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DIEU SEUL LE SAIT de John Huston : la critique du film

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note 4.5 -5
Carte d’identité :
Nom : Heaven Knows Mr Allison
Père : John Huston
Date de naissance : 1957
Majorité : 17 août 2016
Type : Ressortie en salles
Nationalité : USA
Taille : 1h48 / Poids : NC
Genre : Drame, Guerre, Romance

Livret de famille : Robert Mitchum, Deborah Kerr

Signes particuliers : Un chef-d’oeuvre de John Huston, qui ressort en salles en version restaurée.

UNE BIBLE ET UN FUSIL

LA CRITIQUE DE DIEU SEUL LE SAIT

Résumé : Seul rescapé d’un torpillage survenu pendant la guerre du Pacifique, le caporal Allison débarque sur une île qu’il croit déserte. À son grand étonnement, il y découvre sœur Angela, l’unique survivante d’une mission catholique détruite par les bombardements japonais. Parmi les problèmes que les deux «robinsons» doivent affronter, ceux que pose leur étrange cohabitation ne sont pas les moindres.. Les Japonais, en s’installant à leur tour dans l’île, les obligent à se cacher ensemble et à s’apprivoiser ainsi l’un l’autre. C’est le début d’une solide amitié et d’une fragile histoire d’amour… dieu_seul_le_sait_2En 1957, John Huston adapte le roman de Charles Shaw, Heaven Knows, Mr. Allison, où la rencontre de deux êtres que tout sépare, seuls et piégés sur une île paradisiaque qui va lentement se transformer en enfer, concret et abstrait. Réunissant sur cet atoll éloigné, un couple magique de cinéma avec le viril et nonchalant Robert Mitchum d’un côté, et la classieuse empruntée Deborah Kerr de l’autre, soit un Marine échoué en pleine Deuxième Guerre Mondiale et une nonne en attente de confirmation coincée depuis un moment sur ce lopin de terre, John Huston accouche d’un chef d’œuvre qui n’était pas couru d’avance. La Fox avait rapidement acquis les droits du roman de Shaw y voyant matière à une romance magnifique et émouvante, teintée de grand lyrisme. Le sujet était simple mais finalement pas si facile à traiter, la confrontation amoureuse entre une religieuse et un militaire présentant un risque non négligeable de déplaire aux ligues de vertu catholiques. Mais Huston arriva sur le projet et avec lui à sa tête, les chances de se retrouver avec une naïve love story à l’hollywoodienne de partir en fumée…dieu_seul_le_sait_3Ce qui devait arriver, arriva. John Huston transcenda son matériau, métamorphosa un récit qui aurait pu être simpliste et auréolé de guimauve, pour en tirer un chef-d’œuvre, l’un de ses films préférés, et au passage, l’un de ses plus grands succès. Sous l’œil de sa caméra, Dieu seul le Sait devînt un récit puissant, humaniste, exacerbant des sentiments de frustration intenses dans une histoire d’amour à la fois passionnelle et tragiquement impossible. Le choc de la mise en relation de ces deux personnages va être l’occasion d’une étude humaine riche, à travers laquelle Huston égratigne un peu la religion avec discrétion et habileté, l’une de ses grandes spécialités. Angela attend un sauveur, prie pour que Dieu la délivre de cet enfer dans lequel elle est prisonnière. Mais la nature va lui envoyer Mr. Allison, soldat échouant sur cette île. Si dans un premier temps, c’est elle qui assume la charge d’aider cet inconnu, rapidement, c’est lui qui va s’offrir à elle comme son salut. Et Huston de jouer sans arrêt, tout au long de son récit, sur les changements de positions de ses protagonistes l’un vis à vis de l’autre. Progressivement, la proximité de ces deux êtres esseulés et la tension sexuelle qui s’installe, vont faire naître des sentiments amoureux logiques et prévisibles, Angela et Allison étant comme une sorte d’Adam et Ève seuls dans leur paradis terrestre. Allison succombe au charme d’Angela mais son amour se heurte à sa fidélité divine. Puis alors que la raison reprend le dessus, c’est Angela qui se retrouve éprise de doute, sa foi vacillant devant la réalité d’une situation étouffante.dieu_seul_le_sait_4Avec Dieu Seul le Sait, John Huston livre une véritable histoire d’amour tragique, contraint par la différence. L’étude psychologique de ces deux êtres dans leur microcosme est magnifique et riche de subtilité, de profondeur. Allison est coincé entre son statut de militaire, le statut de sa partenaire intouchable, et la réalité d’un cadre idyllique, avec une belle femme et des sentiments naissants et incontrôlables. De son côté, Angela est tiraillée entre son dévouement pour Dieu, son engagement profond envers ses vœux, et l’attirance qu’elle éprouve pour ce sauveur peut-être envoyé par le ciel. Elle a beau résister, la frustration n’en est que plus grandissante, au diapason de l’amour refréné qu’elle ressent. Dieu Seul le Sait est un poignant récit d’espoir, mais avant tout une superbe histoire d’amour chaste, que la religion et l’armée frustrent. Deux êtres que tout oppose, dans ce qui est l’un des plus beaux films de non-amour qui soit, magnifié par son casting, transfiguré par son metteur en scène.

BANDE-ANNONCE :

Par Nicolas Rieux

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