Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Race
Père : Stephen Hopkins
Date de naissance : 2016
Majorité : 27 juillet 2016
Type : Sortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h53 / Poids : NC
Genre : Drame, biopic
Livret de famille : Stephan James, Jason Sudeikis, Eli Goree, Carice van Houten, Shanice Banton, Jeremy Irons, William Hurt…
Signes particuliers : A l’approche des J.O. de Rio, le cinéma s’empare d’un épisode de l’histoire des Jeux, entre tensions et magie du sport.
VOYAGE DANS L’HISTOIRE DU SPORT
LA CRITIQUE DE LA COULEUR DE LA VICTOIRE
Résumé : Dans les années 30, Jesse Owens, jeune afro-américain issu du milieu populaire, se prépare à concourir aux Jeux d’été de 1936 à Berlin. Cependant, alors qu’Owens lutte dans sa vie personnelle contre le racisme ambiant, les Etats-Unis ne sont pas encore certains de participer à ces Jeux, organisés en Allemagne nazie. Le débat est vif entre le président du Comité Olympique Jeremiah Mahoney et le grand industriel Avery Brundage. Pourtant, la détermination de Jesse à se lancer dans la compétition est intacte…Faiseur capable du meilleur comme du pire (d’un côté, les sympas Blow Away ou L’Ombre et la Proie, de l’autre, les médiocres Freddy 5 ou Perdus dans l’espace), Stephen Hopkins avait un peu disparu des écrans ces dernières années. Depuis le début des années 2000, le cinéaste a connu une carrière en pointillé, partagée entre la télévision (24 heures Chrono et Californication) et le cinéma, où il n’a fait que deux apparitions, avec le cannois Moi, Peter Sellers en 2004 puis avec Les Châtiments en 2007. Neuf ans après ce dernier long-métrage en date, Hopkins fait son retour et porte à l’écran l’histoire de Jesse Owens, champion d’athlétisme qui avait brillé aux controversés Jeux Olympiques de Berlin en 1936, dans un contexte ô combien particulier, avec l’avènement inquiétant du nazisme, les ambitions propagandistes hitlériennes et la menace de boycott de la manifestation par le comité américain. Au milieu de ce maelström géopolitique, l’afro-américain Jesse Owens représentait les meilleures chances de victoire yankee du côté de l’Allemagne fasciste. Ses exploits auront dû affronter, d’une part, la haine raciale dans son pays ségrégationniste, et d’autre part, la vision aryenne du régime nazi, peu enclin à voir débarquer sur son sol, des athlètes noirs ou juifs.Biopic tout ce qu’il y a de plus académique dans sa confection, comprenez par là qu’il ne marquera sans doute pas le genre malgré sa facture classique de bonne tenue, La Couleur de la Victoire parvient à exister et à tirer son épingle du jeu grâce à l’histoire méconnue qu’il relate, grâce à certaines thématiques qu’il parvient à apposer en fond de toile, notamment sur les liens coercitifs entre le sport, la politique et les médias, et enfin grâce aux belles valeurs qu’il s’applique à mettre en avant, valeurs qui finissent d’ailleurs par prendre le pas sur l’histoire en elle-même. Plongeant dans l’Amérique et l’Allemagne des années 30, fort d’une reconstitution historique soignée, Stephen Hopkins conte un bel épisode sportif entre dépassement de soi, racisme, tensions politiques et symbolisme. Avec adresse et fluidité, le metteur en scène assemble le récit de ce gamin de famille modeste monté sur le toit du monde sportif à la force de son talent, la complexité de son histoire écartelée entre reconnaissance et racisme ségrégationniste, le contexte géopolitique tendu de l’avant-guerre, la beauté des valeurs du sport parfois oubliées, ou encore la touchante solidarité de ses acteurs.Proprement exécuté et suffisamment didactique pour embarquer le spectateur dans son récit humaniste, La Couleur de la Victoire ne trouvera ses limites que dans son manque d’inspiration générale, et dans certaines contre-vérités qu’il illustre sans faire la part des choses entre la réalité et la légende, pour mieux servir le spectacle qu’il entend proposer au risque de s’effondrer dans sa crédibilité. A titre d’exemple, on pourra évoquer le traitement généreux accordé à la réalisatrice propagandiste Leni Riefenstahl (formidable Carice van Houten), les fausses affirmations de déni d’Hitler à l’encontre du sportif noir ou encore l’amitié entre Jesse Owens et son adversaire aryen, Luz Long, qu’Hopkins aborde selon le travestissement enrobé de légende et non selon la réalité avouée des années plus tard. Ainsi, contrairement à ce que montre La Couleur de la Victoire, Hitler n’aurait jamais refusé de serrer la main de l’athlète, à l’inverse d’un Roosevelt qui ne l’aura jamais félicité pour ses exploits. Contrairement à ce que montre le film, Luz Long ne l’aura jamais aidé sur les pistes d’athlétisme alors qu’il était en difficulté, l’histoire ayant été embellie par Jesse Owens pour teinter de beauté, l’amitié qu’il avait développée avec son ami… Autant de petites « trahisons » qui permettent surtout au film, de rester sur un niveau de lecture plus consensuel.
Au final, on retiendra surtout de cet effort, partagé entre le louable et la crédibilité égratignée par la volonté de sur-orchestrer son propos un brin lénifiant, un film agréable, à la fois divertissant et intéressant, plus sincère dans les idéaux qu’il entend mettre en exergue, que dans la démarche qui régit son illustration. Porté par une distribution de qualité (dont un excellent Barnaby Metschurat dans le rôle difficile de Goebbels) et une narration efficace, La Couleur de la Victoire se suit avec plaisir.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux