchants du deuxième semestre côté grosses productions hexagonales. En adaptant une portion de la vie du célèbre Commandant Cousteau, avec le parti pris de s’attarder plus particulièrement sur ses relations conflictuelles avec son entourage proche, notamment son fils Philippe, Jérôme Salle entendait livrer plus qu’un biopic. C’est chose faite, L’Odyssée déborde de l’étroitesse de son carcan piégeur, pour proposer à la fois, un immense film d’aventure, un magnifique portrait d’hommes, un poignant drame filial, un plaidoyer écologique fort, un regard amoureux et passionnant sur la nature de notre belle planète, et même une romance bouleversante à travers les âges.Avec le très attendu L’Odyssée, Jérôme Salle réussit son entreprise sur toute la ligne, signant l’un des plus beaux films de cette année 2016, l’un des plus ambitieux aussi pour le cinéma français, et à n’en pas douter, l’un des meilleurs biopic que l’on ait pu voir depuis longtemps. A tel point que l’on ne saurait même pas par où commencer pour le couvrir d’éloges, à la hauteur de ce qu’il mérite. Ayant réuni une distribution dont le prestige rivalise avec la somme des talents en présence (un immense Lambert Wilson, un fabuleux Pierre Niney, une grande Audrey Tautou et un formidable Benjamin Lavernhe), Jérôme Salle s’est lancé dans une production dont le gigantisme étonne au regard de son budget finalement modeste compte tenu des ambitions affichées. 30 millions d’euros, c’est à la fois peu et beaucoup. C’est beaucoup comparé aux films les plus fragiles, et c’est peu car L’Odyssée a tout de la superproduction américaine des grands soirs. Avec la qualité au rendez-vous de cet effort-fleuve tourné aux quatre coins du monde, dans la difficulté et soigneusement préparé depuis plus de quatre ans. Mais pour quel résultat !
L’Odyssée peut se vanter de tellement de choses. A commencer par ses images littéralement sublimes et subjuguantes, laissant briller à l’écran toute la beauté de notre planète bleue. Des images capturées avec soin et talent, profitant d’une photographie admirable, d’une mise en scène amplifiante et créative, et portées par une B.O. composée par un Alexandre Desplat qui continue de prouver qu’il est l’un des meilleurs dans son domaine, à l’heure actuelle. Mais alors que la reconstitution d’époque de ce drame d’aventure étalé sur plus de 30 ans impressionne de minutie, L’Odyssée continue de resplendir au-delà de sa seule réussite formelle. Car en définitive, le meilleur visage du film de Jérôme Salle, est de parvenir de manière absolument virtuose, à conjuguer beauté renversante et profondeur de son sujet.En portant à l’écran la vie du Commandant Cousteau, Jérôme Salle avait à sa disposition un matériau propice aux plus grandes histoires de cinéma, à savoir un personnage central fort, dont les nombreuses nuances avaient de quoi nourrir un récit riche en substance et fondé sur une direction narrative évolutive. Les meilleures histoires sont souvent celles qui reposent sur des héros/anti-héros arborant plusieurs facettes. Cousteau, par ses multiples visages, avait ce potentiel dramatique, et Salle a su l’exploiter formidablement bien, avec une intelligence de chaque instant qui lui permet d’incarner sans cesse son récit, dont on se délecte sans jamais être en mesure de décrocher un seul instant de cette épopée captivante. Il y avait ce Cousteau grand aventurier charismatique des temps modernes, désireux d’explorer le monde et d’aller à la rencontre de ses trésors. Il y avait aussi ce même Cousteau, dont les ambitions ont fini par le dévorer de l’intérieur. Une phrase dit tout. « Au départ, je voulais explorer le monde. Puis mon erreur aura été de vouloir le conquérir« . Une simple phrase qui résumerait presque tout le Commandant, et tout L’Odyssée au passage, histoire d’un homme animé de bonnes intentions mais qui a dérivé vers le côté sombre de sa passion, au point d’en tutoyer une certaine folie née d’un excès d’enivrement.Mais