A l’occasion de leur venue à Paris pour le formidable La La Land (le 25 janvier au cinéma), nous avons rencontré Emma Stone, Ryan Gosling et le réalisateur Damien Chazelle, pour le compte de Mardi Cinéma l’hebdo sur France 2. Entretiens…
Notre chronique de La La Land.
Tout d’abord, félicitations pour votre Golden Gobes et votre prix d’interprétation à Venise ! Prochaine étape, l’Oscar…
Emma Stone : Vous êtes au courant d’un truc que je ne sais pas ? (rires)
Non, mais on croise les doigts pour vous.
Emma Stone : Merci ! (en français)
Dans La La Land, vous dansez, vous chantez… La préparation a été intense, non ?
Emma Stone : Elle l’a été ! Elle a duré trois mois. Le processus de préparation a été plus long sur ce film, que pour n’importe quel autre film que j’ai pu faire par le passé. Je n’avais jamais passé autant de temps sur un film, à vrai dire. Mais c’était génial. C’était tellement extraordinaire d’apprendre à faire toutes ces choses, que je n’avais jamais eu l’occasion d’apprendre pour un film avant. On avait une super chorégraphe, Mandy Moore, qui a été très patiente avec nous. Elle arrivait à rendre fun, chaque jour de travail. On a appris les claquettes, la danse de salon… J’avais aussi un professeur de chant et Ryan Gosling avait un professeur de piano. C’était vraiment fantastique.
Vous aimiez les comédies musicales avant de faire le film ?
Emma Stone : Disons que j’aimais beaucoup Chantons sous la pluie et Un Américain à Paris. Après, il a fallu que je regarde plein de films que Damien Chazelle nous a conseillés, les films qui lui ont servi d’inspiration. Mais oui, je suis fan de comédies musicales.
C’est la troisième que vous tournez avec Ryan Gosling. Vous formez un super duo tous les deux, un peu comme ces anciens duos de l’âge d’or d’Hollywood. Vous pouvez nous parler de votre collaboration ?
Emma Stone : C’est tellement génial de travailler avec Ryan Gosling, vous n’avez pas idée. Il rend toujours tout plus facile et plus fun.
Vous avez fait de la danse par le passé. Du coup, le film était-il quand même un gros challenge pour vous ?
Emma Stone : Oh oui ! Disons que je n’avais jamais fait de danse de salon ou de claquettes. Donc apprendre tout cela a été un challenge. Mais le plus gros challenge, ce fut d’apprendre à chanter. Non parce que… ma voix quoi… (en faisant la grimace avant de rire). Chanter a vraiment été la chose la plus terrifiante, plus que la danse. Mais j’ai beaucoup aimé faire ces choses, ça faisait partie de la beauté de cette expérience. C’était excitant.
On a évoqué la longue préparation que vous avez suivi pour apprendre à chanter et à danser. Qu’est-ce que cela fait quand on découvre le résultat final sur le plateau et qu’on voit la magie de ce pourquoi on a tant travaillé ?
Emma Stone : C’est tellement gratifiant. C’est fabuleux quand vous avez travaillé longtemps sur quelque chose, et que vous le faites enfin pour de vrai. Une fois que c’est fait et que vous découvrez le « produit fini », c’est vraiment spécial. On a beaucoup de pression en amont et d’un coup, tout devient magique. C’est vraiment quelque chose de formidable.
Et le résultat dégage quelque chose de vraiment exaltant. Aux États-Unis, vous avez ce terme de « feel good movie ». Quand on vous voit à l’écran, votre charme, votre énergie, votre dynamisme de jeu, que ce soit dans Crazy Stupid Love, Easy Girl ou La La Land… Vous faites l’effet d’une « feel good girl » !
Emma Stone : (rires) Je prends avec plaisir !
Tout d’abord, félicitations pour votre Golden Globes ! L’Oscar maintenant ?
Ryan Gosling : Une chose à la fois ! (rires)
Vous aviez refusé la nouvelle adaptation de La Belle et la Bête pour tourner dans La La Land. Qu’est-ce qui vous a tant motivé à faire cette comédie musicale de Damien Chazelle ?
Ryan Gosling : Il y avait beaucoup de raisons. Déjà, j’adore les comédies musicales des années 50. Je pensais que c’était un style de films qui appartenait au passé et quand j’ai eu l’opportunité d’en faire une, j’ai foncé. J’étais très excité par l’idée. Les musiques sont magnifiques dans La La Land, j’avais l’opportunité de retravailler avec Emma Stone, et Damien Chazelle avait un tel enthousiasme avec ce film… Il m’a parlé de son envie de faire un film que les gens auraient envie d’aller voir au cinéma, que les gens auraient envie de voir et de revoir, son envie de créer une expérience collective. Tout cela rendait le challenge vraiment excitant.
Vous évoquiez Emma Stone, c’est la troisième fois que vous vous retrouvez pour un film. Il y a une alchimie vraiment particulière entre vous, à l’écran.
Ryan Gosling : Oui, on a été chanceux de se trouver. Pour Crazy Stupid Love, lors de notre première audition ensemble, le réalisateur nous avait demandé d’improviser et ça a fonctionné tout de suite. C’est une chance quand vous êtes avec quelqu’un et que vous arrivez à improviser facilement. Il n’y avait pas de temps morts. Ça avait collé dès notre première rencontre.
Vous avez impressionné beaucoup de gens sur La La Land, en apprenant à jouer du piano en six mois seulement !
