Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Grave
Mère : Julia Ducournau
Date de naissance : 2016
Majorité : 15 mars 2017
Type : Sortie en salles
Nationalité : France, Belgique
Taille : 1h38 / Poids : NC
Genre : Horreur, Drame
Livret de famille : Garance Marillier, Ella Rumpf, Rabah Naït Oufella, Laurent Lucas, Joana Preiss, Bouli Lanners…
Signes particuliers : Le film choc de l’année.
L’HORREUR À L’ÉTAT PUR
LA CRITIQUE DE GRAVE
Résumé : Dans la famille de Justine tout le monde est vétérinaire et végétarien. À 16 ans, elle est une adolescente surdouée sur le point d’intégrer l’école véto où sa sœur ainée est également élève. Mais, à peine installés, le bizutage commence pour les premières années. On force Justine à manger de la viande crue. C’est la première fois de sa vie. Les conséquences ne se font pas attendre. Justine découvre sa vraie nature.
Attention, film choc à l’horizon ! Avec son furieusement déviant Grave, la jeune réalisatrice Julia Ducournau a fait couler beaucoup d’encre. Son premier long-métrage est une œuvre sans concessions, qui s’est payée des avis très tranchés dans tous les festivals où il a été montré. La Semaine de la Critique à Cannes, le PIFFF à Paris, le festival International de Sitges, le festival du film fantastique de Strasbourg… Partout où il est passé, Grave a laissé une trace indélébile, avec un sommet atteint au TIFF de Toronto, où il a provoqué plusieurs malaises dans la salle. De quoi forger un peu plus sa légende.
Tobe Hooper disait un jour, ne pas voir l’intérêt des plans gores visant à dégoûter le spectateur, car le but d’une séance, est que ledit spectateur regarde l’écran, pas qu’il détourne le regard. Une philosophie balayée par Grave, qui pousse au contraire son audience dans ses plus profonds retranchements. Avec ce petit monument « intimiste-ment » hardcore, Julia Ducournau signe l’un des films de genre les plus difficiles vus ces dernières années sur un écran de cinéma. Grave est taré, inconfortable, dérangeant, mais Grave est aussi symbolique, puissant, perturbant, parfois même brillant. Bombe dont l’onde de choc résonne encore dans les esprits des heures après la projection, Grave est traversé de scènes auxquelles les amateurs de cinéma de genre sont habitués, mais par son réalisme brut et viscéral, il rend insoutenable ce qui d’ordinaire aurait pu l’être. Parce qu’il anéantit la distance que met généralement le gore pur et dur par sa jouissive grandiloquence, privilégiant au contraire un réalisme à la lisière de l’écœurement voire du vomitif, Grave est un petit traumatisme, qui n’a rien de fondamentalement nouveau sur la forme comme sur le fond, d’autant que l’on pense énormément à Cronenberg tout au long de l’atroce balade. Mais il bouscule les esprits et les estomacs, mis à rude épreuve devant cet épouvantable et tragique récit « d’anthropophagisme maladif ». Certains y verront une complaisance gratuite dans une violence à l’horrifiant morbide malsain, d’autres y verront une expérience de cinéma particulièrement éprouvante mais perversement intense, tant elle procure des sensations, certes d’inconfort, mais des sensations quand même. Et après tout, n’est-ce pas pour ça que l’on vient au cinéma ? En clair, et sans mauvais jeu de mot vu son sujet, Grave est une affaire de goût.
Au fond, le film de Julia Ducournau joue sur des thématiques vieilles comme le monde, mélangeant pulsions de mort et de sexe (en somme, l’archétype Eros et Thanatos) dans un drame d’épouvante enraciné sur sa proposition de bouleverser viscéralement le spectateur. Mais les meilleures œuvres du genre sont celles qui arrivent à fonder leur démarche sur un propos. Celui de Grave est difficile à exhumer tant le film semble vouloir parler de beaucoup de choses, à moins qu’il ne s’en serve juste comme d’un prétexte. Peu probable tant Grave érige clairement des thématiques fortes. On pourra y voir une œuvre qui parle d’amour, de sexualité, de désir refoulé, d’apprivoisement du corps, de phobie, de transgression des interdits, on pourra y voir un pamphlet pro-vegan ou mieux, et bien plus subtil, une critique du fonctionnement de nos sociétés actuelles où pour s’intégrer, il faudra accepter de se fondre dans la masse en renonçant à ses idéaux marginaux et ses particularités propres. En somme, faire comme les autres est le secret de l’acceptation par autrui… mais dans le même temps, le début de sa propre perte. C’est en renonçant à ses convictions végétariennes que la jeune Justine se fera accepter des autres lors de son bizutage d’entrée de fac, mais c’est aussi cette même renonciation qui l’amènera à sa transformation cannibale et ouvrira la porte à son cauchemar.
Porté par une exceptionnelle Garance Marillier, qui donne tout ce qu’elle a pour le rôle, Grave est une claque dont la première secousse et suivie de répliques. Passé le premier choc frontal de la forme, alors que l’on est fasciné par tant de maîtrise artistique, c’est le fond qui vient achever de propulser très haut, la déflagration de Julia Ducournau. Lorsque l’on comprend à quel point tout ceci n’était pas vain, mais servait un propos fort. Malgré quelques imperfections malhabiles de scénario et des inspirations visibles, Grave est bel et bien l’électrochoc promis. Malaise assuré et comme le dit l’adage : âmes sensibles, s’abstenir.
BANDE-ANNONCE :
Par Nicolas Rieux
Bonjour, quelle est la date de publication de cet article svp ? Merci !