parce que les meilleurs biopic sont ceux qui parviennent à se dénicher un angle d’approche pour donner de la pertinence et de la résonance à leur proposition, de sorte à dépasser le simple récit didactique, Jérôme Salle aura bien pris soin de réfléchir au sien. Et il a fini par le trouver. L’Odyssée articule son histoire au souffle romanesque dévastateur, autour d’une relation père-fils entre conflit et rédemption, dont l’indéniable pouvoir émotionnel lui permet d’incarner avec elle, toute la palette des graduations de son protagoniste phare. Ne cherchant pas à esquiver les questions qui fâchent pour ne pas tomber dans l’hommage sans discernement et trop favorable à son sujet, Jérôme Salle livre un portrait sans fard du fameux Commandant au bonnet rouge, tout à tour attachant ou détestable, généreux ou égoïste, lucide ou aveuglé, héroïque ou destructeur, alors que ses bonnes actions comme ses erreurs se retrouvent judicieusement abordées dans un long-métrage au propos captivant, à la fois sur l’homme, sa nature, et la nature elle-même. A travers lui, il est question de notions de bien ou de mal, de passion noble et d’égo dévorant, d’intentions louables et de péché d’orgueil, d’entreprise homérique et de soumission aux diktats et on en passe… Comme ce Cousteau trop dans le contrôle de son image, ce Cousteau au détachement émotionnel tragique pour les siens, ou ce Cousteau homme de profit. Mais derrière ces défauts, il y a aussi l’aventure intérieure d’un homme passé de la lumière à l’ombre, avant de retrouver cette flamme étincelante qui illuminera son combat. Car en plus d’être captivant de bout en bout, L’Odyssée est d’une extrême justesse historique, à tel point que l’on retrouve même des plans reproduits presque à l’identique par rapport à la série documentaire L’Odyssée sous-marine de l’équipe Cousteau, même si quelques petits détails sont omis ici et là, dans le travail de condensation d’une partie de vie tellement riche.L’Odyssée voit aussi grand que son sujet et ce qu’il montre du monde, dans une démarche d’illustration épique subtilement pensée et dosée. Et c’est épris jusqu’au cœur et aux tripes que l’on voyage sur les mers, que l’on voyage dans l’histoire de la Calypso, de ses hommes et de sa seule femme, de cette famille incroyable, que l’on voyage dans la relation entre l’homme et son environnement, alors que séquences et plans extrêmement forts viennent graver le film dans la liste des pamphlets férocement et brillamment engagés pour l’écologie. Beau à en crever, émotionnellement vibrant, narrativement intelligent, et d’une inventivité permanente dans sa mise en scène (avec en bonus, un furtif et anecdotique clin d’œil jubilatoire au Dents de la Mer de Spielberg), L’Odyssée est un pur régal. Plus qu’un biopic, un vrai film d’aventure à hauteur d’hommes, associant l’intime et le spectacle, la tragédie et l’exaltation des sens et de l’esprit. On n’est pas prêt d’oublier ce voyage hors normes proposé par un Jérôme Salle au diapason de son sujet. L’Odyssée s’élève très haut dans le ciel du cinéma français et parvient à se servir du registre du biopic pour proposer beaucoup de choses en deux heures de film. Quand le sens du spectacle est au service de quelque-chose de fort, il n’y a vraiment pas à dire, le cinéma devient vraiment un art formidable, vecteur d’émotions magnifiques. L’Odyssée est tout simplement étourdissant et on souhaite à cette Calypso cinématographique de voguer vers le succès car elle réunit tous les ingrédients pour emporter, séduire et instruire, en plus de bouleverser et d’afficher une magnificence dont on se délecte sans commune mesure. For-mi-da-ble.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux
J’ai eu la chance de patager la vie de l’équipe pendant 7 ans.j’ai beaucoup aimé lefilm de Jérôme Salle et le travail des artistes. Ils ont su, avec des moyens limités, retraduie une ambiance, un etat d’esprit, etnous faire revivre de si beaux souvenirs. Merci à tous