Mondo-mètre :
Carte d’identité :
Nom : Bullet to the Head
Père : Walter Hill
Livret de famille : Sylvester Stallone (Jimmy Bobo), Jason Momoa (Keegan), Sung Kang (Taylor Kwon), Sarah Shahi (Lisa), Christian Slater (Baptiste), Adewale Akinnuoye-Agbaje (Morel), Jon Seda (Blanchard)…
Date de naissance : 2012
Nationalité : Etats-Unis
Taille/Poids : 1h31 – 55 millions $
Signes particuliers (+) : Un parfum eighties intermittent qui rappelle de beaux souvenirs du genre. Jason Momoa. Et quelques séquences d’action.
Signes particuliers (-) : Un bouillon assez médiocre et débile, bancal dans son équilibre entre old school et modernité et beaucoup trop premier degré. Stallone devient sa propre caricature.
DU MUSCLE MAIS PAS DANS LA TÊTE
Résumé : Jimmy Bobo, un tueur à gage, se met à dos ses anciens patrons suite à un contrat mal exécuté où il a laissé en vie une prostituée présente sur les lieux. En représailles, son associé est tué. Bobo va s’allier à un flic qui a perdu son coéquipier tué par le même homme, pour traquer le responsable…
Dix ans ! Dix ans que l’expérimenté Walter Hill avait déserté les plateaux de cinéma. La dernière fois, c’était en 2002 avec l’actionner bis Un Seul Deviendra Invincible. Un échec. De même que deux ans auparavant Supernova, fiasco SF auquel il aura participé. De même que six ans auparavant le pourtant très agréable Dernier Recours avec Bruce Willis. Peut-être fatigué de ces contre-performances successives lui rappelant à quel point elle est loin l’époque des 48 Heures, Hill s’est lassé et a préféré travailler dans l’ombre, producteur par exemple sur le titanesque Prometheus de Ridley Scott. Mais voilà, il en est certains à qui l’odeur des plateaux manque, les rappelant au bercail comme un animal affamé. Et en 2012, Walter Hill is back. Et fidèle à lui-même, à son style, à son travail, ce sera par le biais d’un bon vieil actionner de derrière les fagots, d’un film à l’ancienne, très eighties dans l’âme, avec une vedette, une star burinée de l’époque. Récemment, le coréen Kim Jee-won a ressuscité Arnold Schwarzenegger avec Le Dernier Rempart, redonnant au Gouvernator un rôle comme au bon vieux temps, tout en muscle, en virilité et en castagne et qui dépote. Walter Hill fait de même juste à côté, comme si les deux collègues de métier avaient partagé le même studio, mais avec notre éternel Sly Stallone qui, à la différence de Schwarzy, n’avait pas quitté le cinéma ces dernières années au contraire. The Expandables a prouvé qu’il avait encore des beaux restes le papi Rocky alors pourquoi pas une bonne bisserie artisanale old school où les coups de tatane côtoieraient les gunfights et les effets pyrotechniques au son de la voix cassée du comédien qui ne ferait, une fois n’est pas coutume, pas dans la dentelle estampillée actor’s studio. Walter Hill + Sylvester Stallone + cinéma d’action… on est partagé entre l’envie de saliver de bonheur rien qu’à l’idée et la crainte d’un produit fatigué essayant de faire vivre poussivement deux grands-pères qui ne seraient plus que des caricatures d’eux-mêmes. Et malheureusement, c’est plus vers la deuxième option que glisse Bullet to the Head, en VO dans le texte.
Adaptation d’une BD du français Matz, Du Plomb dans la Tête est donc un buddy movie (presque hommage) rappelant les illustres heures d’un genre que Hill ne connaît que trop bien. Suite au désistement du réalisateur Wayne Kramer (Lady Chance, Droit de Passage) en désaccord permanent avec Stallone, c’est le père des Guerriers de la Nuit et du Bagarreur qui débarque au pied levé sur le projet. Décidément, quand on voit la genèse chaotique de Supernova, on commence à se demander si Hill n’est pas désormais le gars que l’on appelle en catastrophe quand c’est la merde et qu’on est désespéré. Peu importe, au moins ce projet lui permet de renouer avec la caméra et on va pas s’en plaindre car il nous manque le Walter et son style inimitable qui est resté coincé dans les glorieuses années 80. Avec un moyen budget quand même gonflé aux millions et un autre nom qui fait plaisir quand on pense eighties, monsieur Joel Silver, en charge de la production, Walter Hill va accoucher d’un buddy movie qui assume à 100% son apparence de film « à l’ancienne ». Peut-être trop même puisque l’on sent parfois une pointe de « forcé » dans la volonté d’ancrer le film dans une autre époque révolue. Ne serait-ce que par la musique qui, cela n’échappera à aucun cinéphile, s’évertue à essayer de restituer l’ambiance des Arme Fatale. Sauf que Du Plomb dans la Tête n’a rien des classiques avec Gibson et Glover, loin de là.
