Mondo-mètre
Carte d’identité :
Nom : Godzilla
Père : Gareth Edwards
Date de naissance : 2014
Majorité : 17/09/14 (en vidéo) – 14/05/2014 (en salles)
Nationalité : USA
Taille : 2h03
Poids : Budget 200 M$
Livret de famille : Aaron Taylor-Johnson (Ford), Bryan Cranston (Joe), Ken Watanabe (Serizawa), Sally Hawkins (Dr Wates), Elizabeth Olsen (Elle), Juliette Binoche (Sandra), David Strathairn (Stenz)…
Signes particuliers : A ce rythme là, Gareth Edwards va finir par vite acquérir le surnom de « monsieur prouesses ». Après le tour de force Monsters, le cinéaste enchaîne avec un second exploit, celui de redonner ses lettres de noblesse au lézard géant Godzilla dans un superbe blockbuster hollywoodien respectueux de son âme japonaise, spectaculaire et intelligent, mis en scène avec élégance. Seul regret, à trop vouloir faire beau, fort et intelligent, Gareth Edwards en oublie parfois d’être « basiquement » fun.
LE RETOUR DU MONSTRE : AH SI, C’EST BIEN LA TAILLE QUI COMPTE !
LA CRITIQUE
Résumé : Godzilla tente de rétablir la paix sur Terre, tandis que les forces de la nature se déchaînent et que l’humanité semble impuissante… L’INTRO :
A l’instar d’un Neil Blomkamp avec District 9, il n’aura fallu qu’une seule et unique prouesse « de genre » à Gareth Edwards pour se faire remarquer du monde entier et capter l’attention du tout-puissant Hollywood. C’était il y a quatre ans avec l’intelligent Monsters, humble série B follement inventive et originale, tournée avec talent pour un micro-budget d’à peine 200 000 dollars ne trahissant jamais ses ambitions de drame SF saisissant, s’attachant au parcours de deux personnages essayant de quitter un Mexique mis en quarantaine après avoir été envahi par des créatures extraterrestres. La performance de Gareth Edwards qui y occupait tous les postes avec audace, passion et cinéphilie, lui aura valu de se voir confier l’un des blockbusters les plus attendus du moment, le périlleux reboot de la légende Godzilla, trésor national japonais depuis soixante ans et icône ultime du cinéma de monstre.
Désormais à la tête d’un pharaonique budget de 200 millions de dollars, on était en droit de se demander si le réalisateur n’allait pas perdre son âme dans ce grand saut l’envoyant du petit film d’auteur malin au gigantisme d’une énorme machine hollywoodienne à la distribution internationale privilégiant heureusement la qualité à la notoriété : Bryan Breaking Bad Cranston, Aaron Taylor-Johnson, la surdouée Elizabeth Olsen, la française Juliette Binoche, le nippon Ken Watanabe, la britannique Sally Hawkins… Pire, Gareth Edwards allait-il pouvoir se sortir des ornières d’un projet casse-gueule sur lequel Hollywood s’est déjà brisé les dents via Roland Emmerich en 1998, avec une version à jamais condamnée aux plus virulentes attaques des fans pour les trahisons faites au mythe.L’AVIS :
Bonne nouvelle, le jeune cinéaste a eu les coudées franches pour laisser libre court à son génie et modeler avec de nobles intentions cette énième adaptation sur grand écran du lézard géant radioactif. Gareth Edwards relève ce challenge téméraire avec panache et signe film fabuleux, à l’opposé scénaristique, stylistique et philosophique de l’échec d’Emmerich il y a 16 ans. Œuvre référentielle et fidèle à l’esprit de la saga nippone du célèbre monstre titanesque, tant dans les fondements de son histoire que dans son design (un vrai beau lézard au look convoquant l’original tout en le modernisant), le Godzilla de Gareth Edwards s’inscrit parfaitement dans la mythologie des anciens kaiju, quitte à surprendre le public américain en ambitionnant une œuvre forte et intelligente, s’ingéniant à ne jamais prendre le public pour plus idiot qu’il n’est avec une simple distraction pop corn sans fond. Ce Godzilla est armé d’une structure narrative progressiste ingénieuse, installant univers, personnages et émotions au centre de cette guerre des monstres, cachant dans un premier temps pour mieux dévoiler ensuite, retardant la visibilité pour mieux forger l’aura de sa créature enfin redevenue iconique. Du Spielberg dans l’âme, cinéaste avec lequel a grandi Gareth Edwards, comme beaucoup de metteurs en scène de sa génération.Gareth Edwards essaie de trouver le parfait compromis entre le blockbuster hollywoodien