Ryan Gosling : Trois mois, en fait ! J’aurai aimé avoir six mois ! J’ai toujours rêvé d’apprendre à jouer du piano. C’est l’une des belles choses de ce métier, vous avez la possibilité de vous poser pour apprendre des choses dont vous avez toujours rêvé. Mais Damien Chazelle voulait aussi filmer les scènes musicales en une seule prise, souvent en plan-séquence. Donc ce n’était pas possible de couper pour me remplacer par une doublure qui sache jouer. Du coup, je n’avais pas trop le choix !
Dans le film, vous dansez, vous chantez, vous jouez du piano… La préparation a été intense. Comment avez-vous vécu les moments où tout votre travail devenait réalité sur le tournage ?
Ryan Gosling : C’était quelque chose d’unique. Une expérience vraiment magique. Tous les départements, production designer, caméramans, chorégraphes, musiciens etc… ont bossé ensemble pour créer ces scènes filmées d’une seule traite, où tous éléments se réunissaient. On a beaucoup travaillé en amont et quand tout prenait vie à l’instant T sur le tournage, il y avait ce sentiment d’accomplissement vraiment fantastique.
Quelle est votre comédie musicale préférée ?
Ryan Gosling : Je dirai Chantons sous la pluie, Un Américain à Paris aussi. J’aime aussi les musicals de Busby Berkeley et Coup de Cœur de Francis Ford Coppola, qui est un film très créatif. Dans La La Land, on expérimente beaucoup de choses aussi, derrière le masque d’un film pop corn. Il y a le meilleur de ces deux univers. C’est une expérience que vous ne pouvez avoir qu’au cinéma. J’ai vraiment compris l’envie de Damien Chazelle de ramener les gens vers les salles de cinéma. C’était le genre parfait pour cela.
Et c’est un super feel good movie !
Ryan Gosling : Oui, il provoque un effet assez chouette. Quand je l’ai vu pour la première fois à Toronto, en sortant, il y avait des gens qui dansaient dans la rue. C’est formidable quand même !
Vous avez conscience qu’en tant que metteur en scène, vous prenez un chemin très dangereux ? Vous avez fait deux chefs-d’œuvre en deux films. Ça met la barre très haute pour la suite !
Damien Chazelle : Merci, c’est très gentil. Je voulais juste faire des films que je voulais voir en tant que spectateur. Ça commence toujours de manière personnelle. Pour Whiplash, c’était quelque chose que j’avais envie de voir moi-même. Et La La Land, c’est la même chose. On ne sait jamais si un film va être une réussite ou un échec, mais on peut au moins savoir si c’est personnel, si c’est quelque chose d’important pour soi-même.
Je sais que vous aimé les comédies musicales, on en avait parlé il y a deux ans quand on s’était rencontré pour Whiplash. Quelles sont celles qui vous ont directement inspiré pour faire La La Land ?
Damien Chazelle : Surtout Jacques Demy. Les Parapluies de Cherbourg, Les Demoiselles de Rochefort, Lola… Les films de Jacques Demy avec Michel Legrand, plus précisément. Ce partenariat a été très inspirant pour moi. J’ai rencontré mon composteur, Justin Hurwitz, il y a douze ans à l’Université, et je lui ai montré Les Parapluies de Cherbourg. Lui-aussi est tombé amoureux de ce film et de la musique de Michel Legrand. Mais aussi, je me suis inspiré des films hollywoodiens des années 30 et 40 avec Gene Kelly ou Fred Astaire, des films des années 50 également, comme ceux de Douglas Sirk et tous ces films en Technicolor avec des couleurs primaires très vives, très romantiques.
Et vous avez été très chanceux de tomber sur le duo Emma Stone et Ryan Gosling, qui se sont beaucoup investis.
Damien Chazelle : C’était merveilleux pour moi. Il le fallait. On ne peut pas faire un film comme ça en claquant des doigts. Je ne voulais pas des acteurs spécialisés dans les comédies musicales. Je voulais que ce soit une surprise, quelque chose de nouveau. Voir Ryan et Emma dans un film comme ça, il y a une sensation de nouveauté. Ils voulaient le faire tous les deux et ils savaient que ça demanderait beaucoup de travail. Ils ont commencé à apprendre la danse, les chansons, le piano pour Ryan. Chaque jour, pendant des mois, ils ont bossé tout ça. Mais pas seulement, on travaillait aussi les dialogues, l’histoire, les personnages, les émotions… C’était un processus merveilleux, très collaboratif. Et le tournage s’est passé de la même manière.
Techniquement, tout le film est incroyable, mais il y a surtout cette scène incroyable de l’autoroute. Tout le monde doit vous en parler. Comment vous vous y êtes pris pour filmer ce passage absolument dingue ?
Damien Chazelle : J’ai eu de la chance de travailler avec une super équipe, à commencer par mon chef opérateur qui est suédois. Il est jeune mais c’est déjà un maître de la caméra. Et il y avait Mandy Moore, la chorégraphe. Pour l’ouverture, c’était important pour moi de faire du « vrai », pas une scène tournée en studio avec des effets spéciaux. Je voulais que ça soit dehors, avec de vraies voitures, de vrais danseurs. Ce n’était pas facile mais on l’a fait sur un weekend, dans Los Angeles, en plein centre-ville. On l’a tourné avec une seule caméra, en plan-séquence, avec une centaine de voitures et de danseurs. Il a fallu être très organisé, ça a demandé beaucoup de préparation, mais c’était une expérience vraiment unique. Bref, c’était génial quoi !
Propos recueillis et traduits par Nicolas Rieux