Malgré la présence du charismatique Stallone, malgré des clins d’œil complices réguliers (les photos de jeune taulard du personnage Jimmy Bonomo campé par l’acteur, sont reprises de Rambo), malgré la musique référentielle et une réalisation qui se la joue volontairement rétro dans le style, ce nouveau Walter Hill est un semi-échec voire un échec tout court. La faute à un script pas très travaillé, pas très abouti, peu imaginatif et très expéditif, ce qui empêche de faire oublier déjà à la base, sa saugrenue idée de départ quand même sacrément idiote et improbable (un flic vient trouver un tueur à gage pour réclamer son aide afin de débusquer un autre tueur à gage impitoyable auquel ils en veulent tous les deux). Au-delà de cela, une réalisation souvent brouillonne cédant régulièrement, au lieu de rester fidèle à son parti pris eighties, à la mode actuelle du sur-découpage où l’on ne voit pas grand-chose, ce qui est bien dommage car les bastons entre l’ancienne génération personnifiée par Stallone et la nouvelle représentée par l’imposant Jason Momoa (Games of Throne, le « remake » de Conan) avaient de quoi faire leur effet, ajoutée à un manque de générosité et de second degré, plombent définitivement un film qui hésite sans cesse entre le lambda quelconque et lassant devant la facilité des artifices spectaculaires mis en œuvre et l’effort de production musclée marginale du système hollywoodien. Quelques séquences qui dépotent mais qui manquent cruellement de caractère et de singularité et surtout, un sérieux à tout épreuve, finissent d’affaiblir considérablement le produit fun que Du Plomb dans la Tête aurait pu être. Car au lieu d’emprunter le sentier choisi par le voisin Le Dernier Rempart, qui assumait volontairement le côté « ancien rouillé qui a encore de bons vieux restes mais qui fatigue avec sa trogne burinée de vétéran old school du cinéma pop corn d’action bis » de sa vedette Arnold, le film de W. Hill, lui, la joue au contraire premier degré et Stallone de devenir plus une caricature de lui-même et de son personnage « d’action guy » à la mâchoire serrée, qu’autre chose. Alors qu’il roule des mécaniques en dézinguant du méchant à tout-va avec beaucoup humour sur lui-même dans ses Expandables où il a bien compris qu’il fallait se servir du second degré pour faire passer les images de ces papis soixantenaires sur le retour qui jouent encore des muscles à leur âge, l’acteur cabotine à mort ici dans un rôle qui le met malheureusement en équilibre entre le ridicule et l’auto-caricature d’un rôle dont il fut l’emblème et qu’il ne veut pas quitter. Poussif, Du Plomb dans la Tête a un charme vintage trop intermittent pour donner au film le cachet d’un sympathique plaisir coupable divertissant, fun et rigolo. Et même si l’on ne s’ennuie pas vraiment devant cette « has-beenerie », on est quand même condamner à ronger notre frein devant un spectacle alternant le pathétique et l’efficace, poussé par ses bons éléments mais freiné par ses trop nombreux défauts structurels. Les amateurs de spectacle pop corn bourrin auront de quoi manger sans toutefois être repus tant l’association de ces deux artisans de l’actionner aurait pu donner vie à bien mieux que ce faire-valoir limité qui ne mène à pas grand-chose, globalement pas très bien interprété et exécuté avec le minimum syndical. A vouloir être à cheval entre vintage et modernité, Du Plomb dans la Tête n’est finalement bon ni dans l’un ni dans l’autre.
Bande-annonce :
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