dantesque et monstrueux et les insaisissables qualités qui avaient fait la réussite de son Monsters. Le cinéaste ne cède jamais au cynisme de la superposition de couches d’action indigeste et de destructions massives faciles, pas plus qu’il ne verse non plus dans le spectacle ennuyeusement prétentieux (cf Noé récemment). Le juste milieu, il le tient très souvent avec clairvoyance, cet état où la vision extraordinaire d’un artiste talentueux croise la soumission à un propos fort et la volonté d’abreuver le spectateur d’un grand moment de cinéma impressionnant. Godzilla est beau. Godzilla est intelligent. Godzilla est intense, Godzilla est mythologique, Godzilla est épique, mais à sa façon. Courageux dans sa facture comme dans son histoire lardée de surprises narratives très audacieuses, cette nouvelle version est une (imparfaite) tentative de conciliation entre deux sortes de cinéma. Dans tous les cas, il n’est pas un produit décérébré mais une véritable œuvre cinématographique réhabilitant le cinéma-spectacle en lui conférant de la crédibilité à s’efforcer ainsi de dépasser le simple côté « plaisir coupable » pour aller chercher quelque-chose de plus matriciel, de plus essentiel et substantiel. Pour cela, le metteur en scène aura bossé. Beaucoup. Et le résultat s’en fait sentir, que ce soit pour les néophytes comme pour les amateurs purs et durs des kaiju de la Toho, auquel le cinéaste rend un vibrant hommage en puisant et s’appuyant sur leur héritage plutôt que de lui tourner le dos comme l’avait fait Emmerich en son temps (même si son film est loin d’être le honteux navet qu’on l’on veut bien y voir).Soigné avec esthétisme, pensé avec génie, construit avec intensité et émotion et brillamment articulé autour de la dichotomie entre échelle humaine et gigantisme monstrueux, Godzilla séduit et fascine malgré ses quelques petites longueurs. Son seul et unique vrai défaut sera finalement de trop creuser ses nobles qualités. À trop vouloir faire beau, fort, iconique et intelligent, Gareth Edwards en oublie parfois d’être tout simplement régressivement fun à l’image d’un Pacific Rim (qui lui pêchait sur d’autres points). Son Godzilla est par moments semblable à une série de mini-orgasmes programmés que la jouissance finale ne couronne pas toujours. Autant de scènes qui augurent des moments d’anthologie auquel le cinéaste coupe court sans cesse, nous laissant dans le désir permanent sans jamais satisfaire pleinement cette ardeur dévorante « de voir », si ce n’est au détour d’un final somptueux. Une démarche parfois déroutante et frustrante mais qui trouve au final une justification dans la globalité d’un film sage, subtil (si, si) et cohérent. Dans tous les cas, on adoube cette nouvelle adaptation, sacré moment de cinéma valeureux et inspiré, peut-être pas la baffe ultime espérée, mais au moins un blockbuster de très grande qualité (malgré une 3D peu utile), s’élevant au-dessus de la mêlée en conjuguant propos, créativité, sens artistique, technique, exigence, spectaculaire et suspens. Alors si la question qui vous taraude encore est « faut-il aller le voir ? », la réponse est un triple oui car le film remporte lui, un triple A !
TEST BLU-RAY : Claque visuelle au cinéma, on était en droit de se demander si Godzilla allait conserver toutes ses qualités et sa force sur son édition Blu-ray. La réponse est oui. Techniquement le Blu-ray édité par Warner est tout simplement parfait. Le définition de la galette HD est admirable, la qualité du travail sur le son conserve toute sa force dans un DTS HD 7.1 puissant (en français comme en anglais, chose appréciable). Côté bonus, comme souvent pour ce genre de blockbuster, ils sont essentiellement centré sur la production du film. On aurait pu attendre davantage, notamment sur le rapport du film aux anciens Godzilla de la Toho, mais non. On trouvera néanmoins de quoi être rassasier avec un module sur la légende de la créature (sous forme de reportages cherchant à démontrer son existence) ainsi que l’exploration exhaustive des coulisses de la production du film avec interviews des équipes, du réalisateur aux acteurs en passant par les producteurs.
Bande-annonce :
Par Nicolas Rieux
Enfin une bonne nouvelle !!! J’ai vraiment hâte de découvrir ce remake